Mali : les rebelles touaregs dans Gao, la junte plus que jamais menacée
Des rebelles touareg sont entrés samedi dans la ville de Gao, dernière place-forte du nord du Mali des troupes d’une junte désormais prise en tenaille par la rébellion au nord et les menaces d’embargo, voire d’intervention, des pays voisins qui exigent un retour à l’ordre constitutionnel.
La Cédéao (15 pays membres) a d’ailleurs annoncé samedi avoir mis en alerte une force armée de 2.000 hommes, après la prise la veille par les rebelles touareg de la ville de Kidal.
A un millier de km au nord-est de Bamako, Gao est la principale ville du nord et surtout abrite l’état-major de l’armée malienne pour toute la région septentrionale.
Selon un conseiller du gouverneur de Gao, Mahamane Diakité, des tirs d’armes lourdes ont éclaté dans la matinée dans la ville, où des rebelles ont pénétré malgré l’intervention d’hélicoptères de l’armée.
Des combats se déroulaient en milieu de journée pour le contrôle de deux camps militaires, selon des sources concordantes.
Coup dur
Après la chute de Kidal, l’attaque sur Gao est un coup d’autant plus dur pour la junte qu’elle avait justement invoqué l’échec du régime à mater la rébellion pour renverser le 22 mars le président Amadou Toumani Touré (dit ATT).
Kidal, à environ 300 km plus au nord-est vers la frontière algérienne, avait été prise vendredi par le groupe armé islamiste Ansar Dine, appuyé par le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), le grand groupe rebelle touareg, et des éléments d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
La ville est tombée en un peu moins de 48 heures. Aucun bilan des pertes n’a été donné mais le gouverneur et au moins six autres officiels, civils et militaires, ont été capturés.
Commandées par le colonel Aladji Gamou, lui-même touareg, les forces gouvernementales s’étaient repliées vers Gao.
Après l’évacuation par l’armée de Kidal, mais aussi de Ansogo et Bourem, c’est désormais l’essentiel du nord-est du pays qui est aux mains des rebelles touareg et de groupes islamistes qui mènent depuis la mi-janvier une vaste offensive pour "libérer" les territoires de l’Azawad, berceau des Touareg.
Seules les garnisons de Gao et Tombouctou restent encore sous contrôle gouvernemental.
A un millier de km, Bamako semble encore hors de portée des rebelles, mais la prise de Kidal et les menaces sur Gao sont des coups très durs pour le Conseil national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE).
Acculée face aux rebelles, totalement isolée sur la scène internationale, la junte, par la voix de son chef, le capitaine Amadou Sanogo, avait déjà jugé vendredi la "situation critique".
"Eviter la guerre"
Après l’échec jeudi d’une mission à Bamako de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), annulée in-extremis pour cause d’une très inopportune manifestation pro-putschiste à l’aéroport, les chefs d’Etat ouest-africains ont mis une force en état d’alerte et menacé la junte d’un embargo "diplomatique et financier" faute d’un retour à l’ordre constitutionnel d’ici lundi.
"Notre souhait est d’éviter la guerre. Si la légitimité est rétablie et que ces mouvements armés s’aperçoivent qu’il y a une mobilisation régionale et internationale, ils quitteront Kidal tout de suite", a déclaré samedi le président en exercice de l’organisation, le chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara.
Après un rendez-vous raté jeudi avec des émissaires de la Cédéao à Bamako, trois représentants de la junte sont arrivés samedi à Ouagadougou pour rencontrer le président burkinabè Blaise Compaoré, médiateur de la Cédéao dans la crise.
Cette visite, dit une source proche de la junte à Bamako, vise notamment à expliquer à la Cédéao "que l’heure n’est pas au durcissement", .
A Bamako, la nouvelle de l’avancée des rebelles jusqu’à Gao n’avait pas encore suscité de mouvement de panique ou de soudaine manifestation de patriotisme samedi matin.
Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées au stade du 26 mars, au sud de la ville, pour un meeting au cours duquel les partisans du CNRDRE ont dénoncé la corruption du régime ATT et les menaces des pays de la région.
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