Il y a deux lectures possibles du palmarès de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) et de la liste – restreinte – des sélections qui ont réussi à conserver leur titre. La première est teintée d’un optimisme raisonnable. L’Égypte (en 1959, 2008 et 2010), le Ghana (1965) et le Cameroun (2002) ont prouvé, dans un passé finalement assez récent, que cela n’avait rien d’impossible. La seconde est beaucoup plus nuancée si l’on considère que seulement trois équipes, dont l’Égypte, y sont parvenues, ce qui est tout de même très peu pour trente-trois éditions.

Les Sénégalais ne peuvent évidemment pas ignorer cette réalité statistique, et elle leur donne une idée assez précise de ce qui les attend en Côte d’Ivoire. Ils savent très bien, sans qu’il soit nécessaire de leur rappeler, qu’ils comptent parmi favoris de cette CAN présentée comme la plus relevée de l’histoire, avec la participation de la Côte d’Ivoire, du Maroc, de l’Égypte ou encore de l’Algérie. Mais une des principales questions est de savoir si le Sénégal de 2024 est plus fort que celui de 2022.

Pour Sérigné Saliou Dia, le sélectionneur des moins de 17 ans champions d’Afrique en 2023, la réponse est affirmative. « Pour moi, les Lions sont meilleurs qu’il y a deux ans. Tout simplement parce que l’ossature est la même et que les joueurs ont encore plus d’expérience, certains ont disputé la Coupe du monde au Qatar », explique le technicien. Depuis le sacre de Yaoundé, les Sénégalais ont en effet donné très peu de signes de faiblesse.

En 2023, le Sénégal a battu le Brésil et le Cameroun

Ils ont ainsi atteint les 16^e de finale de la Coupe du monde (0-3 face à l’Angleterre), se sont qualifiés facilement pour la CAN ivoirienne dans un groupe il est vrai plutôt abordable (Mozambique, Rwanda, Bénin), ont battu le Cameroun (1-0) et surtout le Brésil (4-2) en matchs amicaux en 2023 et n’ont connu qu’un seul véritable accroc en s’inclinant à Dakar face à l’Algérie (0-1) au moins de septembre dernier.

Gernot Rohr, le sélectionneur franco-allemand du Bénin, partage l’avis de Sérigné Saliou Dia quant au niveau des Lions. « J’ai été nommé début 2023 et, en juin, nous avons affronté le Sénégal à Cotonou en éliminatoires la CAN. Et bien qu’il était déjà qualifié avant ce match, j’ai vu une équipe totalement concentrée, avec un vrai esprit de compétition. Les meilleurs étaient là et, même si la rencontre n’avait pas un énorme enjeu, il était clair que le Sénégal était venu pour gagner. » Les Béninois avaient réussi ce jour-là à faire match nul avec le champion d’Afrique en titre (1-1).

Stabilité technique et effectif de haut niveau

Le Sénégal est aujourd’hui la deuxième meilleure équipe africaine au classement Fifa derrière le Maroc, et les raisons qui expliquent cette présence au sommet de la hiérarchie continentale depuis des années sont nombreuses. Il y a d’abord l’exceptionnelle stabilité technique d’Aliou Cissé, nommé en février 2015 et qui est un des plus anciens sélectionneurs en poste au monde.

« Aliou Cissé fait du très bon travail, il a mis en place ses idées et on lui a laissé le temps pour le faire. Il a atteint ses objectifs, notamment en gagnant la CAN en 2022, et bénéficie d’un effectif qu’il connaît parfaitement », reprend Sérigné Saliou Dia. Ces derniers mois, Cissé a en effet appelé de nouveau joueurs, tels Pape Matar Sarr, Lamine Camara, Nicolas Jackson ou Abdallah Sima, tout en conservant son noyau dur, constitué de Sadio Mané, Kalidou Koulibaly, Édouard Mendy, Idrissa Gana Gueye ou encore Cheikhou Kouyaté.

Aliou Cissé, à qui Augustin Senghor, le président de la fédération, fiche une paix royale tout en lui fournissant les moyens de travailler dans la sérénité, dispose d’un effectif de haut niveau, un autre argument expliquant les résultats des Lions.

« C’est une équipe qui est équilibrée et forte dans toutes ses lignes. De plus, le Sénégal a de jeunes joueurs à gros potentiel qui arrivent ou qui sont déjà en sélection. Cela veut donc dire que l’avenir a été préparé, quand Mané, Koulibaly et d’autres prendront leur retraite internationale », apprécie Gernot Rohr. « Bien sûr, le Sénégal n’est pas infaillible, il peut commettre des erreurs, être bousculé, mais c’est très solide », conclut le sélectionneur du Bénin.

Le Sénégal devra être très tôt à son meilleur niveau, puisqu’il affrontera le Cameroun, la Guinée et la Gambie dans un groupe C considéré comme le plus relevé du 1er tour.