Égypte : deux morts au Caire, troubles à Port-Saïd après le verdict d’un drame du foot
Deux manifestants ont été tués, le 9 mars, au Caire dans de nouvelles violences, après un verdict dans le procès d’une tragédie du football, qui a également provoqué des troubles à Port-Saïd (nord-est) et alourdi le climat déjà tendu dans le pays.
Mis à jour le 10 mars à 10heures
Un tribunal de Port-Saïd, siégeant au Caire pour des raisons de sécurité, a confirmé 21 condamnations à mort prononcées en janvier et annoncé 24 condamnations à des peines de prison – dont cinq à perpétuité – ainsi que 28 acquittements.
Le 1er février 2012, après une victoire du club Al-Masry de Port-Saïd sur Al-Ahly, célèbre club de la capitale, des centaines de supporteurs locaux avaient attaqué la tribune d’Al-Ahly. Les violences avaient fait 74 morts, en majorité des supporteurs cairotes, le bilan le plus lourd de l’histoire du football égyptien.
Incendies
Au Caire, des supporteurs d’Al-Ahly, dénonçant des peines trop clémentes et l’acquittement de plusieurs policiers, ont incendié un club de la police et le siège de la Fédération égyptienne de football. « Au début, on était content quand on a entendu les 21 condamnations à mort. On fêtait ça et on n’a pas entendu le reste du verdict », concernant les condamnations moins sévères et les acquittements, a déclaré à l’AFP un "Ultra", le surnom des supporteurs d’Al-Ahly. « Ensuite, on est devenu très en colère », a-t-il ajouté. Les "Ultras" d’Al-Ahly sont réputés pour leur soutien actif à la révolte populaire qui a provoqué la chute de Hosni Moubarak début 2011.
Près de la place Tahrir, des heurts, sporadiques depuis de semaines, ont repris entre des manifestants et la police, faisant deux morts parmi ces derniers, selon le ministère de la Santé.
Des manifestants emmènent leur camarade grièvement blessé le 9 mars 2013.
© AFP
Les manifestants ont également incendié deux restaurants près de la célèbre place, assurant qu’ils appartenaient à des hommes d’affaires islamistes.
A Port-Saïd, sur le canal de Suez, des centaines de manifestants ont bloqué le trafic des ferries qui permettent de traverser le canal pour dénoncer à l’inverse la confirmation des peines capitales, prononcées principalement contre des supporteurs d’Al-Masry. Les manifestants ont brûlé des pneus, déployé une banderole réclamant "l’indépendance pour Port-Saïd" et scandé "invalides, invalides! " pour qualifier les décisions du tribunal.
L’organisme qui gère le canal a toutefois fait savoir que le transit des cargos n’était pas affecté sur cet axe vital du transport maritime international.
L’armée appelée à l’aide
La circulation ferroviaire a été suspendue entre le Caire et Alexandrie (nord) après que des manifestants ont bloqué la voie ferrée, a annoncé le chef de l’Autorité des chemins de fer, Hussein Zakarya cité par l’agence Mena.
Et dans le Sinaï, une région qui jouxte le canal et déjà troublée par des trafiquants et des militants islamistes, la police a été placée en alerte renforcée par crainte d’attaques contre des commissariats.
Plusieurs policiers faisaient partie des prévenus : deux officiers de haut grade ont écopé de 15 ans de prison, mais sept autres membres de la police ont été acquittés. La police avait été mise en cause pour sa passivité, et nombre d’Egyptiens pensent que l’affaire a été fomentée par d’anciens partisans de M. Moubarak afin d’attiser les tensions dans le pays.
« Ces verdicts ne touchent pas ceux qui ont réellement perpétré le crime, les chefs du ministère de l’Intérieur et les membres du conseil militaire » au pouvoir au moment de l’affaire, a estimé le Mouvement du 6-Avril, une organisation de jeunes pro-démocratie.
Les condamnations à mort de janvier avaient déjà provoqué une flambée de colère à Port-Saïd, où une quarantaine de personnes avait péri dans des affrontements avec la police. Les tensions avaient repris depuis une semaine dans cette ville.
Le président islamiste Mohamed Morsi a dû appeler l’armée au secours de la police pour tenter de ramener le calme à Port-Saïd. Ces violences ont alourdi le climat en Egypte, qui connaît une transition politique chaotique jalonnée de violences, deux ans après la chute de Hosni Moubarak et près de neuf mois après l’élection de M. Morsi, fortement contesté par une partie de la population.
Vendredi, le chef de la police anti-émeute en Egypte a été limogé après une grève sans précédent dans les rangs des policiers, qui dénonçaient leur manque d’équipement face aux manifestants violents et estimaient faire les frais de conflits politiques. Le pays, où la justice vient d’annuler l’organisation de législatives prévues fin avril pour non-conformité avec la Constitution, est également en proie à de graves difficultés économiques.
(AFP)
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