Tunisie : levée du couvre-feu et fermeté inédite face aux extrémistes

Le gouvernement tunisien a levé vendredi soir le couvre-feu instauré mardi dans huit régions et fait preuve d’une fermeté inédite en interdisant toute manifestation islamiste et en bannissant un imam de Tunis qui avait appelé au meurtre d’artistes.  

Des policiers tunisiens le 15 juin 2012 à Tunis. © AFP

Des policiers tunisiens le 15 juin 2012 à Tunis. © AFP

Publié le 16 juin 2012 Lecture : 3 minutes.

« A la suite de l’amélioration de la situation sécuritaire et compte tenu des intérêts des citoyens, les ministères de la Défense et de l’Intérieur ont décidé de mettre fin au couvre-feu dans le Grand Tunis (quatre gouvernorats), ainsi que dans les gouvernorats de Sousse (est), Jendouba (nord-ouest), Monastir (est) et la délégation de Ben Gardane dans le gouvernorat de Medenine (sud), à partir de vendredi 15 juin », indique le communiqué officiel.

Les autorités « appellent les citoyens à se conformer aux ordres des patrouilles chargées des fouilles des véhicules et d’éviter tout rassemblement et mouvement à même de troubler l’ordre public », poursuit le texte.

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Le couvre-feu nocturne avait été imposé mardi de 21H00 à 05H00, heure locale (puis allégé mercredi de deux heures) après des émeutes dans plusieurs villes du pays qui se sont soldées par la mort d’un jeune homme et plus d’une centaine de blessés.

Plusieurs localités, dont la capitale, ont été le théâtre lundi et mardi d’attaques de postes de police, de sièges syndicaux et de partis politiques, et d’un tribunal par des groupes mêlant membres de la mouvance salafiste et casseurs.

Les violences avaient débuté quelques heures après le saccage par des salafistes présumés d’une exposition à La Marsa (banlieue nord aisée de Tunis) dont plusieurs oeuvres ont été jugées offensantes pour l’islam.

Interdiction des marches

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Après des appels à manifester pour défendre les « valeurs du sacré » par des groupes salafistes comme par les islamistes du parti au pouvoir Ennahda, le gouvernement avait annoncé jeudi l’interdiction de toute marche ce vendredi, redoutant de nouvelles violences à l’issue de la grande prière de la mi-journée.

Dans la foulée de cette interdiction, Ennahda comme Ansar Al Charia, la plus importante branche de la mouvance salafiste tunisienne, avaient renoncé à leur manifestation, affirmant se conformer à la décision des autorités.

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De très importants renforts policiers avaient été déployés sur l’avenue Bourguiba, la grande artère du centre ville de Tunis, et dans les rues alentour où un dispositif de contrôle de la circulation serré empêchait tout mouvement de foule.

Un blindé de la garde nationale circulait dans le centre, aux alentours de la mosquée Al Fath.

Dans cette mosquée, d’où partent généralement les manifestations salafistes dans la capitale, le prêche a été l’occasion d’un appel au calme, ont constaté des journalistes de l’AFP, qui n’ont vu aucun salafiste (barbe longue et tunique) sur place.

« Nous sommes tous frères, nous sommes tous musulmans », a lancé le ministre des Affaires religieuses, Nouredine Khadmi, un ancien iman venu prêcher à Al Fath. Il a appelé à l’« unité du peuple tunisien » et mis en garde contre « la sédition ». Même son de cloche dans une mosquée proche de la Kasbah, siège du gouvernement.

Sanctions inédites

En revanche, à la mosquée Zitouna, la plus ancienne et la plus vaste de Tunis, l’imam Houcine Laâbidi « a appelé au meurtre » des artistes qualifiés de « blasphémateurs » et de « mécréants ».

Quelques heures plus tard, le ministère des Affaires religieuses annonçait des sanctions inédites : « Il a appelé au meurtre, c’est irresponsable. Il ne prêchera plus jamais à la mosquée Zitouna », a déclaré à l’AFP Ali Lafi, conseiller politique du ministre des Affaires religieuses, précisant que c’était la première fois que les autorités prenaient une telle mesure depuis la révolution.

« Il est sorti de son rôle et a dit beaucoup de choses contradictoires avec le sentiment des Tunisiens. La loi doit être appliquée », a ajouté M. Lafi.

Aucun incident grave n’a été signalé dans la journée, même si l’inquiétude restait palpable dans les rues de la capitale, où plusieurs habitants ont fait part à l’AFP de leur « peur de nouveaux débordements » alors que démarre la saison touristique.

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