En RDC, le cardinal Ambongo souhaite « une bonne disparition » à l’Occident
Contrarié par l’appel du Vatican à bénir les couples homosexuels, l’archevêque de Kinshasa fustige un Occident en « perte de vitesse ».
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 27 janvier 2024 Lecture : 2 minutes.
Le débat n’est pas nouveau, même si la fronde est plutôt inédite et le ton inhabituel. Le débat, c’est celui suscité par l’autorisation récente, par le Saint-Siège, des bénédictions de couples de même sexe. La fronde, c’est celle du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM), qui ne considère pas « approprié pour l’Afrique de bénir les unions homosexuelles ». Le ton, c’est celui du cardinal congolais Fridolin Ambongo, président du SCEAM, dans un enregistrement – clandestin mais authentifié – diffusé récemment.
S’adressant aux « Occidentaux », qu’il venait de tancer, l’archevêque de Kinshasa lance : « Nous leur souhaitons bonne disparition. » C’était lors d’un rassemblement du mouvement Famille chrétienne dans la capitale de la RDC, le 16 janvier dernier. Et le souhait a manifestement provoqué l’hilarité de l’auditoire du jour.
L’évocation de la disparition éventuelle de l’Occident a bien à voir avec les récentes positions du Vatican à l’égard des chrétiens gays. Selon le prêche d’Ambongo, les Occidentaux s’attaqueraient « à la cellule de base de l’humanité, qui est la famille », ce qui provoquerait la nécessité « d’aller chercher les gens à l’extérieur » pour faire « tourner leur économie ».
« Des cas isolés »
Cet ébranlement de l’architecture familiale (hétéronormée) s’expliquerait, selon le cardinal, par le fait que « l’Occident n’aime pas les enfants ». À terme, les pratiques sexuelles infécondes conduiraient à la disparition des populations occidentales, éventualité qui ne semble pas inquiéter l’homme de Dieu, qui évoque aussi une « perte de vitesse en termes de valeur » de l’Occident, une « décadence culturelle et morale d’une société » que décrit également un Vladimir Poutine, cité par le cardinal. Le prélat affirme tout de go que l’homosexualité « n’existe pas » en Afrique, hormis certains cas « isolés ».
La saillie pourrait être anodine si Fridolin Ambongo n’était pas influent à Rome. C’est le pape François qui l’a nommé au conseil des cardinaux chargés de la réforme de la Curie. De plus, le cardinal a beau jeu d’affirmer que « l’Afrique est l’avenir de l’Église – c’est une évidence ». Une évidence… évidente sur le plan démographique. « L’Église en Europe est en train de mourir », assénait d’ailleurs le Congolais il y a un an.
Pour jouer sa carte dans le bras de fer entre le Vatican et la frange subsaharienne de l’Église, Ambongo évite de mettre à l’index un pape dont il affirme qu’il a été « le premier à souffrir de toutes les réactions qui sont venues du monde entier ». Comme pour laisser à François une porte de sortie de nature à « rassurer » le continent sur la question des bénédictions de couples de même sexe, il souligne que le souverain pontife a eu connaissance des réticences des religieux africains exposés à des risques de « scandales », réticences contenues dans un document signé par le préfet du dicastère pour la doctrine de la foi, le cardinal Víctor Manuel Fernández.
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