Humour, amour et violences policières

Avec son nouveau roman pour la jeunesse, Banale flambée dans ma cité, notre collaborateur Mabrouck Rachedi construit un polar dense, au-delà des clichés sur la banlieue parisienne.

L’auteur Mabrouck Rachedi. © Thomas Haley/Actes Sud

L’auteur Mabrouck Rachedi. © Thomas Haley/Actes Sud

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 27 janvier 2024 Lecture : 2 minutes.

Drogue, violences policières, racisme : pour son nouveau roman jeunesse, notre collaborateur Mabrouck Rachedi n’a pas choisi des sujets faciles. Mais pour écrire Banale flambée dans ma cité, il ne s’est pas laissé aller à la facilité des révoltes balisées et des caricatures habituelles.

Bon connaisseur des banlieues de la région parisienne où il rencontre régulièrement des élèves au cours d’interventions scolaires et d’ateliers d’écriture, l’auteur du Petit Malik nous entraîne cette fois dans la vie de Mabataï, gamin lunaire pour les uns, idiot du village pour les autres. Sa mère a tenu à lui donner ce nom étrange, faisant croire aux officiers de l’état civil qu’il s’agissait d’un patronyme importé d’Afrique de l’Est. En réalité, en cours d’accouchement, elle se donnait du courage en répétant en boucle le refrain d’une chanson de Daniel Balavoine, « Mon fils Ma bataille ». L’humour décalé de Mabrouck Rachedi, qu’il distille à petites touches, ne l’empêche pas de construire une intrigue crédible dans le contexte social tendu des cités françaises.

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Suspense

D’origine africaine, Mabataï est, depuis peu, orphelin de mère et ses relations avec son père sont, disons, compliquées. Ce d’autant que ledit père vient de se remettre en couple avec une flic, Magali, alors même qu’une bavure policière exacerbe les tensions sociales dans le quartier – au grand dam de Kam, le dealer du coin, dont les affaires peuvent être menacées par un trop-plein d’attention médiatique.

C’est dans ce contexte que Mabataï, passionné de course à pied et compositeur à ses heures, assiste à une scène à laquelle il ne devrait pas assister, après avoir récupéré un paquet qu’il n’aurait pas dû récupérer. On n’en divulgâchera pas plus, mais Mabrouck Rachedi, tout en naviguant entre les clichés, maintient le suspense jusqu’aux dernières pages. Surtout, il prend le temps de créer des personnages qui échappent aux carcans dans lesquels sont trop souvent enfermés ceux qui vivent au jour le jour le quotidien des cités difficiles.

L’art du contre-pied

Le flic auteur de la bavure est-il vraiment celui qui a appuyé sur la gâchette ? La sœur de la victime, devenue pasionaria de la lutte contre les violences policières, est-elle vraiment aveugle aux souffrances des familles de policiers ? Le véritable méchant est-il le dealer qui règne sur la cité ? Les réponses sont dans le roman, mais si l’on peut avancer une chose, c’est bien qu’en bon amateur de tennis, Mabrouck Rachedi possède l’art du contre-pied.

On pense évidemment souvent à Alhoussein Camara, Nahel Merzouk, Zyed Benna, Bouna Traoré et bien d’autres, mais Banale flambée dans ma cité est un roman qui tient les promesses de son titre, entre le jeu de mots sous forme de punchline et la référence à La prochaine fois, le feu de James Baldwin, entre l’humour qui tient en vie et la vie qui ne tient, parfois, plus qu’à un fil.

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Banale flambée dans ma cité, de Mabrouck Rachedi, 226 pages, 15,90 euros

 © Editions Actes Sud

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