David Mignot : « À notre programme, une chaîne spéciale Afrique »

Avec bientôt 1 million d’abonnés, le groupe audiovisuel français affirme sa stratégie de conquête au sud du Sahara.

David Mignot, le directeur général de Canal+ Afrique. © Vincent Fournier/JA

David Mignot, le directeur général de Canal+ Afrique. © Vincent Fournier/JA

Julien_Clemencot

Publié le 7 novembre 2013 Lecture : 4 minutes.

Entre deux voyages sur le continent, où il se rend plusieurs fois par mois, David Mignot, directeur général de Canal+ Afrique, nous reçoit dans son bureau, au bord de la Seine, à Boulogne-Billancourt. Pour Jeune Afrique, cet ingénieur télécoms, qui a effectué une partie de sa carrière à la Réunion, détaille les projets du groupe français au sud du Sahara. Parmi ceux-ci, la volonté « d’africaniser » les programmes.

Propos recueillis par Julien Clémençot

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Jeune Afrique : Il y a deux ans, Canal+ annonçait viser un million d’abonnés. Où en êtes-vous ?

David Mignot : Nous nous en approchons très vite, plus vite même que nous l’avions envisagé.

L’Afrique peut-elle devenir un relais de croissance pour votre groupe ?

Canal+ est un producteur important dans la zone francophone et veut contribuer à l’essor du cinéma en Afrique. 

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C’est déjà le cas. Le continent représente pour nous un pôle de développement stratégique. Pendant une période assez longue nous avons étudié comment des investissements faits en France pouvaient intéresser une frange d’expatriés. Puis Canal+ Afrique est devenu un opérateur à part entière.

De quand date ce changement ?

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De 2008, avec les premières mises sur le marché de décodeurs recyclés à des prix assez modestes. Cela correspond à notre rencontre avec les classes moyennes africaines. À partir de ce moment-là, Canal+ Afrique a élaboré sa propre politique commerciale.

Votre percée est-elle liée à la baisse du prix des abonnements ?

En partie, mais c’est aussi la conséquence d’un gros travail d’optimisation, qui a conduit à diviser les coûts d’accès par quatre ces quatre dernières années, pour les ramener à 25 000 F CFA [38 euros] en moyenne. En parallèle, nous avons effectivement réduit le prix des bouquets, qui démarre à 5 000 F CFA pour bientôt 100 chaînes.

Cet effort a aussi été accompagné par un renforcement de votre présence sur le terrain…

Effectivement. Nous avons multiplié par 4 ou 5 notre réseau de distribution. Aujourd’hui, près de 2 000 points de vente dans 25 pays proposent nos produits sur le continent (dont une centaine exclusivement consacrés à Canal+). Au total, notre activité représente entre 2 000 et 2 500 emplois directs.

Votre développement s’est-il accompagné d’une africanisation des équipes de direction ?

Aujourd’hui plus de 90 % de nos équipes sont en Afrique. Sur les 20 membres de notre comité de direction, la moitié vient du continent. Nous continuons d’avoir un siège, très léger, à Paris, parce que nous sommes adossés au groupe Canal+ et que c’est un atout en matière de production et d’innovation technologique.

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Canal+ s’intéresse-t-il à la télévision numérique terrestre (TNT), dont le lancement est prévu en 2015 sur le continent ?

Si cela nous permet d’élargir notre offre, pourquoi pas ? Le dossier est à l’étude. Une décision devrait être prise d’ici trois à six mois.

En 2011, Canal+ a quitté le Maghreb en raison du piratage de ses programmes. Envisagez-vous un retour dans cette région ?

La situation dans ces pays ne le permet pas. C’est très regrettable.

Le problème se pose-t-il avec autant d’acuité en Afrique subsaharienne ?

De moins en moins. Depuis ces derniers mois, nous avons mené des opérations de sécurisation de notre parc technologique qui rendent le piratage de notre signal plus compliqué. Cela a nécessité un investissement de plus de 10 millions d’euros.

Au second semestre 2014, vous lancerez une chaîne africaine. Tous les programmes seront-ils africains ?

Oui pour la grande majorité d’entre eux. Nous allons concevoir une chaîne généraliste de divertissement faite en Afrique, pour les Africains.

Est-il envisageable que cette chaîne africaine devienne le produit phare du groupe à la place de la chaîne Canal+ ?

Je ne le crois pas. Les grands championnats de football, le cinéma américain et français constituent le fond de la demande. Les émissions « poil à gratter » qui font l’ADN du groupe sont aussi appréciées par nos clients. Les deux modèles doivent coexister.

D’où viendront ces programmes ?

Le Nigeria, le Ghana, l’Afrique du Sud possèdent des catalogues intéressants. Par ailleurs, Canal+ est un producteur important dans la zone francophone et veut contribuer à l’essor du cinéma en Afrique.

Le modèle fonctionnera d’autant mieux qu’il y aura d’autres médias capables d’investir aussi dans la production…

C’est notre pari. Mais le secteur audiovisuel ne pourra se renforcer sans le respect de la propriété intellectuelle, qui permet que des chaînes qui coproduisent ne soient pas victimes du piratage.

« Réussite » en vue

La naissance officielle de Réussite est annoncée pour le 17 janvier 2014.

Nouveau et premier en son genre, ce magazine entièrement consacré à l’économie africaine illustre la volonté de Canal+ Afrique de renforcer la production et la diffusion de programmes exclusifs et innovants, à l’image de ses deux émissions phares que sont +D’Afrique et Talents d’Afrique. D’une durée de cinquante-deux minutes, l’émission fera écho, via des reportages et des portraits, aux succès économiques du continent, de ses entreprises et de ses hommes d’affaires. Elle traitera des grands débats qui traversent le sud du Sahara. Aux manettes : Canal+ Afrique, l’agence de presse télévisée Galaxie Presse et le Groupe Jeune Afrique. La Franco-Nigériane Elé Asu en sera la présentatrice.  Frédéric Maury

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