Accord Royaume-Uni – Rwanda : le chemin de croix de Sunak
Contre vents et marées, le gouvernement britannique maintient son projet de sous-traiter au Rwanda la gestion des demandeurs d’asile présents sur son territoire. Et il a fini par obtenir l’aval de la Chambre des communes le 17 janvier.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 26 janvier 2024 Lecture : 2 minutes.
Depuis l’idée du Premier ministre Boris Johnson de délocaliser le système britannique de demande d’asile au Rwanda, afin de décourager l’afflux de migrants sur de petites embarcations à travers la Manche, le gouvernement britannique, aujourd’hui dirigé par Rishi Sunak, expérimente lui-même une traversée tumultueuse. De toutes parts sont apparues des critiques sur l’efficacité globale du concept et sa validité éthique.
Alors que de nombreuses organisations de défense des droits humains dénoncent l’accord bilatéral entre Londres et Kigali, l’agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR) ne l’estime « pas compatible » avec le droit international. Côté opposition, Alison Thewliss, la députée de la circonscription de Glasgow Central, qualifie le texte d’« irrémédiablement horrible ». La situation n’est guère plus apaisée du côté d’une majorité conservatrice fracturée. Les modérés craignent que le projet soit trop liberticide, tandis qu’une bonne partie des ailes libérale et autoritaire du parti pensent qu’il doit être durci.
240 millions de livres sterling
La Cour suprême britannique n’est guère plus conciliante avec le texte, qu’elle a jugé illégal, le 15 novembre dernier, notamment en raison du déficit d’information concernant le niveau de sécurité garanti au Rwanda. La justice européenne, elle, a déjà bloqué in extremis un premier avion. Ces dernières semaines, Rishi Sunak a dû revoir sa copie, affiner le traité et entamer d’interminables tractations à huis clos, alors même que deux vice-présidents du Parti conservateur démissionnaient, partisans d’une ligne plus dure.
Sachant que ce projet importe beaucoup au Premier ministre, qui aborde mal la période électorale à venir, il a tout de même réussi à faire approuver le texte, le 17 janvier, en troisième lecture, à la Chambre des communes, par 320 votes « pour », contre 276 voix « contre ». Pour autant, le parcours du combattant de Rishi Sunak n’est pas encore terminé : le texte devra désormais être approuvé par les membres de la Chambre des Lords, susceptibles de l’amender.
Des critiques concernent également le coût de l’opération. En décembre, le gouvernement britannique annonçait avoir déjà versé à Kigali près de 240 millions de livres sterling [environ 280 millions d’euros]. Quelque 50 millions de livres devraient suivre en 2024. Et si aucun migrant n’était finalement expulsé au Rwanda ? « Nous pouvons renvoyer l’argent », a déjà indiqué, sur un ton difficile à décrypter, l’impénétrable Paul Kagame.
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