La France ne dénoncera pas l’accord migratoire avec l’Algérie
Présentée par Les Républicains, la proposition de résolution visant à dénoncer l’accord de 1968 qui accorde des facilités spécifiques aux Algériens venant séjourner en France a été rejetée par l’Assemblée nationale.
L’Assemblée nationale française a rejeté, jeudi 7 décembre, par 151 voix contre 114, le texte demandant de dénoncer l’accord franco-algérien de 1968, lequel confère un statut particulier aux Algériens en matière de circulation, de séjour et d’emploi en France.
La proposition de résolution avait été mise à l’ordre du jour par les députés Les Républicains (LR) dans le cadre de leur « niche parlementaire », une journée dont ils fixent à leur guise le programme. Au sein du camp présidentiel, seul le groupe Horizon de l’ancien Premier ministre Édouard Philippe et deux députés du groupe Renaissance ont voté en faveur du texte, qui même en cas d’adoption n’aurait pas eu de valeur contraignante.
Dans l’exposé des motifs de cette résolution, Les Républicains évoquent la nécessité d’« en finir avec cette exception juridique qui facilite l’immigration des ressortissants algériens vers notre pays, en leur donnant un statut dérogatoire au droit commun, plus favorable que ne l’est le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) ».
Parmi les groupes d’opposition, le Rassemblement national (RN) a apporté son soutien aux LR, à qui tous les groupes de gauche ont au contraire reproché d’agiter les « fantasmes » sur les questions migratoires. Signé en 1968, alors que la France avait besoin de bras pour son économie, l’accord écarte les Algériens du droit commun en matière d’immigration. Ils ne sont en effet pas soumis à l’obtention d’une carte de séjour en France, mais se voient attribuer des « certificats de résidence ».
Renaissance vote contre
Ils peuvent notamment s’établir librement pour exercer une activité de commerçant ou une profession indépendante, et ils accèdent plus rapidement que les ressortissants d’autres pays à la délivrance d’un titre de séjour de dix ans.
C’est « presque un droit automatique à l’immigration », déplorent les députés LR, à quelques jours de l’examen par l’Assemblée, le 11 décembre, du projet de loi du gouvernement visant à mieux « contrôler l’immigration ». Certains députés macronistes ne voyaient pas d’un mauvais œil l’envoi d’un « signal » à l’Algérie, mais le groupe Renaissance – qui réunit les élus fidèles au président de la République – s’est accordé sur un vote défavorable.
Lors des débats, son oratrice, la députée du Val-d’Oise Huguette Tiegna, a estimé que si la révision de l’accord était « nécessaire, dénoncer un accord de manière unilatérale serait une agression envers un pays voisin et ami ». « Vous voulez faire plaisir à la frange de votre électorat la plus extrême », a lancé de son côté aux LR l’écologiste Sabrina Sebaihi, soulignant que l’accord comportait également des dispositions défavorables aux Algériens, citant les étudiants.
La communiste Soumya Bourouaha a également jugé qu’il ne s’agissait « pas de privilèges et encore moins d’une anomalie. […] Ce sont les conséquences d’une histoire commune qui demeure ». Pour le député LFI Bastien Lachaud, enfin, avec ce texte des LR, « on croirait lire un tract d’extrême droite ».
Sérieuses conséquences
Le ministre délégué au Commerce extérieur, Olivier Becht, a rappelé à l’Assemblée que le gouvernement envisageait une révision de l’accord plutôt que sa dénonciation. Une dénonciation serait contre-productive, avec le risque de provoquer « une réaction des autorités algériennes qui aurait de sérieuses conséquences et pourrait conduire à geler le dialogue migratoire », a-t-il ajouté.
Dans un entretien accordé mercredi au quotidien Le Figaro, la Première ministre, Élisabeth Borne, avait quant à elle évoqué des discussions entre Paris et Alger concernant ces accords de 1968. « Dans les conclusions du quatrième Comité intergouvernemental de haut niveau France-Algérie [CIHN], qui s’est tenu en octobre 2022, nous avions évoqué l’ouverture de discussions en vue d’un quatrième avenant à cet accord. Nous avons des demandes et le gouvernement algérien en a de son côté. C’est donc effectivement à l’ordre du jour », a-t-elle déclaré.
Dans un communiqué conjoint qui a sanctionné la 5e session du CIHN, qui s’est tenue à Alger au cours de la visite de Mme Borne les 9 et 10 octobre 2022, les deux parties avaient en effet convenu de « réactiver le groupe technique bilatéral de suivi de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 en vue de l’élaboration, le moment venu, d’un quatrième avenant ». Depuis, Algériens et Français n’ont pas avancé sur le dossier et encore moins fixé un agenda de travail.
(Avec l’AFP)
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