Procès de Pascaline Bongo : le parquet requiert trois ans de prison, dont deux avec sursis

Au terme de son réquisitoire, le 1er février, le parquet national financier a demandé trois ans d’emprisonnement, dont un an ferme contre la sœur d’Ali Bongo Ondimba, l’ancien président du Gabon. Le verdict est attendu le 22 avril.

Pascaline Bongo à Paris, lors de son procès, en janvier 2024. © DR

Pascaline Bongo à Paris, lors de son procès, en janvier 2024. © DR

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Publié le 1 février 2024 Lecture : 3 minutes.

Au terme d’un réquisitoire d’une heure trente ce jeudi 1er février, le parquet national financier français a requis une peine de trois ans d’emprisonnement, dont deux ans avec sursis – soit un an ferme – à l’encontre de Pascaline Bongo Ondimba, fille et ancienne directrice de cabinet d’Omar Bongo Ondimba.

Aux yeux du procureur, l’accusée, dont le procès s’est ouvert le 29 janvier au tribunal de Paris, s’est rendue coupable de « corruption passive d’agent public étranger ». Le parquet a assorti sa demande de peine d’une amende de 150 000 euros. « L’absence de perception effective » des huit millions d’euros – que Pascaline Bongo Ondimba est accusée de s’être vu promettre en échange de son intercession au profit d’une entreprise française pour que cette dernière obtienne un marché public gabonais – « n’ôte rien au caractère initial de corruption », a indiqué le parquet.

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Peines d’emprisonnement requises

« Pascaline Bongo était l’administratrice déléguée de Sift, c’est elle qui a mandaté verbalement Danyèle Palazo-Gauthier et qui a également sollicité Franck Ping pour qu’il l’aide », a déclaré le procureur. « Il importe peu que le marché de l’Agence nationale des grands travaux (ANGT) ait échappé à Egis Route. En tant que haute représentante personnelle du président, il entrait bien dans les compétences de Pascaline Bongo de conseiller le président de la République, notamment sur la création de l’ANGT. »

« C’est très fort comme peine, on voit que c’est un procès orienté », a commenté l’une des proches de Pascaline Bongo à l’issue de l’audience, ce jeudi. Pour tous les accusés, une peine d’emprisonnement a été demandée. « C’est chaud », réagit l’un d’entre eux lors de la suspension d’audience qui suit.

Poursuivi pour complicité de corruption passive d’agent public étranger, Franck Ping, ex-beau fils de Pascaline Bongo – accusé d’avoir joué un rôle d’intermédiaire dans l’affaire – risque deux ans d’emprisonnement avec sursis simple et 150 000 euros d’amende. La même peine a été requise contre l’avocate et amie de l’ex-directrice de cabinet, Danyèle Palazo-Gauthier, qui risque également une restriction de ses droits civiques, civils et familiaux durant cinq ans, et notamment l’interdiction d’exercer sa profession juridique.

Une femme « digne »

L’audience s’est poursuivie avec les plaidoiries de la défense. C’est Maître Corinne Dreyfus-Schmidt, avocate de Pascaline Bongo Ondimba, qui a ouvert le bal. « Pourquoi marteler sans cesse cette qualité d’agent public ?, tonne l’avocate, qui a dans le passé défendu Bibo Bourgi dans l’affaire Karim Wade, au Sénégal, ou encore l’homme d’affaires français Bernard Tapie. Parce que vous savez depuis le début que vous n’avez aucun élément capable d’asseoir cette accusation. »

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L’avocate pointe du doigt une mauvaise compréhension du système politique gabonais de la part du parquet national financier et de la Cour. « On n’essaie même pas de se renseigner. C’est quand même inquiétant, affirme Maître Dreyfus-Schmidt. Madame Bongo est une femme extrêmement pudique, qui n’a jamais critiqué son frère, qui a été extrêmement digne et ne s’est jamais étalée sur les relations familiales. On vient aujourd’hui s’appuyer sur des relations familiales difficiles dans un pays étranger, devant une juridiction étrangère, alors qu’elle a eu la décence de ne rien dire dans son propre pays. »

La défense de Pascaline Bongo Ondimba repose notamment sur ce qualificatif, qu’elle réfute, « d’agent public étranger ». La sœur d’Ali Bongo Ondimba soutient avoir perdu toute influence au sein du palais du Bord de mer après le décès de son père, en juin 2009, et n’avoir obtenu le titre de « haute représentante personnelle du président de la République » que pour des besoins d’image, sans la moindre fonction réelle dans l’exécutif. C’est, d’après sa défense, un « titre en carton-pâte », « d’opérette ». « Il y a l’avant 2009, et il y a l’après, la chute, affirme son conseil. On fait comme si cette chute n’avait jamais existé. »

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La défense évoque un jugement attendu non seulement en France mais aussi au Gabon, « dans un moment historique des relations franco-africaines ». Quant à l’avocat de Danyèle Palazo-Gauthier, il désigne une « poursuite politique » et un « aveuglement » du parquet. « Cela me choque. C’est très bien de faire de la politique mais pas dans une enceinte judiciaire. »

Dénonçant la « mystification d’une enquête », Corinne Dreyfus-Schmidt évoque la présidence d’Ali Bongo Ondimba. « Franck Ping a dit [lors de son audition] ce que Pascaline Bongo ne veut pas dire : Ali Bongo Ondimba concentrait tous les pouvoirs entre ses mains. Pensez-vous que ma cliente pouvait ne serait-ce que l’approcher pour l’influencer ? » Le verdict a été mis en délibéré et sera connu le 22 avril.

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