Arabie saoudite : de l’alcool pour les ambassadeurs
Riyad envisage l’ouverture d’un point de vente de boissons alcoolisées exclusivement réservées aux diplomates non musulmans.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 25 janvier 2024 Lecture : 2 minutes.
Nous sommes en 1952. Cyril Ousman, vice-consul de la Grande-Bretagne à Djeddah, organise une fête, à laquelle il convie le prince Mishari ben Abdulaziz al-Saoud, alors âgé de 19 ans. Le fils du roi Abdelaziz ibn Saoud – fondateur du troisième État saoudien – s’enivre à tel point que le diplomate finit par refuser de lui servir un verre de plus.
Prison, flagellation
Courroucé, Ousman abat le diplomate. Il est condamné à la prison à vie. Ce fait divers à forte dimension géopolitique conduit le monarque saoudien à interdire toute consommation d’alcool et toute possession de boissons alcoolisées dans son pays… Encore aujourd’hui, les étrangers contrevenants sont menacés d’expulsion, et les Saoudiens, eux, risquent une amende, une peine de prison et une flagellation en place publique.
Plus de soixante-dix ans après la tragédie, l’Arabie saoudite envisage une légère inflexion à cette politique de prohibition.
Un point de vente d’alcool devrait en effet bientôt ouvrir ses portes à Riyad. Seuls les diplomates (non musulmans) pourront s’y approvisionner. L’établissement devrait d’ailleurs être installé dans le quartier des ambassades.
Une « appli » alcoolisée
Pour obtenir leur « permis de boire », les candidats à l’ivresse utiliseront une application mobile. L’établissement fixera une limite aux quantités qu’il sera possible d’acheter.
Pour les spécialistes de l’Arabie saoudite, cette petite révolution s’inscrit dans le cadre, plus large, de l’assouplissement des réglementations sociales. Les ressortissants du royaume ont ainsi pu assister à des concerts ou à des projections de films dans des salles où la mixité était autorisée.
Sous l’impulsion du pourtant très controversé prince héritier Mohammed ben Salman, la monarchie absolue entend rayonner dans le monde moderne et globalisé, dans le sillage de ses voisins qatarien et émirati. Elle prévoit ainsi d’accueillir l’Exposition universelle en 2030 et la Coupe du monde de football en 2034.
Vers une fin de la prohibition ?
Chacun est bien conscient que l’ouverture d’un débit de boissons alcoolisées est une sorte de régularisation. En dépit de l’interdiction en vigueur, de l’alcool est consommé au sein de nombre de missions étrangères. Certains résidents s’approvisionnent au marché noir, quand ils ne produisent pas du vin à domicile. L’exception qui se dessine consiste donc à mettre fin à des pratiques incontrôlées.
Jusqu’où ira la levée des restrictions ? Pour l’heure, et afin de préserver les « valeurs islamiques » du royaume, les autorités saoudiennes excluent de modifier la réglementation générale.
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