Des associations veulent poursuivre Franck Biya devant les tribunaux français

Plusieurs associations de Camerounais de l’étranger veulent faire juger Franck Biya, le fils du président camerounais, devant la justice française pour « recel de détournement de deniers publics ».

Le Palais de justice de Paris. © Nitot

Le Palais de justice de Paris. © Nitot

Publié le 23 décembre 2012 Lecture : 4 minutes.

Entre la présidence du Cameroun et une nébuleuse d’associations regroupant des Camerounais de l’étranger, la guérilla judiciaire se poursuit. L’une d’entre elles, le One Cameroon Movement (OCM), a annoncé le dépôt d’une requête début décembre auprès de l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF), en France. Cette fois, c’est Franck Emmanuel Biya, le fils aîné du président camerounais, qui est visé. L’OCM soupçonne ce dirigeant d’entreprise de 42 ans de détenir des biens mal acquis sur le territoire français. Contacté par Jeune Afrique, l’OCRGDF refuse de confirmer ou d’infirmer l’existence de la plainte.

Quoiqu’il en soit, l’OCM n’est pas la seule association qui souhaite poursuivre Franck Biya devant les tribunaux. Le très actif Conseil des Camerounais de la diaspora (CDD) est en train de ficeler une procédure qui devrait être lancée dans les tout prochains jours. Cette association s’était déjà fait connaître en février 2010 en déposant plainte contre Paul Biya lui-même auprès du Tribunal de grande instance de Paris. Plainte classée sans suite par le parquet, qui invoquait notamment l’immunité présidentielle de Paul Biya. « Nous avons appris de nos erreurs et prenons notre temps pour que la nouvelle plainte soit déclarée recevable et qu’une information judiciaire soit ouverte », assure Robert Waffo Wanto, le président du CCD. Selon ce militant, la procédure en « recel de détournement de deniers publics » ne sera pas forcément engagée à Paris. « Nous saisirons les tribunaux des lieux de localisation des biens retrouvés à l’issue de nos enquêtes », précise-t-il.

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Ces tentatives de poursuites en justice font suite à la révélation par la presse camerounaise d’une affaire de spéculation financière portant sur des obligations émises par le Trésor camerounais, dans laquelle une entreprise détenue par Franck Biya a été citée. Les montants du détournement pourraient s’élever jusqu’à 100 milliards de F CFA (1,5 million d’euros) Selon les journaux, en effet, Franck Biya aurait joué sur ses appuis au sein de l’appareil d’État pour « acheter les obligations du trésor à coupon zéro (OTZ) en dessous de leur valeur de marché puis à se les faire immédiatement racheter à leur valeur à maturité par le Rrésor public ».

L’affaire des titres Camtel

Tout est parti de la titrisation de la dette du Cameroun évaluée selon un audit rendu public en 2004 à plus de 1400 milliards de F CFA. L’État était débiteur non seulement des agents publics pour les salaires impayés, mais aussi de ses fournisseurs et des entreprises publiques, dont la Cameroon Télécommunications (Camtel). Cette dernière lui réclamait alors plus de 80 milliards de F CFA. Selon un accord signé en 2005, l’État s’engageait par conséquent à payer selon un échéancier précis : 24 milliards par versements mensuels de 200 millions en 105 mensualités jusqu’en 2015. Le solde, 56,7 milliards devait faire l’objet de titres négociables. Ainsi sont nées les obligations à coupon zéro. En paiement de la dette de la Camtel, 56 000 titres d’une valeur faciale de un million de F CFA chacun sont émis, dont la maturité était prévue entre 2011 à 2017.

À la suite d’un accord signé en 2005, Afrione Cameroun, société détenue par Franck Biya, acquiert  9400 titres préalablement mis à disponibilité d’une autre société détenue par le même Franck Biya, SFA Ingénierie. Cette acquisition est réalisée à titre de nantissement après « main-levée » de SFA. L’argent frais qui résulte de la transaction permettra à Camtel d’anticiper le remboursement du prêt de 4,7 milliards que lui avait consenti SFA Ingénierie. Après avoir acquis les 9400 titres de Camtel, la société Afrione Cameroun va négocier et obtenir du ministère des Finances, émetteur des obligations, un paiement anticipé de celles-ci. Le procédé est dénoncé par une association locale qui saisit l’Assemblée nationale dans l’espoir d’obtenir la création d’une commission d’enquête parlementaire. En vain.

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« Afrione aurait pu attendre que les 9400 titres dont il était détenteur lui rapportent à maturité en 2014 un peu plus de 12 milliards de Fcfa. En sollicitant un paiement anticipé huit ans plus tôt, elle n’en a récolté que 6,58 milliards après décote en valeur faciale », plaident les soutiens du fils du président camerounais. Pour l’instant, ni Franck Biya, ni les dirigeants de Camtel et encore moins ceux de la Caisse autonome d’amortissement n’ont réagi. En attendant, la polémique prend de l’ampleur.

Rectificatif :

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Nous tenons à présenter toutes nos excuses à M.Franklin Nyamsi (en photo, ci-contre), professeur agrégé de philosophie à l’Académie de Rouen (France). Sa photo a été malencontreusement utilisée, dans un premier temps, pour illustrer cet article. Nous sommes désolés de cette méprise, qui a été corrigée dès que possible. La période des fêtes – et donc la fermeture de nos bureaux – a malheureusement décalé de quelques jours notre temps de réaction. Nous répétons donc bien que cette photo ci-contre est celle de M.Franklin Nyamsi, et pas celle de Franck Biya. Ci-dessous, le rectificatif publié dans le numéro 2713 de Jeune Afrique le 6 janvier 2013.

 

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