Au Tchad, une crise de plus à la fédération de football

À l’heure où nous écrivons ces lignes, la Fédération tchadienne de football association (FTFA) n’a plus de direction. Le 30 novembre, la mission du comité de normalisation, composé de sept membres, présidé par l’avocate Jacqueline Moudeina et installé par la Fifa en décembre 2021, devait officiellement prendre fin. Problème, l’Assemblée générale élective, censée se réunir à l’hôtel Radisson Blu de N’Djamena, n’a jamais eu lieu.

Une délégation de la Fifa

En effet, Tahir Oloy Hassan, ex-président de la fédération d’escrime et prétendant à la tête de la FTFA, avait saisi la justice après que son dossier de candidature eut été invalidé par le comité de normalisation. Ce dernier lui reprochait, entre autres, « des anomalies dans [son] dossier », ainsi que d’avoir falsifié des pièces pour justifier « de [ses] années d’expérience dans le football ».

Naïr Abakar, le vice-président du comité de normalisation, s’était opposé à cette invalidation et au fait qu’un seul candidat, Ibrahim Foullah, reste en lice, puisque Moctar Mahmoud Hamid, l’ancien président de la FTFA, ainsi que les présidents de clubs Adjib Koulamallah (Gazelle) et Saleh Kadre Kana (Tourbillon), ont retiré leur candidature. Mais Abakar a été suspendu par la Fifa.

Afin de protester contre son éviction, Tahir Oloy Hassan a saisi le Tribunal arbitral du sport (TAS), ainsi que le tribunal de grande instance de N’Djamena, dont le président, Mahamat Saleh Adoum Dabara, a aussitôt signé une ordonnance suspendant la tenue de l’Assemblée générale élective du 30 novembre. Des forces de l’ordre avaient même été dépêchées sur place pour bloquer l’accès de l’hôtel aux membres du collège électoral.

Menace de suspension

Informée de la situation, la Fifa a demandé à quatre émissaires – Gelson Fernandes, Dieudonné Happi, Fatou Binetou Ba et Jean-Jacques Diene – de se rendre à N’Djamena. Le premier, directeur des associations membres pour l’Afrique, a été reçu par le Premier ministre, Saleh Kebzabo, et a laissé planer la menace d’une suspension de la fédération tchadienne par la Fifa.

« Un candidat, Tahir Oloy Hassan, qui ne connaît rien au football, a décidé de saisir la justice et de bloquer le processus électoral. C’est regrettable, car cela pénalise l’ensemble du football tchadien. Je ne sais pas si la mission du comité de normalisation sera prolongée ou si l’élection aura lieu prochainement, mais la situation est préoccupante », déplore Ibrahim Foullah.

Homme d’affaires, ancien maire de N’Djamena et ex-vice-président de la FTFA, celui-ci est présenté par ses opposants comme étant le candidat de la fédération internationale. Contacté par Jeune Afrique, l’intéressé réfute cette proximité avec l’instance. « Je suis le seul candidat légitime, le candidat du football tchadien », affirme-t-il.

Tahir Oloy Hassan est loin de partager cette analyse. « M. Foullah a été vice-président de la Fédération, il a une part de responsabilité dans l’état de notre football. Il traîne des casseroles, puisqu’il est soupçonné d’avoir détourné des centaines de millions de francs CFA quand il était numéro deux [de la FTFA]. Malgré cela, sa candidature a été validée par le comité de normalisation. Je rappelle que la présidente de ce comité était sur la liste de M. Foullah quand celui-ci s’était déjà présenté à l’élection, en 2020. Mme Moudeina a une énorme part de responsabilité dans cette situation. »

Informé d’un risque de suspension par la Fifa, le gouvernement tchadien suit la situation de très près. « La Fifa étudie ce dossier, elle devrait se prononcer dans les prochains jours. Si la Fédération est de nouveau suspendue, ce serait une catastrophe pour le football tchadien, alors que la sélection nationale a fait son retour sur la scène internationale au mois de novembre en qualifications pour la Coupe du monde 2026 [défaites 1-3 face au Mali et 0-3 contre Madagascar] », analyse une source locale.