Égypte : le nouveau Premier ministre espère avoir un gouvernement d’ici à mercredi

Le nouveau Premier ministre égyptien, Kamal el-Ganzouri, espère que le gouvernement qu’il est en train de former pourra être investi d’ici à mercredi, dans des déclarations rapportées par l’agence officielle Mena dans la nuit de samedi à dimanche.

Manifestation place Tahrir, le 2 décembre 2011 au Caire. © AFP

Manifestation place Tahrir, le 2 décembre 2011 au Caire. © AFP

Publié le 3 décembre 2011 Lecture : 4 minutes.

Mis à jour le 4 décembre à 11h04

M. Ganzouri "espère achever les consultations pour la composition du gouvernement dimanche" et il "exprime l’espoir que la prestation de serment aura lieu d’ici mercredi" devant le chef du Conseil militaire au pouvoir, le maréchal Hussein Tantaoui, écrit la Mena.

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La formation du gouvernement, attendue mercredi ou jeudi derniers, a été "retardée en raison de changements dans les nominations", selon l’agence.

M. Ganzouri, 78 ans, a déjà été de 1996 à 1999 Premier ministre sous Hosni Moubarak, chassé le 11 février par une révolte populaire. Il a été nommé le 25 novembre Premier ministre par l’armée au pouvoir pour remplacer Essam Charaf, qui avait démissionné à la suite des affrontements meurtriers qui ont opposé forces de l’ordre et manifestants en marge de rassemblements hostiles au pouvoir militaire.

"Jamais vu depuis les pharaons"

Des résultats partiels du premier tour des législatives égyptiennes continuaient d’arriver samedi au compte-gouttes, confirmant les bons scores des islamistes, notamment des fondamentalistes salafistes, desquels, les Frères musulmans ont pris soin de se démarquer.

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La commission électorale a annoncé vendredi soir un taux de participation de 62% "jamais vu depuis les pharaons", mais n’a une nouvelle fois pas été en mesure de donner les résultats complets par partis pour ce vote qui s’est déroulé lundi et mardi.

Les bribes de résultats rapportées par la presse et les différentes formations ont toutefois continué de confirmer les scores élevés des islamistes, qu’il s’agisse des Frères musulmans ou des salafistes (fondamentalistes) du parti Al-Nour.

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Les coalitions menées par les islamistes pourraient avoir au total entre 60 et 70% des voix selon certaines estimations.

Les résultats pour Port-Saïd, sur le canal de Suez, donnaient 32,5% pour les Frères musulmans, 20,7% pour les salafistes de Al-Nour et 12,9% pour une formation islamiste modérée, Wassat, selon le journal gouvernemental al-Ahram. Les libéraux du Wafd ne remportaient que 14%.

A Port-Saïd toujours, une figure historique de la contestation contre le régime de Hosni Moubarak, Georges Ishaq, fondateur du mouvement Kefaya (Assez !), était battu, selon la presse.

La commission électorale a assuré que les résultats officiels seraient postés sur internet "bientôt", sans plus de précisions sur les raisons de cette attente.

"Ne pas mettre tous les islamistes dans le même panier"

"Nous représentons un islam ‘centriste’ et modéré, nous n’imposons rien par la force", a déclaré Mahmoud Ghozlane, porte-parole des Frères musulmans, dont le parti Liberté et Justice (PLJ) est crédité d’environ 40% des voix sur la base de résultats provisoires.

Il a appelé "à ne pas mettre tous les islamistes dans le même panier", en référence aux salafistes du parti Al-Nour, qui, avec d’autres formations fondamentalistes, pourraient avoir entre 20 et 30% des voix.

Le calme dans lequel s’est déroulé le scrutin et la forte mobilisation des électeurs sont portés au crédit de l’armée au pouvoir, mais la perspective d’avoir face à elle un Parlement à forte majorité islamiste lui pose désormais un lourd défi.

Au Caire, un politicien libéral, Amr Hemzawi, a été élu dès le premier tour dans le quartier aisé d’Héliopolis, mais ailleurs les personnalités issues de la révolte populaire de janvier-février qui a chassé M. Moubarak étaient battues.

Dans le gouvernorat très touristique de la Mer Rouge, les Frères musulmans faisaient un score de 30%, deux fois supérieur à celui du Bloc égyptien, une alliance de partis libéraux.

Selon le quotidien indépendant al-Masri al-Youm, aucune femme n’a été élue au premier tour, qu’il s’agisse de candidature individuelle ou de liste.
Une candidate du Wafd, Nihal Aahdi, citée par le journal, a expliqué que cette situation était "liée au fait que les Frères musulmans et salafistes ont dominé les résultats".

Forts de leur percée dans les urnes, les salafistes multipliaient les déclarations favorables à l’instauration d’un islam conservateur.

Le dirigeant salafiste Abdel Monem Chahat a assuré que les romans de l’écrivain égyptien et prix Nobel de littérature Naguib Mahfouz "encourageaient le vice car ils portent sur la prostitution et la drogue".

Une autre personnalité de ce courant fondamentaliste sunnite, Hazem Abou Ismaïl, a estimé qu’il fallait "créer un climat pour faciliter" le port du voile, et que s’il est élu président, il "ne permettrait pas à un homme et à une femme de s’asseoir ensemble dans un lieu public".

Le Hamas palestinien, qui contrôle la bande de Gaza, s’est réjoui de cette percée des islamistes. "C’est un très bon résultat, cela signifie un soutien de plus en plus important aux questions palestiniennes", a dit son porte-parole.

Les révolutionnaires "trahis"

L’ambiance était morose samedi matin sur la place Tahrir au Caire, occupée depuis deux semaines par des militants qui veulent maintenir la flamme de la révolte du début de l’année.

"Tous ceux à qui nous avons fait confiance nous ont trahis", affirme Mohamed el-Assas, 25 ans, un des manifestants encore présents.

L’opposant Mohamed ElBaradei, ancien chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui était venu à Tahrir la semaine dernière, "a disparu", déplore-t-il, et les Frères musulmans "ne sont plus avec nous maintenant qu’ils ont gagné les élections".

Le vote concerne un tiers des gouvernorats égyptiens, dont ceux du Caire et d’Alexandrie, les deux plus grandes villes. Un second tour est prévu lundi et mardi prochains.

Les députés des autres gouvernorats seront élus d’ici au 11 janvier, puis viendra l’élection de la Choura (sénat), jusqu’au 11 mars.

Cette élection, la première depuis la chute de M. Moubarak le 11 février, est sensée donner un reflet du pays politique réel après des décennies de scrutins sans surprise au profit du parti au pouvoir.

Le taux de participation de 62% est exceptionnel en Egypte, où l’absention était sous l’ancien régime massive faute d’enjeu électoral.
 

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