Sénégal : maintien d’une manifestation interdite à Dakar après des violences
L’opposition sénégalaise a décidé de maintenir samedi à Dakar une nouvelle manifestation interdite contre le président Abdoulaye Wade au lendemain de violences dans la capitale qui, pour la première fois, ont touché une mosquée de l’influente confrérie musulmane tidiane.
L’opposition sénégalaise a décidé de maintenir samedi à Dakar une nouvelle manifestation interdite contre le président Abdoulaye Wade au lendemain de violences dans la capitale qui, pour la première fois, ont touché une mosquée de l’influente confrérie musulmane tidiane. C’est dans ce climat de vive tension que quelque 23.000 militaires et paramilitaires ont commencé à voter, jusqu’à dimanche, à l’élection présidentielle à laquelle les autres Sénégalais prendront part le 26 février.
"Nous maintenons notre appel à manifester à 15H00 (locales et GMT) sur la Place de l’Indépendance", a déclaré à l’AFP Abdoul Aziz Diop, un des responsables du Mouvement du 23 juin (M23, coalition de partis d’opposition et d’organisations de la société civile). "Nous réitérons le caractère pacifique du M23, mais tant que les manifestations seront interdites, il faut s’attendre à des affrontements", a-t-il ajouté.
Le M23 avait appelé vendredi à une manifestation sur cette même place située dans le centre-ville, près du Palais présidentiel, pour exiger le retrait de la candidature à ce scrutin du chef de l’Etat sortant Abdoulaye Wade, 85 ans et au pouvoir depuis douze ans. La tentative des manifestants, dont de nombreux jeunes, d’accéder à la place bouclée par d’imposantes forces de sécurité, a dégénéré en violences avec les policiers, donnant lieu à des scènes de guérilla urbaine.
Un tir à balle réelle
Gaz lacrymogènes, balles en caoutchouc et canons à eau des policiers – un a tiré à balle réelle – ont répondu pendant plusieurs heures aux volées de pierres et projectiles divers de centaines de jeunes, qui ont également mis le feu à des barricades de fortune dans de nombreuses rues et avenues du centre-ville.
Ces violences ont été exacerbées par le geste d’un officier de police qui a lancé des grenades lacrymogènes à l’intérieur de la Zawiya (mosquée) El Hadj Malick Sy, de la confrérie des Tidianes, située dans l’une de ces avenues. Plusieurs centaines de fidèles ont aussitôt organisé un sit-in devant la mosquée, plus tard dispersé sans ménagement par la police.
Bilan de ces violences, une dizaine de blessés dont un policier, selon un décompte de l’AFP, et des actions de vengeance à Tivaouane, une des villes saintes des Tidianes, située à moins de cent kilomètres au nord-est de Dakar, où la mairie a été saccagée et incendiée.
Le député-maire de Tivaouane, El-Hadj Malick Diop, de la mouvance présidentielle, a déploré les incidents à la mosquée de Dakar. Il a accusé "des jeunes, certainement manipulés par des politiciens en perte de vitesse", d’être à l’origine des violences contre la mairie avant, selon lui, d’aller s’en prendre à des biens appartenant à des responsables du parti au pouvoir.
Pays à 95 % musulman
Un leader des Tidianes, Serigne Mansour Jamil, membre du M23, a accusé le gouvernement d’avoir "profané une des principales mosquées tidianes" et, à travers elle, "toute une communauté", estimant que le président Wade devait "dégager". C’est la première fois qu’une mosquée est prise à partie par des policiers pendant les manifestations anti-Wade qui se sont intensifiées depuis la validation, fin janvier, par le Conseil constitutionnel de la candidature du chef de l’Etat au scrutin du 26 février dans ce pays à 95% musulman.
La dispersion, jeudi, d’un rassemblement prévu par le mouvement de jeunes Y’en a marre et interdit par les autorités, avait également été marquée par des violences, ainsi que l’arrestation de plusieurs membres du collectif, dont deux de ses leaders rappeurs, Kilifeu et Simon. Depuis, "ils sont une bonne vingtaine" à être retenus par la police, a déclaré samedi à l’AFP un autre responsable du mouvement, Fadel Barro.
Dans un communiqué, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et trois ONG sénégalaises ont déploré les violences, en dénonçant des "dizaines d’arrestations" depuis trois jours. Elles ont exhorté les autorités "à cesser immédiatement la répression en cours" contre les manifestations.
M. Wade brigue un troisième mandat à la présidentielle face à 13 candidats d’opposition. Le M23 estime qu’il a épuisé ses deux mandats légaux et juge illégale sa nouvelle candidature, ce que contestent ses partisans qui soulignent que des réformes de la Constitution lui donnent le droit de se représenter. Un candidat de l’opposition, l’ex-Premier ministre Macky Sall, en tournée électorale en Casamance (sud), a par ailleurs réclamé vendredi la libération de militaires otages de rebelles dans cette région en proie depuis près de 30 ans à un conflit indépendantiste armé.
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