Des messes « trop africaines » : la sainte colère du cardinal Sarah
Au Sénégal, le prélat guinéen a évoqué une « destruction » de la messe en Occident et une « dénaturation » du culte catholique en Afrique.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 6 décembre 2023 Lecture : 2 minutes.
Alors qu’au Ghana le cardinal Turkson vient de faire preuve de progressisme en critiquant la criminalisation des personnes LGBT, son collègue Robert Sarah confirme sa réputation de traditionnaliste. Présent jusqu’au 8 décembre à Dakar pour un colloque sur la liturgie, le prélat guinéen a pourfendu les atteintes aux pratiques catholiques, d’un côté de la Méditerranée comme de l’autre.
Dans une homélie prononcée dans la cathédrale de la capitale sénégalaise ce 4 décembre, le cardinal Sarah a fustigé le « démantèlement des valeurs de la foi et de la piété » ainsi que la « destruction des formes de la messe » dans un Occident où la pratique chrétienne est clairement en berne, en particulier dans les lieux de culte catholiques.
Le mystère pascal dénaturé ?
Si l’Afrique constitue censément l’avenir démographique de l’Église catholique, apostolique et romaine (ce qui constitue un atout pour un prélat africain que l’on dit candidable à la papauté), Robert Sarah n’est pourtant pas rassuré par l’évolution qualitative des liturgies qu’il juge, sur le continent, « trop banales », « trop bruyantes », « trop africaines » et au final, « moins chrétiennes ». De même, il déplore que certaines célébrations « durent quelquefois six heures ».
Pour le préfet émérite de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, le saupoudrage, sur la pratique catholique, de coutumes africaines – ou asiatiques en Asie – dénature « le mystère pascal ». En un clin d’œil à feu le pape rigoriste Benoît XVI, « seul savant face à une armée de pseudo-liturgistes », l’officiant du jour a balayé d’un revers de la main la question de « l’efficacité pastorale ».
Pas de wolof, mais du latin
Pas de concessions aux traditions dans le but de séduire ? Une pierre dans le jardin de ceux qui se réjouissent d’une certaine « tropicalisation » des cultes, effort d’adaptation porteur d’enrôlement et de ferveur positivement exubérante.
Décidément peu enclin à la séduction, le cardinal Sarah semble avoir inspiré un changement d’habitude dans cette cathédrale. Contrairement aux autres lundis, aucun chant en wolof n’a résonné. Le latin cher aux traditionnalistes a, lui, fait son apparition dans le lieu de culte.
Les parfums de précampagne électorale sénégalaise ont-ils inspiré le cardinal Sarah qui se rêverait en Benoît XVII ? Il serait plus simple d’imposer au Conclave du Vatican un pape africain si celui-ci tempérait l’africanisation à outrance des cultes. Mais le pape François n’a pas encore rendu sa soutane et le Guinéen a déjà 78 ans.
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