Ali Mahamane Lamine Zeine, 3 700 kilomètres pour deux tweets
Si le Premier ministre de transition nigérien s’est rendu au Congo pour une réunion du Comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, il n’a pas pris part à la plénière. Un voyage pour rien ? Pas sûr…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 7 février 2024 Lecture : 2 minutes.
Personne ne nierait qu’une contribution internationale à la résolution de la crise libyenne gagnerait à associer les six voisins de l’ancienne Jamahiriya arabe, en particulier celui du sud-ouest, le Niger, d’où provient une bonne partie du flux migratoire clandestin.
Ce 5 février, à Kintélé, ville en banlieue nord-est de Brazzaville, s’est tenue la neuvième réunion du Comité de haut niveau de l’Union Africaine (UA) sur la Libye, en présence de chefs d’État et de gouvernement.
Cette réunion congolaise s’est-elle tenue en présence du Niger ? Oui et non… « Oui », car le Premier ministre de transition nigérien a bien foulé le sol de la République du Congo, et « non », car Ali Mahamane Lamine Zeine n’apparaît pas sur la photo de famille de l’événement, à la différence du président de la commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, du président en exercice de l’UA, Azali Assoumani, ou encore du représentant spécial de l’ONU en Libye, Abdoulaye Bathily. Le pays du général Tiani n’a pas non plus participé à la plénière. Le protocole a ses raisons que la raison géopolitique ne connaît pas…
Invitation nationale mais pas continentale
À la suite du coup d’État du 26 juillet dernier contre le président Mohamed Bazoum, le Niger a été suspendu des instances de l’UA. Le pays en rupture de ban ne pouvait donc pas être convié par l’institution continentale qui organisait la rencontre aux portes de Brazzaville. Le chef du gouvernement nigérien ne pouvait pas davantage représenter la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), son pays venant d’en claquer la porte.
Les bruits de couloirs indiquent que les représentants de l’UA auraient été surpris par la présence du Nigérien au Congo. Ce dernier a-t-il donc pris son avion, le 4 février, sans invitation formelle ? Le Niger a bien été invité, mais par le pays hôte, comme en témoignent deux posts officiels de la présidence congolaise sur le réseau X. Le premier de ces « tweets » montre, en photo, l’arrivée du Premier ministre nigérien à Brazzaville, officiellement « pour prendre part à la réunion du comité de haut niveau de l’Union Africaine sur la Libye ».
Le second post annonce, vidéo à l’appui, que « le président de la République Denis Sassou Nguesso a reçu en audience, le Premier ministre nigérien Ali Lamine Zeine, le 5 février 2024″ et ceci « en marge » de la réunion du comité de haut niveau de l’UA.
La guerre des images
Si les hauts dignitaires des régimes de l’Alliance des États du Sahel (AES) semblent peu voyager, par paranoïa, par concentration sur leurs problèmes nationaux ou par manque d’hôtes éventuels, le chef du gouvernement du Niger ne pouvait manquer cette opportunité de reconnaissance congolaise. A-t-il été surpris qu’on ne l’autorise pas à participer à la plénière ? L’intéressé avait dû en envisager l’hypothèse, et se satisfait peut-être des tweets congolais donnant l’impression que son pays avait tout de même son mot à dire.
Encore plus que le Mali ou le Burkina Faso, le Niger a dû faire face à de lourdes pressions après le putsch de juillet. Dans la guerre de communication qui accompagne les offensives militaires contre l’insécurité sahélienne, les juntes ne sauraient snober le moindre selfie avec un président jugé fréquentable.
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