Un troisième soldat français tué au Mali
Des dizaines de combattants islamistes et un soldat français ont été tués au cours de violents combats dans le nord-est du Mali, dans les régions de Gao et du massif des Ifoghas, où seraient détenus des otages français, suscitant de nouvelles inquiétudes sur leur sort.
Un parachutiste français a été tué samedi soir, alors qu’il "montait à l’assaut d’une position ennemie" dans le massif des Ifoghas, région montagneuse proche de la frontière algérienne où se sont retranchés les groupes jihadistes, a annoncé dimanche le porte-parole de l’armée, le colonel Thierry Burkhard.
Il s’agit du troisième militaire français tué depuis le début de l’intervention au Mali, le 11 janvier, le second dans cette région.
Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a souligné qu’il s’était agi de l’"un des combats les plus violents" depuis le déclenchement des opérations.
Selon l’état-major, qui évoque des combats "à très courte distance, parfois inférieure à 50 mètres", "au moins une quinzaine" de combattants islamistes ont été "neutralisés", c’est à dire tués ou blessés, samedi au cours de ces affrontements.
"Nous avons face à nous un adversaire fanatisé qui défend fermement des positions sur lesquelles nous sommes obligés successivement de donner l’assaut pour les fouiller et les réduire", a indiqué le colonel Burkhard.
Par ailleurs, au moins 50 islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) ont été tués depuis vendredi dans d’autres combats avec des soldats maliens et français près de Gao, un ancien bastion islamiste dans le nord-est du pays, a-t-on appris de source militaire malienne.
Abou Zeid et Mokhtar Belmokhtar tués ?
L’annonce de ces affrontements meurtriers survient alors qu’on est toujours dans l’attente d’une confirmation de la mort dans des combats, dans le massif des Ifoghas, de deux des principaux chefs jihadistes, les Algériens Abdelhamid Abou Zeid et Mokhtar Belmokhtar, annoncée par le Tchad. L’annonce de leur mort et le silence de Paris sur la question alimentent de nouvelles inquiétudes sur le sort des otages français en Afrique.
Vendredi soir, le président tchadien Idriss Déby Itno a déclaré qu’Abou Zeid, un des principaux chefs d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avait été "abattu" par les soldats tchadiens. Et samedi, l’armée tchadienne a indiqué dans un communiqué que Mokhtar Belmokhtar dit +le borgne+", ancien haut responsable d’Aqmi récemment entré en dissidence, avait été tué au cours d’un nouvel affrontement dans la zone.
La mort de Belmokhtar, qui avait revendiqué en janvier l’attaque du site gazier algérien d’In Amenas, suivie d’une prise d’otages réprimée par l’armée algérienne, où 37 étrangers et un Algérien ont trouvé la mort, comme celle d’Abou Zeid, n’a pas été confirmée par les autorités françaises, qui se font très discrètes, ni par Bamako ou Alger.
"Pas de commentaire", a-t-on déclaré laconiquement samedi à la présidence française.
"Représailles"
"On veut que ça puisse être vérifié, c’est une question de temps. On n’est pas en mesure de confirmer", expliquait dimanche une source au ministère français des Affaires étrangères.
Le ministre de la communication tchadien Hassan Sylla a affirmé dimanche que le Tchad "ne parle pas dans le vide". "Nous allons présenter prochainement des prisonniers, des lieutenants qui étaient avec eux (chefs islamistes), des armes", a-t-il déclaré à l’AFP.
"La France ne veut pas être en première ligne sur ce type d’annonce, d’abord car la guerre n’est pas finie, ensuite en raison des otages. La non confirmation par Paris maintient un certain flou qui minimise l’événement. Ca permet de ne pas alimenter les velléités de représailles", estime Anne Giudicelli, spécialiste du terrorisme.
Quinze otages français sont retenus en Afrique, dont au moins six au Sahel par Aqmi et certains d’entre eux se trouveraient dans la région du nord-est du Mali où se déroulent les combats.
"Pour nos soldats sur le terrain, bien évidemment la sécurité des otages est une priorité et une préoccupation permanente", a souligné le colonel Thierry Burkhard.
Plusieurs proches des otages français enlevés au Mali, interrogés par l’AFP, ont refusé dimanche de commenter les informations sur la mort présumées de deux chefs islamistes, en raison du caractère non confirmé des informations.
Les informations sont aussi confuses : selon une version, Abou Zeid aurait été tué dans un bombardement de l’armée française, selon un autre lors d’un accrochage avec des militaires tchadiens.
L’armée française ne permet pas à des journalistes de se rendre dans la zone des combats.
Lourdes pertes pour l’armée tchadienne
Des résultats de tests ADN, actuellement effectués en Algérie, devraient être déterminants pour identifier Abou Zeid, selon la presse algérienne.
Pour Anne Giudicelli, "on laisse au Tchad le privilège de communiquer. Ca s’inscrit dans la stratégie politique qui depuis le début consiste à ne pas se mettre en avant et laisser les Africains en première ligne".
Le Tchad, qui a déployé plus de 2.000 hommes au Mali, est au premier rang aux côtés de l’armée française lors de ces opérations de nettoyage de l’Adrar des Ifoghas, où il a subi des pertes importantes, les plus lourdes parmi les différents contingents étrangers au Mali.
"Nous avons perdu beaucoup de Tchadiens. Nos hommes sont courageux, ils se battent au corps à corps", a reconnu le ministre, Hassan Sylla.
Vingt-six soldats tchadiens ont été tués au cours de ces combats, ainsi que plus de 90 combattants islamistes, selon N’Djamena. Les Tchadiens sont commandés par le fils du président Idriss Déby, le général Mahamat Idriss Déby.
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