François Compaoré sauvé par les putschs burkinabè
Le jour du 25e anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo, la France a annulé le décret d’extradition du frère cadet de Blaise Compaoré vers le Burkina Faso.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 22 décembre 2023 Lecture : 2 minutes.
Au jeu du « les ennemis de mes ennemis sont mes amis », François Compaoré sort rassuré par l’issue du décret ministériel français de 2020 qui autorisait son extradition vers le Burkina Faso. Arrêté en octobre 2017 à l’aéroport de Roissy, en exécution d’un mandat d’arrêt international lancé par Ouagadougou, puis remis en liberté sous contrôle judiciaire, celui que l’on surnommait « le petit président » à l’époque où son frère Blaise était au pouvoir, est poursuivi par la justice burkinabè pour l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo, il y a tout juste vingt-cinq ans.
Au fil des années, le ressort principal de l’argumentaire des avocats de l’inculpé était le danger de politisation du procès burkinabè et d’éventuels « risques graves pour les droits fondamentaux » de leur client, l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme stipulant que « nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».
Après l’insurrection populaire qui chassa, en 2014, les Compaoré du pouvoir, les « ennemis » de la famille que constituèrent la transition d’alors puis le régime élu de Roch Marc Christian Kaboré avaient dû promettre qu’une éventuelle condamnation à mort ne serait pas mise à exécution. Les « ennemis des ennemis », les militaires de la junte de Paul-Henri Sandaogo Damiba, témoigneront, eux, d’une bienveillance certaine à l’égard des Compaoré, recevant, en grandes pompes, un Blaise pourtant condamné à perpétuité, entre temps, pour l’assassinat de Thomas Sankara. Enfin débarqueront les « ennemis des ennemis des ennemis », Ibrahim Traoré et les autres putschistes, ceux de septembre 2022…
Une annulation rare
S’ils n’ont pas témoigné un intérêt particulier pour la tenue du procès de l’affaire Norbert Zongo et s’ils se construisent plutôt une réputation de régime hostile à une liberté de presse débridée, les tenants actuels du pouvoir distillent des méthodes aux allures plutôt autoritaires.
Un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) du 7 eptembre 2023 ayant conclu à la violation de l’article 3 de la Convention européenne et les relations entre la France et le Burkina s’étant significativement dégradées depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré, la Première ministre française Élisabeth Borne ne s’est pas fait prier pour abroger le décret d’extradition de François Compaoré.
Une telle annulation est tout de même rare. De même, la date de l’abrogation est symbolique, le 13 décembre marquant l’anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo et de trois hommes qui l’accompagnaient, en ce jour de 1998.
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