Vainqueur de la CAN, l’Ivoirien Émerse Faé est-il parti pour durer ?
La Côte d’Ivoire est devenue championne d’Afrique pour la troisième fois en battant le Nigeria (2-1) en finale de la CAN, le 11 février à Abidjan. Le sélectionneur des Éléphants avait été nommé le 24 janvier pour succéder à Jean-Louis Gasset, en pleine compétition. Un pari gagnant pour ce technicien novice, au terme d’un scénario inimaginable il y a encore un mois.
Émerse Faé (40 ans) a disputé beaucoup de finales quand il était joueur. Il en a gagné certaines, comme la Coupe Gambardella en 2002 avec le FC Nantes, son club formateur (il est né à Nantes), ou la Coupe du monde des moins de 17 ans, un an plus tôt, avec l’équipe de France face au… Nigeria (3-0). Il a aussi perdu la Coupe de la Ligue, en 2004, avec les Canaris nantais et surtout la Coupe d’Afrique des nations en Égypte, avec la Côte d’Ivoire, contre les Pharaons (0-0, 2-4 aux tirs aux buts).
Le dimanche 11 février, l’ancien milieu de terrain des Éléphants (44 sélections entre 2005 et 2012, 1 but) a remporté la CAN à Abidjan avec une victoire face au Nigeria (2-1). Au début de la compétition, la Côte d’Ivoire était un des favoris et son sélectionneur s’appelait Jean-Louis Gasset (70 ans). Mais le 24 janvier, le Français a quitté Abidjan après avoir démissionné, dans la foulée de la déroute subie quarante-huit heures plus tôt face à la Guinée équatoriale (0-4).
Émerse Faé, un de ses adjoints, a été nommé alors que les Éléphants étaient tributaires du résultat du match Maroc-Zambie le soir même pour espérer disputer les huitièmes de finale, tandis que la Fédération ivoirienne de football (FIF) s’était rapprochée de son homologue française (FFF) pour se faire prêter Hervé Renard, champion d’Afrique en 2015 avec les Ivoiriens et actuel sélectionneur de l’équipe de France féminine.
Faé n’oublie par Gasset
On connaît la suite : les Lions de l’Atlas ont battu les Chipolopolos (1-0), Renard n’est pas venu, Faé a été confirmé « pour assurer l’intérim », ainsi que l’a expliqué la FIF dans son communiqué, et les Éléphants ont écarté le Sénégal (1-1, 5-4 aux tirs aux buts), le Mali (2-1 après prolongations) et la RDC (1-0) avant de dominer les Super Eagles en finale. Quelques minutes après la remise du trophée, Faé a eu quelques mots pour Gasset. « C’est aussi sa victoire », a expliqué le sélectionneur ivoirien, dont l’intérim pourrait logiquement se prolonger. « Je ne vois pas comment on pourrait lui demander de partir après ce qu’il a réalisé en si peu de temps. Il n’y a aucune raison d’aller chercher ailleurs ce que nous avons sous la main », argumente l’ancien sélectionneur Georges Kouadio.
Dans un délai relativement court, la FIF annoncera si Émerse Faé occupera le banc ivoirien lors du match amical prévu contre l’Argentine, en mars, et pour les deux rencontres qualificatives pour la Coupe du monde 2026, contre le Gabon à domicile et au Kenya, au mois de juin. L’ancien joueur de Nantes, Reading (Angleterre) et Nice, qui avait été contraint de mettre un terme à sa carrière en 2012 à cause de phlébites à répétition, s’était rapidement tourné vers celle d’entraîneur. « On l’avait suivi quand il était à Nice en tant que coach des moins de 19 ans. Sa philosophie de jeu correspondait à celle du club et nous lui avons proposé de devenir entraîneur de notre équipe B [National 3] », se souvient Jérôme Champagne, ancien dirigeant de Clermont Foot (Ligue 1).
Un an plus tard, au mois de juin 2022, le club auvergnat apprend que la fédération ivoirienne propose à Faé d’intégrer le staff technique de Gasset. « Émerse voulait honorer son contrat à Clermont, mais il était également très intéressé par le projet ivoirien. Pour nous, il était logique de lui laisser cette possibilité, et nous l’avons libéré », poursuit Champagne. L’accord passé entre Clermont Foot et la FIF prévoyait que le club français percevrait une indemnité de 25 000 euros si Faé devenait sélectionneur, et 25 000 euros si la Côte d’Ivoire devenait championne d’Afrique.
Homme discret, joueur actif
Le nouveau patron des Éléphants a la réputation d’être un homme discret, ce que confirme Gérard Gnanhouan, son ancien partenaire en sélection nationale : « Il ne parle pas pour ne rien dire. Il est assez taiseux, c’est vrai. Mais sur le terrain, c’était une autre personne, il savait haranguer, sonner la révolte. Émerse, c’était le coéquipier vraiment idéal, qui ne faisait pas de bruit, sur lequel on pouvait compter. » L’actuel entraîneur des gardiens de but du FC Sochaux se souvient que Faé était déjà très proche de Guy Demel, un autre international ivoirien. « Cela ne m’étonne pas que Guy l’ait rejoint pour être son adjoint », ajoute-t-il.
Georges Kouadio, qui a connu Faé quand celui-ci portait le maillot des Éléphants, n’a pas été surpris de la reconversion du milieu de terrain. « Émerse a été formé à Nantes, un club où les notions tactiques sont importantes. En sélection, il lui arrivait de poser des questions, il avait une réflexion sur le jeu », indique-t-il. Depuis sa prise de fonction, le 24 janvier, Faé a utilisé plusieurs systèmes de jeu et fait tourner ses effectifs en fonction des états de forme des uns et des autres, des suspensions et de ses orientations tactiques ; il a pu compter sur le retour de Sébastien Haller, blessé lors du premier tour et décisif face à la RDC et au Nigeria. « Il a su s’adapter à une situation particulière, bien entouré par Demel et Alain Gouaméné. Il a aussi eu de la chance. Je ne sais pas si la FIF le nommera officiellement sélectionneur, ce qui semblerait logique avec ce qu’il a réussi », intervient l’ancien sélectionneur Yéo Martial, champion d’Afrique en 1992.
Rendez-vous avec Diallo
La question de l’avenir du troisième technicien à avoir conduit les Éléphants au sommet du football africain après Martial et Renard sera réglée prochainement, une fois toutes les festivités liées à la conquête de la CAN achevées. La rue ivoirienne et la presse sportive sont favorables à son maintien.
Idriss Diallo, le président de la FIF, rencontrera prochainement Faé à Abidjan pour évoquer la suite, et le dirigeant semble également privilégier cette hypothèse hautement probable. Cela passera évidemment par le volet financier d’un possible contrat longue durée (au moins deux ans), et par le projet sportif, puisque la Côte d’Ivoire défendra son titre en 2025 au Maroc et tentera de se qualifier pour la Coupe du monde 2026 aux États-Unis, au Canada et au Mexique.
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