Égypte : la violence de retour dans le centre du Caire
Au milieu des gaz lacrymogènes, les yeux rouges et le nez couvert par un masque, ils brandissent le poing contre les policiers positionnés à quelques mètres de là. Vendredi, les violences ont repris au Caire entre manifestants et forces de l’ordre autour du ministère de l’Intérieur.
Les rues Mansour et Mohammed Mahmoud, tout près du ministère et à quelques encablures de la place Tahrir, se sont transformées en champ de bataille. Des centaines de pierres destinées à la police jonchent le sol, où des feux de camp ont été allumés.
Régulièrement, les policiers anti-émeutes ripostent aux slogans hostiles et aux assauts contre leur cordon. Les grenades de gaz lacrymogènes font une longue trajectoire enfumée avant de tomber au milieu des manifestants.
"Fils de p…!", hurlent ces derniers en courant se mettre à l’abri, tandis que certains s’emparent des grenades et les renvoient à leur expéditeur.
"Le peuple veut l’exécution du maréchal! A bas, à bas le pouvoir militaire!", scandent des centaines d’Egyptiens une fois la fumée un peu dissipée.
Deux manifestants sont morts asphyxiés par des gaz lacrymogènes vendredi au Caire, selon des sources médicales, et un soldat, blessé devant le ministère de l’Intérieur jeudi, a succombé vendredi à l’hôpital, a rapporté l’agence de presse officielle Mena.
Colère
Les protestataires ont gagné du terrain par rapport à la veille, après avoir ouvert une brèche dans les blocs de pierre qui divisaient la rue Mohammed Mahmoud depuis les derniers affrontements meurtriers en novembre.
La plupart sont jeunes, beaucoup sont mineurs. Les femmes sont présentes en nombre et comme jeudi, les manifestants expriment leur colère contre "l’inertie" des services de sécurité pendant le match de football qui a fait 74 morts mercredi soir à Port-Saïd, dans le nord du pays.
Ils réclament surtout que l’armée, qu’ils rendent responsable des violences, remette le pouvoir aux civils. Mais d’autres manifestants sont là pour se venger du ministère de l’Intérieur, symbole de répression.
"J’ai pris sept points de suture la dernière fois, je m’en fiche. Je veux vivre tranquille, j’en ai marre qu’on m’arrête dans la rue pour rien et qu’on m’humilie sans arrêt", dit un adolescent au crâne entouré d’un énorme pansement, qui veut en découdre avec les policiers anti-émeutes à peine plus âgés que lui, positionnés à quelques mètres.
Autour de lui, comme pendant la révolte qui a renversé Hosni Moubarak l’an dernier, on se protège avec les moyens du bord: foulards sur le nez, lait et vinaigre comme remède au gaz lacrymogène. Flairant l’aubaine, des hommes vendent des masques chirurgicaux pour une livre égyptienne (0,12 centimes d’euro).
Place Tahrir, le ballet des ambulances est incessant et leurs sirènes assourdissantes. Les blessés, asphyxiés par le gaz, parfois inconscients, sont amenés jusqu’aux véhicules en mobylette.
Mais il suffit de s’éloigner de quelques dizaines de mètres pour que la vie reprenne le pas sur les affrontements: sur la trajectoire des ambulances, des femmes vendent imperturbablement sandwiches, patates douces et colifichets, tandis que des badauds se promènent sur la place Tahrir en famille.
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