Darmanin-Benzema : 1 partout
Accusé de « lien notoire avec les Frères musulmans » par le ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, le Ballon d’or 2022 a entamé une procédure pour diffamation.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 18 janvier 2024 Lecture : 2 minutes.
Il y a des réponses du berger à la bergère qui adoptent un train de sénateur, qui sied au rythme de la justice française. Il a ainsi fallu un trimestre pour que le footballeur Karim Benzema réponde formellement à des accusations du ministre français de l’Intérieur et des Outre-mer. Le 16 octobre dernier, sur un plateau de la chaîne de télévision CNews, Gérald Darmanin lançait que « Karim Benzema est en lien, on le sait tous, notoire avec les Frères musulmans« . Une affirmation dont la gravité tranchait – une dizaine de jours après l’attaque d’Israël par le frériste Hamas – avec la justification floue de « notoriété »…
Volonté de mûrir la qualification de l’accusation – en « diffamation » ou « injure publique » – ou choix d’un timing stratégique, au moment où il est « notoire » que le premier flic de France est frustré d’avoir été coiffé au poteau de la primature par son « petit frère » Gabriel Attal ? C’est mi-janvier que l’attaquant français de 36 ans a décidé de porter le bras de fer sur le terrain judiciaire.
92 pages et quelques arguments
C’est l’avocat de Karim Benzema, Maître Hugues Vigier, qui s’est chargé de dévoiler le dépôt d’une plainte contre Gérald Darmanin. Plainte pour diffamation devant la Cour de justice de la République. La CJR est la juridiction française qui permet de juger les crimes ou délits commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions.
Sur le plan de la forme, il est question d’une « plainte de 92 pages, dont 80 d’annexes ». La diffamation publique envers une personne privée ou un groupe de personnes privées est punissable d’une amende de 12 000 euros (environ 8 millions de francs CFA).
Sur le plan de l’argumentation, le conseil de l’international tricolore explique que son client « n’a jamais eu la moindre relation » avec l’organisation islamique sunnite fondée en Égypte en 1928. À ceux qui voient d’un mauvais œil l’enthousiasme du footballeur à l’égard de la monarchie dynastique islamique où il évolue – sous contrat au Al-Ittihad Club –, il rappelle que l’Arabie saoudite classe les Frères musulmans parmi les organisations terroristes, « ce que n’a jamais fait la France »…
Instrumentalisation politicienne ?
Depuis quelques mois, les politiciens de plusieurs formations politiques françaises de droite s’en prennent au joueur de football, qui pour le port ostentatoire de la tenue traditionnelle saoudienne, qui pour des posts jugés « sélectifs », notamment à propos de l’actualité proche-orientale.
Maître Vigier lit dans les attaques politiques un « pur opportunisme » qui jette « en pâture, à l’opprobre général, des gens, juste pour faire un coup de communication fausse. Avec des conséquences familiales […] qui sont considérables ». Une instrumentalisation qui « sème la division en France ».
En attendant l’issue de la procédure judiciaire, Gérald Darmanin ne verra pas son maroquin menacé. Son collègue de la Justice vient d’être jugé, en fonction, pour prise illégale d’intérêts, tandis que celle de la Culture vient d’être nommée, alors qu’elle est mise en examen pour corruption passive.
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