Élections en RDC : les Nations unies veillent

Dans moins de 24 heures, quelque 44 millions d’électeurs seront appelés aux urnes, en RD Congo. Deux représentants de l’ONU, présents sur place, expriment leurs espoirs et leurs inquiétudes.

Membres de la Monusco, à Sake, dans l’est de la RDC, le 6 novembre 2023. © Glody Murhabazi/AFP

Membres de la Monusco, à Sake, dans l’est de la RDC, le 6 novembre 2023. © Glody Murhabazi/AFP

Publié le 19 décembre 2023 Lecture : 4 minutes.

Les Congolais souhaitent que leur voix soit entendue et que les résultats des élections générales, et notamment de la présidentielle, soient le reflet de leur choix libre et démocratique. Dans les zones les plus reculées du pays, ils ont prouvé leur engagement citoyen en passant des journées entières dans les files d’attente, parfois sous un soleil ardent, pour s’inscrire sur les listes électorales.

L’émergence d’une société civile dynamique et la participation plus marquée des femmes (députées, sénatrices, ministres, gouverneures de province, administratrices de territoire, etc.) à la prise de décision sont salutaires et doivent être encouragées.

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Deux candidates

Que les élections soient financées par le gouvernement avec peu d’aide extérieure, est l’une des décisions louables prises par le gouvernement. Pour la première fois dans l’histoire de la RDC, aucune des 24 candidatures initiales, dont deux ont été présentées par des femmes, n’a été rejetée par la Cour constitutionnelle. C’est un signe tangible d’inclusion qu’il convient de saluer.

Cependant, selon la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), les préparatifs du scrutin ont beau avancer, d’importants problèmes logistiques, financiers et sécuritaires subsistent. La mauvaise qualité des cartes d’électeurs, la difficulté à obtenir des duplicatas, le manque de communication à propos des procédures d’identification de ceux dont les cartes sont défectueuses ou qui ne se retrouvent pas sur la liste électorale alimentent la méfiance.

Certaines missions nationales d’observation électorale ont, par ailleurs, exprimé des inquiétudes quant à leur accréditation. L’ONU a régulièrement appelé la Ceni à venir à bout  de ces préoccupations. Elle recommande également à la Cour constitutionnelle de gérer le contentieux électoral de manière transparente.

Les acteurs politiques sont invités à faire preuve de sens des responsabilités et à rejeter la violence, d’où qu’elle vienne, afin que le scrutin se déroule dans un climat apaisé, gage de la consolidation des institutions démocratiques et du développement socio-économique qu’attend le peuple congolais.

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Discours de haine et propos misogynes

Par ailleurs, les Nations unies restent préoccupées par l’escalade de la violence, par les actes de vandalisme et de destruction de matériels de campagne, par les discours de haine, les propos misogynes, la désinformation et la prolifération de fausses nouvelles à connotation tribaliste diffusées sur les réseaux sociaux.

Les acteurs politiques doivent faire preuve de sens de responsabilité et rejeter la violence, d’où qu’elle vienne, afin que le scrutin se déroule dans un climat apaisé, gage de la consolidation des institutions démocratiques et du développement socio-économique qu’attend le peuple congolais. Les Nations unies appellent donc les instances de régulation à renforcer leur surveillance, et la société civile congolaise à intensifier ses efforts de sensibilisation de la population. Au sein des Nations unies, des initiatives ont été prises en ce sens. La Monusco, le Pnud, l’Unesco et ONU Femmes ont favorisé la création d’espaces de discussion inclusifs et constructifs dans le cadre d’un projet de prévention de la violence électorale, que finance le Fonds de consolidation de la paix.

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À la demande de la Ceni, le système des Nations unies a apporté un soutien constant au processus électoral. Entre avril et mai 2023, la Monusco a transporté 128 tonnes de matériel destiné à l’enregistrement des électeurs dans l’Ituri, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, où la mission est déployée. Cet appui se poursuit : 127 tonnes de matériel y ont été acheminées récemment. Le 12 décembre,  la RDC a demandé au Conseil de sécurité d’élargir son soutien à d’autres provinces. La Monusco va ainsi apporter un soutien logistique limité à la Ceni dans des provinces où la mission n’est pas présente, sans que cela contrevienne à son mandat tel que le recommande le Conseil de sécurité.

Respect des droits humains

Il incombe en premier lieu aux autorités congolaises d’assurer la tenue pacifique, libre, inclusive et transparente du scrutin, dans des conditions de sécurité adéquates. Toutefois, afin de contribuer à un maintien de l’ordre optimal et à une gestion professionnelle des foules dans le strict respect des droits humains, la Police nationale congolaise (PNC) a bénéficié de l’aide de la Police des Nations unies (UNPOL) ainsi que du projet d’appui à la sécurisation des élections qu’anime le Pnud.

La crédibilité et le caractère inclusif du processus électoral dépendent du degré de respect des droits humains avant, pendant et après les élections. Or de graves violations et atteintes aux droits humains ont d’ores et déjà été établies. Les autorités judiciaires doivent diligenter des enquêtes et engager des poursuites contre les auteurs de ces actes.

Le Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’homme soutient les autorités congolaises dans la prévention des violations des droits de l’homme tout au long du processus électoral comme dans les réponses à apporter à ces actes. Les moyens d’action d’un millier de membres de la société civile ont été renforcés et des moyens supplémentaires leur ont été fournis pour assurer le suivi du respect de ces droits, y compris dans les zones reculées.

Un dialogue constructif et inclusif destiné à résoudre d’éventuels différends constitue l’un des axes majeurs d’un processus électoral réussi. Le Pnud a soutenu les cadres de concertation de la Ceni avec les partis et groupements politiques ainsi qu’avec la société civile. La Monusco est elle aussi engagée sur ce front, grâce aux bons offices de la Représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU et grâce à la mise en œuvre de plus d’une centaine d’activités visant à créer des espaces d’échanges constructifs et inclusifs destinés aux femmes, aux jeunes, aux populations locales et aux personnes handicapées.

Ce soutien est toutefois moins important que lors des élections précédentes, que l’ONU avait aidé à organiser dans tout le pays. Les institutions qui en seront issues devront relever des défis gigantesques, mais surmontables, liés à la sécurité et à la consolidation de la paix dans les zones affectées par les conflits, et œuvrer à l’amélioration des conditions de vie d’environ 100 millions de Congolais.

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