Tunisie : adoption d’une Constitution provisoire avant l’élection d’un président
La Tunisie s’est dotée dimanche d’une « mini-Constitution » provisoire permettant de désigner les futurs président et chef de gouvernement qui dirigeront le pays jusqu’à la tenue d’élections générales et l’adoption d’une Loi fondamentale définitive par l’Assemblée constituante élue le 23 octobre.
La Tunisie s’est dotée dimanche d’une mini constitution provisoire permettant de désigner les futurs président et chef de gouvernement qui dirigeront le pays jusqu’à la tenue d’élections générales et l’adoption d’une constitution définitive par l’Assemblée constituante élue le 23 octobre.
Les 217 députés ont voté le texte de 26 articles qui régira les pouvoirs publics et permettra un démarrage des institutions de l’Etat, onze mois après la fuite en Arabie saoudite du président Zine El Abidine Ben Ali, chassé par un soulèvement populaire le 14 janvier. La constitution provisoire a été approuvée peu après minuit (23H00 GMT) par 141 voix pour, 37 contre à l’issue de débats marathon, souvent fastidieux et houleux entamés mardi.
Cet épisode du processus de transition est "instant historique" et "un départ de la Tunisie nouvelle", a lancé le président de l’assemblée Mustapha Ben Jaafar, alors que les élus entonnaient l’hymne national et que des députés de la majorité se congratulaient. M. Ben Jaafar a dit sa "fierté de diriger une Assemblée qui réunit les meilleurs enfants de la Tunisie grâce à la révolution de son vaillant peuple".
L’élection du président aura lieu lundi
Le texte définit les conditions et procédures d’excercice des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire jusqu’à la tenue d’élections générales et la promulgation d’une constitution définitive pour la Tunisie de l’après Ben Ali. Cette période transitoire devait durer un an en principe, mais aucun délai n’a pas été formellement énoncé dans le texte comme le souhaitait l’opposition. M. Ben Jaafar a annoncé que l’élection du président aura lieu lundi.
La présidence devrait revenir à Moncef Marzouki, chef du Congrès pour la République (CPR, 29 élus) qui désignera au poste de chef de gouvernement Hamadi Jebali, numéro deux du parti Islamiste Ennahda (98 élus). Il devra soumettra son équipe à l’approbation de l’assemblée dans les prochains jours. Ce scénario a fait l’objet d’un accord entre la coalition majoritaire entre Ennhada et deux partis de gauche, le CPR et Ettakatol (20 élus) de Mustapha Ben Jaafar.
Aux termes de la constitution provisoire, le président sera "exclusivement Tunisien, de religion musulmane, descendant de parents tunisiens et âgé de 35 ans minimum". Il est choisi au vote secret à la majorité absolue parmi des candidats qui doivent être parrainés chacun par quinze élus au moins.
L’"exercice de la démocratie"
Lors des débats souvent vifs et contradictoires, des élus avaient proposé en vain d’autoriser la candidature de binationaux et d’énoncer expressément le droit de chaque Tunisien "ou Tunisienne" d’être candidat à la présidence. La discussion des prérogatives du président a enflammé l’hémicycle. L’opposition a boycotté le vote, arguant que le futur président est dessaisi au profit du Premier ministre qui concentre trop de pouvoirs entre ses mains. Le président fixe avec le chef du gouvernement la politique étrangère du pays. Il est le chef suprême des forces armées mais ne nomme ou ne révoque les hauts officiers qu’"en concertation" avec le chef du gouvernement.
Une autre disposition controversée délègue "en cas de force majeure" les pouvoirs exécutif et législatif aux trois présidents (président de l’Assemblée, chefs de l’Etat et du gouvernement) et non plus au seul Premier ministre. Objet d’âpres négociations de l’opposition, la nomination du gouverneur de la Banque centrale a finalement été laissée au choix concerté des chefs de l’Etat, du gouvernement et de l’Assemblée. Le titulaire de ce poste allait être nommé par le chef du gouvernement, comme tous les autres hauts fonctionnaires. "La pleine indépendance" du pouvoir judiciaire a fait l’unanimité.
Malgré la longueur des débats, les séances, retransmises en direct à la télévision, ont suscité un engouement sans précédent des Tunisiens, des médias et réseaux sociaux, les uns s’emerveillant d’un "exercice de la démocratie", d’autres criant à la "tyrannie de la majorité".
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