Centrafrique : les rebelles avancent vers Bangui
Le Premier ministre centraficain Nicolas Tiangaye a lancé samedi aux rebelles un ultime appel à négocier « pour éviter un bain de sang » à Bangui d’où la Séléka s’est dite séparée par moins de trente kilomètres.
La coalition des insurgés a déclaré ne plus vouloir discuter avec le président Bozizé, un ancien général au pouvoir depuis 2003, et poursuivre sa progression vers la capitale entamée vendredi avec la prise de Damara, un verrou à 75 km au nord de Bangui. Les rebelles ont déclaré vouloir mettre en place un gouvernement de transition s’ils prenaient Bangui , où une équipe d’union nationale comprenant dirigée par M. Tiangaye, figure de l’opposition au président Bozizé, et comprenant des chefs rebelles a été formée en janvier pour mettre fin à une première crise.
"Le Premier ministre demande à nos frères de la Séléka de se mettre en rapport avec le gouvernement d’union nationale pour trouver une solution pacifique et éviter un bain de sang", a déclaré à l’AFP le porte-parole du gouvernement, Crépin Mboli Goumba. Il a souligné que les Nations unies, le département d’Etat américain et le président tchadien Idriss Deby, dont des forces sont présentes en Centrafrique, avaient réaffirmé leur soutien au gouvernement d’union nationale et aux accords signés le 11 janvier à Libreville entre pouvoir, rebelles et opposition politique. "On peut gagner ou perdre une guerre mais il est extrêmement important de gagner la paix", a-t-il conclu.
Samedi à la mi-journée, les troupes de la Séléka avaient progressé depuis le nord sur les deux axes routiers conduisant à la capitale et se trouvaient à moins de 30 km de Bangui, selon l’un de ses porte-parole Eric Massi, joint à Paris où il réside. A la faveur de ses succès militaires, la rébellion paraissait décidée à imposer une nouvelle donne.
"Négocier avec le général Bozizé, non. Combien de fois avons-nous négocié avec lui? Ca ne donne jamais rien", a déclaré le colonel Djouma Narkoyo, un des chefs militaires de la Séléka joint au téléphone par l’AFP depuis Libreville, peu avant l’appel aux pourparlers du gouvernement. L’accord de paix prévoit que M. Bozizé reste au pouvoir jusqu’à la fin de son mandat en 2016.
"Nous mettrons en place un gouvernement de transition"
Le responsable n’a pas voulu dire quand la rébellion envisageait d’entrer dans Bangui mais il a averti que, si elle prenait le pouvoir, elle installerait un nouveau gouvernement. "Nous mettrons en place un gouvernement de transition. Notre chef reste Michel Djotodia", a déclaré le colonel Narkoyo.
M. Djotodia, chef politique du Séléka, est vice-Premier ministre du gouvernement d’union nationale. Il a été retenu dimanche dernier à Sibut au nord de Bangui avec quatre autres ministres également issus de la Séléka venus rencontrer des rebelles accusant le président Bozizé de ne pas respecter les accords de Libreville. On ignore actuellement où se trouvent les ministres.
"Ne pas verser de sang"
Le président tchadien a lui aussi averti sur la radio française RFI "ne pas pouvoir accepter" une prise du pouvoir par les armes ni la remise en cause du gouvernement actuel. "Il faudra arriver à une solution sans verser du sang", a-t-il déclaré. Mais il a refusé d’intervenir en RCA comme il l’a fait en début d’année au Mali avec l’envoi de soldats combattre avec la France les jihadistes dans le cadre d’une opération validée par l’ONU.
"Il ne faut pas faire l’amalgame" entre le Mali et la Centrafique, a-t-il souligné, "il faut qu’ils (les Centrafricains) se comprennent entre eux, qu’ils arrêtent la violence, surmontent les difficultés et mettent en exécution les accords de Libreville".
Le colonel Narkoyo a souligné que la Séléka était prête à négocier avec la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale qui avait envoyé des soldats au secours du président Bozizé après le succès de la première offensive rebelle en décembre. "Si les chefs d’Etat de la CEEAC le demandent nous sommes prêts à les rencontrer et discuter", a-t-il dit. Il a appelé "les habitants de Bangui à rester chez eux et ne pas avoir peur".
Mais à Bangui, où la situation était calme mais les marchés tournaient au ralenti, "la nuit a été pénible. On était sur le qui-vive guettant les informations", a expliqué un employé de bureau. "Nous avons tellement peur que cette nuit nous avons déserté la maison pour aller à une vingtaine de kilomètres au sud de Bangui", a ajouté une enseignante qui a assuré avoir vu "de nombreuses personnes ayant fui la ville pour les champs". Ancienne puissance coloniale, la France a 250 militaires à Bangui avec pour mission de protéger ses ressortissants.
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