Gaza : une offensive sur Rafah menacerait un accord sur les otages, avertit le Hamas

Le Hamas a averti dimanche 11 février qu’une offensive militaire israélienne contre Rafah, à l’extrême-sud de la bande de Gaza, menacerait les négociations sur la libération des otages détenus dans le territoire.

Des chars israéliens sont positionnés près de la frontière avec la bande de Gaza le 11 février 2024. © Menahem KAHANA / AFP

Des chars israéliens sont positionnés près de la frontière avec la bande de Gaza le 11 février 2024. © Menahem KAHANA / AFP

Publié le 11 février 2024 Lecture : 4 minutes.

Plusieurs pays ont mis en garde contre une « catastrophe humanitaire » en cas d’assaut sur la ville où sont réfugiés plus de 1,3 million de Palestiniens, selon l’ONU. Une grande majorité d’entre eux ont fui la guerre qui fait rage depuis quatre mois entre Israël et le mouvement islamiste.

Les combats semblaient particulièrement intenses dimanche à quelques kilomètres au nord, à Khan Younès, où l’armée israélienne traque les combattants du Hamas depuis plusieurs semaines. Des correspondants de l’AFP ont entendu des explosions régulières, des avions en survol et vu plusieurs panaches de fumée noires s’échapper de la ville et de ses environs.

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L’armée israélienne « continue à éliminer des terroristes et conduire des opérations ciblées dans l’ouest » de la ville, a-t-elle indiqué.

« Dernier bastion »

« Ceux qui disent qu’il ne faut absolument pas entrer dans Rafah sont en réalité en train de nous dire qu’il faut perdre la guerre, et laisser le Hamas sur place », a déclaré le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, selon des extraits d’un entretien à la chaîne ABC News qui doit être diffusé dimanche, qualifiant Rafah de « dernier bastion » du mouvement islamiste.

Israël assurera « un passage sécurisé à la population civile pour qu’elle puisse quitter » la ville, adossée à la frontière fermée avec l’Égypte, a-t-il ajouté, sans préciser où les civils pourraient se réfugier.

« Je ne sais pas où nous irons » en cas d’offensive, répond Farah Muhammad, qui a fui la ville de Gaza, au nord. « Il n’y plus d’endroit pour s’échapper. Je n’ai pas d’argent pour aller dans le centre, les routes sont dangereuses et la mort est partout », dit cette mère de cinq enfants âgée de 39 ans, qui a perdu tout contact avec son mari depuis un mois.

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Menaces sur les otages

« Toute attaque (….) sur la ville de Rafah menacerait les négociations » actuellement en cours sur un échange entre les otages et des Palestiniens détenus par Israël, a souligné dimanche un responsable du Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007. Ce que le Premier ministre et l’armée « n’ont pas réussi à faire en plus de quatre mois, ils échoueront à le faire quel que soit le temps que la guerre durera », a-t-il dit.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas dans le sud d’Israël, qui a fait plus de 1 160 morts, en majorité des civils tués ce jour-là. En représailles, Israël a juré de « détruire » le Hamas, qu’il considère comme une organisation terroriste de même que les États-Unis et l’Union européenne notamment. L’armée israélienne a lancé une offensive qui a fait 28 176 morts à Gaza, en grande majorité des civils, selon bilan communiqué dimanche par le ministère de la Santé du mouvement islamiste.

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Environ 250 personnes ont par ailleurs été enlevées en Israël le 7 octobre et emmenées à Gaza. Une trêve d’une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël. Selon Israël, 132 otages sont toujours détenus, dont 29 seraient morts. La branche armée du Hamas, les brigades Ezzedine al-Qassam, a affirmé dimanche que deux otages étaient morts et huit autres gravement blessés dans des bombardements ces quatre derniers jours.

Des négociations, menées via une médiation du Qatar et de l’Égypte, sont en cours pour parvenir à une nouvelle trêve, plus longue, et de nouveaux échanges. Face à la perspective d’une offensive majeure, la pression des pays étrangers s’accroît. Les Émirats arabes unis ont exprimé « leur profonde inquiétude » face aux « sérieuses répercussions humanitaires » d’un assaut israélien.

Le Qatar a « fermement condamné » les menaces d’Israël sur Rafah et l’Organisation de la coopération islamique (OCI) a dénoncé les « tentatives d’expulsion forcée du peuple palestinien de ses terres ». À Téhéran, le président iranien, Ebrahim Raïssi, a appelé dimanche à exclure Israël de l’ONU, estimant que l’offensive israélienne à Gaza était « un crime contre l’Humanité ». À Rabat, des milliers de Marocains ont défilé dimanche en soutien au peuple palestinien. L’Arabie saoudite avait appelé samedi à un réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU.

Pour le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, une offensive à Rafah provoquerait « une catastrophe humanitaire indescriptible ». Les États-Unis, principal allié d’Israël, ont également durci le ton, le président américain, Joe Biden, jugeant « excessive » la « riposte » israélienne à l’attaque du Hamas.

Les prix explosent

Environ 1,7 million de personnes, d’après l’ONU, sur un total de 2,4 millions d’habitants, ont fui leur foyer depuis le 7 octobre, beaucoup d’entre elles déplacées plusieurs fois à travers le territoire dévasté, assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure.

Rafah est le dernier grand centre urbain où l’armée n’a pas encore pénétré et la ville est devenue un gigantesque campement de fortune. L’aide humanitaire qui y arrive par l’Égypte est insuffisante pour nourrir la population qui voit les prix des aliments s’envoler.

« Comme si les bombardements, les tueries et les destructions ne suffisaient pas, les prix ont augmenté comme si on était en Europe », a expliqué Abou Muhammad Rabie, 54 ans, qui tente d’acheter au marché de la nourriture pour sa famille de neuf personnes. « De toute façon nous mourrons, des bombes ou de la faim », lance-t-il.

Sur leurs réseaux sociaux, les responsables du Hamas ont dénoncé dimanche la situation humanitaire dramatique dans le territoire. Elles accusent les forces israéliennes d’ »empêcher l’arrivée de l’aide » à Gaza, notamment dans le nord où les combats se poursuivent et où « le stade de la catastrophe » a été dépassé.

(Avec AFP)

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