En Algérie, interdiction de sortie du territoire pour Abderrazak Makri

L’ancien chef du parti islamiste MSP a découvert la mesure qui le frappait en arrivant à l’aéroport. Malgré ses contacts au sommet de l’État, il n’a pas pu obtenir d’explication et assure qu’on veut ainsi lui faire payer son soutien à la cause palestinienne.

L’ancien chef du parti islamiste MSP, l’Algérien Abderrazak Makri. © AFP

L’ancien chef du parti islamiste MSP, l’Algérien Abderrazak Makri. © AFP

Publié le 1 décembre 2023 Lecture : 3 minutes.

Quand il s’est présenté, le 28 novembre dernier, devant le contrôle de police de l’aéroport d’Alger, l’ex-chef du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abderrazak Makri, ne se doutait pas un instant qu’il était interdit de sortie du territoire national puisqu’il n’était, confie-t-il, sous le coup d’aucune poursuite judiciaire. Surpris, il demande à l’agent de police le motif de cette mesure. Celui-ci lui répond qu’il ne dispose d’aucun détail sur l’origine de la décision.

Ce jour-là, l’ancien président du parti islamiste devait se rendre d’abord à Doha pour une « visite de courtoisie aux dirigeants du Hamas, dont Ismaïl Haniyeh, et prendre des contacts pour conclure des accords de partenariat en vue d’organiser le septième congrès international du forum de Kuala Lumpur sur l’effondrement moral et éthique des États occidentaux face au génocide en cours à Gaza ».

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Il devait ensuite s’envoler pour la Malaisie dans le cadre de la préparation de cette même rencontre. L’ancien chef du MSP, qui a été reçu à quatre reprises par le chef de l’État Abdelmadjid Tebboune ces trois dernières années dans le cadre du dialogue avec les partis politiques, pensait pourvoir compter sur son carnet d’adresses « pour régler le problème ». Suite à l’incident de l’aéroport, il enchaîne donc les coups de fil. Sans succès.

En l’absence de poursuites judiciaires, ce médecin de 63 ans, père de huit enfants, qui ne cache pas son admiration pour le président turc Recep Tayyip Erdoğan, en arrive à la conclusion que son interdiction de voyager est sans doute liée à son appel, lancé dans la soirée du 17 octobre dernier, à sortir dans la rue pour dénoncer le bombardement de l’hôpital Al-Ahli de Gaza .

Appel à manifester

« Je vais sortir et j’appelle les gens à me suivre » avait-il posté sur sa page Facebook ce jour-là, avant d’enchaîner les directs le montrant échanger avec des Algériens attablés aux terrasses de café dans les différents quartiers de la capitale. Quelques minutes plus tard, il était arrêté, puis relâché après un long interrogatoire. Les manifestations et rassemblements de rue restent en effet interdits depuis juin 2021, sauf autorisation préalable.

Le lendemain, le cadre du parti islamiste proche des frères musulmans récidive en postant une vidéo appelant les autorités à organiser elles-mêmes leur marche, soulignant que « la cause palestinienne est un sujet de consensus entre le pouvoir, la population et les partis de l’opposition ». « Sortez et on sera derrière vous, promet-il alors dans son appel. On ne cherche pas le leadership sur le dos de la noble cause palestinienne. »

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Makri entendait ainsi réagir à ce qu’il considère comme une attitude paradoxale du pouvoir algérien. Lequel, bien qu’affichant un soutien historique et inconditionnel à la Palestine, a hésité pendant treize jours – par crainte de débordements contestataires – avant de laisser la population exprimer sa colère contre les bombardements de la bande de Gaza.

Sur les réseaux sociaux, la frustration et la colère montaient crescendo, certains n’hésitant pas à relever qu’au Maroc, pas un jour ne passe, ou presque, sans un rassemblement pour la Palestine. Et ce en dépit du rapprochement opéré ces dernières années entre Rabat et Tel-Aviv.

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« Personnellement ciblé par le pouvoir »

L’ex-candidat au scrutin présidentiel de 2019 a annoncé lui-même, jeudi 30 novembre, son interdiction de sortie du territoire national via les réseaux sociaux, affichant sa conviction qu’il était désormais « directement et personnellement ciblé par le pouvoir politique » et exprimant en même temps sa « fierté de subir ce harcèlement tant que cela concerne la cause palestinienne ».

Fin novembre 2022, Abderrazak Makri, resté dix ans à la tête du MSP, avait annoncé sa décision de ne pas briguer un troisième mandat et son retrait de toutes les instances dirigeantes du parti islamiste. Il ne cache pas, toutefois, son ambition de se porter candidat au prochain scrutin présidentiel de 2024, « à condition que certains facteurs soient réunis pour une compétition transparente ».

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