Au dernier jour de la COP28, le bras de fer sur les énergies fossiles se durcit
Petits contre grands, fossiles contre renouvelables : les points d’achoppement traditionnels risquent de faire de Dubaï un énième sommet pour le climat sans avancée majeure.
La centaine de pays en faveur d’une sortie des énergies fossiles, dont ceux de l’Union européenne et de nombreux pays insulaires, négocient à Dubaï, au dernier jour de la COP28, pour arracher un accord face à l’opposition de l’Opep et de l’Arabie saoudite, mais rien n’indique que les Émirats trouveront un compromis.
Le dernier projet d’accord mis sur la table le 11 décembre par Sultan Al Jaber est jugé trop faible par l’Union européenne, les États-Unis, les petits États insulaires et de nombreux pays sud-américains pour répondre à la crise climatique. Ce document de 21 pages laisserait toute latitude aux pays signataires de l’accord de Paris pour choisir leur manière de « réduire » des énergies fossiles, sans obligation. Il ne fixe plus aucun objectif commun de « sortie » du pétrole, du gaz et du charbon, pourtant envisagé dans les versions antérieures.
Le texte est « inacceptable » et « bien en deçà de l’ambition nécessaire pour maintenir nos îles au-dessus de la surface des eaux », a dénoncé Joseph Sikulu, responsable pour le Pacifique de l’ONG 350.org. C’est « une insulte pour ceux d’entre nous qui sont venus ici pour se battre pour leur survie », selon le militant.
Espoir improbable
Les Européens se sont réunis le 12 décembre comme chaque matin pour se coordonner. Diplomates et ministres usés par les nuits sans sommeil cherchent à rendre le texte plus contraignant. Un nouveau projet d’accord est espéré dans la journée, selon des délégués. Mais l’espoir de faire adopter un texte historique appelant à la sortie du pétrole, du gaz et du charbon le jour du 8e anniversaire de l’accord de Paris semble désormais très improbable.
Une mauvaise nouvelle pour les négociateurs épuisés et pour les petites délégations, qui n’ont pas toujours les moyens de prolonger leur séjour. Il reste à tenter de trouver une formule susceptible de satisfaire des pays aux vues divergentes. Une minorité de pays producteurs d’hydrocarbures, emmenés par l’Arabie saoudite, s’oppose à toute formulation ciblant explicitement la principale source de leurs revenus.
Car dans les COP, les textes sont adoptés par « consensus », une notion différente de l’unanimité puisqu’il n’y pas de vote, juridiquement mal définie, mais qui peut théoriquement permettre à un seul État d’objecter. L’Union européenne juge le projet « insuffisant » et les États-Unis appellent à « substantiellement » le renforcer.
« Manque d’ambition »
ONG et experts dénoncent un projet en forme de « liste de courses » ou un « menu à la carte » mettant sur le même pied le développement du solaire de l’éolien, du nucléaire, de l’hydrogène ou celui des techniques de captage de carbone. Balbutiantes, ces dernières sont plébiscitées par l’industrie fossile et les pays producteurs, Arabie saoudite en tête, mais n’auront qu’un faible impact dans la décennie cruciale en cours.
« Je suis surpris par le manque d’ambition », confie encore un négociateur occidental. Mais une source à la présidence émiratie de la COP28 juge que cela fait partie du jeu des négociations : « C’est un mouvement d’ouverture », observe-t-elle, dans une comparaison au jeu d’échecs.
Les yeux sont tournés vers la Chine et les États-Unis, les deux premiers émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre (41 % à eux deux). L’émissaire chinois n’a rien dit publiquement. En novembre, les deux puissances s’étaient accordées pour éviter de parler de « sortie » des énergies fossiles mais soulignaient le rôle des énergies renouvelables pour s’y substituer progressivement.
Des progrès sur les objectifs énergétiques sont aussi suspendus aux avancées parallèles d’autres textes négociés, notamment sur l’adaptation aux conséquences du réchauffement climatique et sur l’aide financière aux pays développements, cruciaux pour convaincre le Sud d’accepter un accord.
(Avec AFP)
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