Disparition de Henry Kissinger, géant controversé de la diplomatie américaine

L’ancien secrétaire d’État américain aura profondément marqué les relations internationales de la seconde moitié du XXe siècle, contribuant notamment à la reprise des relations entre Washington et Pékin.

Henry Kissinger à l’aéroport d’Orly lors de son arrivée pour assister aux pourparlers de paix sur le Vietnam, le 20 novembre 1972. © AFP

Henry Kissinger à l’aéroport d’Orly lors de son arrivée pour assister aux pourparlers de paix sur le Vietnam, le 20 novembre 1972. © AFP

Publié le 30 novembre 2023 Lecture : 3 minutes.

Henry Kissinger, grande figure controversée de la diplomatie américaine et secrétaire d’État sous Richard Nixon et Gerald Ford, est mort le 29 novembre à l’âge de 100 ans.

Avec son décès, « l’Amérique a perdu l’une de ses voix les plus sûres et les plus écoutées en politique étrangère », a salué dans un communiqué l’ancien président américain George W. Bush, républicain comme lui. Initiant le rapprochement avec Moscou et Pékin dans les années 1970, Henry Kissinger a vu son image ternie par des pages sombres de l’histoire des États-Unis, comme le soutien au coup d’État de 1973 au Chili ou l’invasion du Timor oriental en 1975 et, bien sûr, la guerre du Vietnam.

la suite après cette publicité

À Pékin en juillet

C’est son sens de la realpolitik, du froid calcul des intérêts nationaux défendu par la puissance, qui a fait de lui une figure très critiquée de par le monde. Diplomate aussi écouté que controversé, l’homme à la voix rocailleuse aimait distiller ses pensées aux journalistes et dans les colloques internationaux. Fascinant ses publics par sa longévité et sa vaste expérience, il était admiré par les uns comme un grand sage, détesté par les autres qui voyaient en lui un criminel de guerre.

L’homme avait conservé l’oreille des grands de ce monde, bien des décennies après avoir quitté ses responsabilités dans les affaires internationales. Il s’était ainsi rendu à Pékin en juillet pour s’entretenir avec le président chinois Xi Jinping, qui avait salué à cette occasion un « diplomate de légende ».

L’ambassadeur de Chine aux États-Unis, Xie Feng, a lui qualifié de « perte énorme » la disparition de Kissinger, architecte du rapprochement entre Pékin et Washington dans les années 1970. « Je suis profondément bouleversé et attristé », a écrit le diplomate chinois sur X. Le Premier ministre japonais Fumio Kishida a pour sa part salué les « contributions significatives à la paix et la stabilité » en Asie du diplomate américain.

La Chine occupe une place à part dans la carrière de Kissinger. Il a joué un rôle clé dans le dégel des relations américaines avec la Chine de Mao en effectuant des voyages secrets pour organiser la visite historique de Richard Nixon à Pékin en 1972. Cette main tendue à la Chine a mis fin à l’isolement du géant asiatique et contribué à la montée en puissance de Pékin sur la scène mondiale.

la suite après cette publicité

Prix Nobel

Autre contribution importante : il a mené, toujours dans le plus grand secret et parallèlement aux bombardements de Hanoï, des négociations pour mettre fin à la guerre du Vietnam.

Henry Kissinger est également reconnu aux États-Unis pour son rôle de médiateur entre Israël et les pays arabes. En 1973, après l’attaque surprise de pays arabes lors de la fête juive de Yom Kippour en Israël, il organisa notamment un pont aérien massif pour ravitailler l’allié israélien en armes.

la suite après cette publicité

Juif allemand né en 1923 en Bavière, Heinz Alfred Kissinger fuit l’Allemagne nazie avant d’être naturalisé américain à l’âge de 20 ans. Fils d’instituteur, il avait intégré le contre-espionnage militaire et l’armée américaine avant de poursuivre de brillantes études à Harvard, où il a également enseigné. Reconnaissable à sa grosse monture de lunettes, il s’est imposé comme le visage de la diplomatie mondiale lorsque le républicain Richard Nixon l’a appelé à la Maison Blanche en 1969 comme conseiller à la sécurité nationale, puis comme secrétaire d’État, cumulant les deux postes de 1973 à 1975.

Il survivra au départ de Nixon – qui démissionna en 1974 en raison du scandale du Watergate – et resta maître de la diplomatie sous son successeur Gerald Ford jusqu’en 1977. La signature d’un cessez-le-feu lui a valu le prix Nobel de la paix avec le dirigeant nord-vietnamien en 1973, l’un des plus controversés dans l’histoire du Nobel. Le Duc Tho refusa le prix, arguant que la trêve négociée n’était pas respectée, et Kissinger n’osa pas se rendre à Oslo, de peur des manifestations.

(Avec AFP)

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Le président des États-Unis, Harry Truman (gauche) rencontre le Premier ministre israélien David Ben Gourion à la Maison Blanche à Washington, le 8 mai 1951. © Leemage via AFP

Comment est né le « soutien inconditionnel » américain à Israël ?

Contenus partenaires