Macky Sall statufié sous lui-même

Ces derniers mois, plusieurs lieux au Sénégal ont été rebaptisés du nom du président de la République, qui quittera le pouvoir en avril.

 © Damien Glez

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Publié le 12 janvier 2024 Lecture : 2 minutes.

Si le chef de l’État sénégalais a annoncé, le 3 juillet dernier, qu’il quittait le pouvoir, il semble tenir à ce qu’on ne l’oublie pas. Et plutôt que de compter sur ses successeurs pour graver son nom aux frontons sénégalais, ses aficionados déroulent baptêmes dédiés et « rebaptêmes » au pays de la Teranga. Charité bien ordonnée commence par soi-même.

« Avenue Macky Sall »

En juillet, dans un contexte sous-régional d’effacement des symboles de la colonisation, le maire de la commune d’arrondissement de Dakar-Plateau, Alioune Ndoye, également ministre de l’Environnement, entérinait le changement de nom de l’avenue Faidherbe en « avenue Macky Sall », du nom de celui que les autorités locales qualifient d’« illustre homme d’État, leader et bâtisseur hors pair ».

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En octobre, non sans débat au sein du Conseil municipal de Saint-Louis, le maire Mansour Faye annonçait officiellement que l’avenue Charles-de-Gaulle porterait désormais le patronyme du président de la République du Sénégal.

Site historique

Ce 9 janvier, par arrêté, le ministre de la Culture et du Patrimoine historique révélait que l’école élémentaire Tafsir Aliou Mor Boye de Foundiougne sera carrément classée site historique. Selon une déclaration d’Aliou Sow à l’ouverture du Salon national du livre de Fatick, le « brillant chef d’État et travailleur » apprit « à lire et à compter » à l’école des garçons devenue école Tafsir Aliou Mor Boye. La rencontre littéraire a d’ailleurs choisi pour thème « la culture sous le magistère du président Macky Sall ».

Si le centre hospitalier régional de Fatick vient également d’être baptisé « Sall », c’est du nom de la première dame du Sénégal, Adja Marième Faye Sall, marraine de l’hôpital et créatrice de la fondation Servir le Sénégal. La cérémonie de dénomination a été présidée ce lundi par… son époux, le président de la République.

Jamais mieux servi que par soi-même

En Afrique, depuis quelques années déjà, la tendance est à ne plus laisser faire la patine de l’histoire. Non seulement les apprentis « baptiseurs » n’attendent plus qu’un hommage soit posthume, comme ce fut souvent le cas, mais nombre de présidents ont vu leur nom gravé dans la pierre, avant même l’inventaire de leur mandat ultime. Le toujours chef de l’État ivoirien peut circuler sur le pont à haubans Alassane-Ouattara d’Abidjan, tout comme le tombeur de Thomas Sankara pouvait déambuler dans les couloirs du centre hospitalo-universitaire Blaise-Compaoré, avant sa chute et… le changement dudit hôpital en CHU de Tengandogo.

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Pour le journal sénégalais Yoor-Yoor, les baptêmes à tour de bras, en cette fin de mandat de Macky Sall, relèvent de « pulsions mégalomaniaques ». Ce 11 janvier, le quotidien d’information titrait, à sa une : « La machine de propagande étatique en plein régime ».

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