Au Sénégal, le tourisme impacté et des multinationales aux aguets, après le report de la présidentielle

Alors que le pays fait face à une situation incertaine, à la suite du report de l’élection présidentielle par le chef de l’État sénégalais Macky Sall, les milieux économiques restent vigilants. Certains font part de leur inquiétude, notamment dans le tourisme.

Bateaux de pêche colorés au Cap Skirring, en Casamance © Michael Runkel/Robert Harding/robertharding via AFP

Bateaux de pêche colorés au Cap Skirring, en Casamance © Michael Runkel/Robert Harding/robertharding via AFP

Publié le 14 février 2024 Lecture : 3 minutes.

Parmi les secteurs économiques majeurs du Sénégal, le tourisme, souffre déjà des conséquences de la décision de Macky Sall. « Nous avons effectivement observé un nombre important d’annulations de touristes, suite à la crise actuelle. Les réservations d’hôtels ont été particulièrement touchées », affirme Pape Berenger Ngom, président de l’Association des professionnels de l’hôtellerie et de la restauration.

L’aérien n’est pas en reste. Les recherches pour les vols internationaux vers le pays ont diminué de 17 % lors de la semaine du 2 au 8 février par rapport à la semaine précédente, note la société spécialisée dans les données aériennes ForwardKeys.

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Les vacances scolaires de la France, qui représente un gros contingent de voyageurs, viennent de démarrer et auront valeur de « test », souligne Dominique Fruchter, économiste pour Coface. Si certains ont déjà prévu de repousser leur voyage, le Club Med affichait, en revanche, en début de semaine, toujours 98 % de remplissage dans son club en Casamance, et dit n’avoir pas imposé de restrictions sur les excursions.

Des multinationales dans l’expectative

« La perception positive du Sénégal auprès des investisseurs locaux et étrangers sera grandement affectée au regard du risque pays élevé que cette situation va engendrer », s’est inquiétée jeudi la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (CNES).

Concernant les nombreuses entreprises multinationales installées dans le pays, comme Nestlé, Philip Morris, TotalEnergies, Société Générale, « Certains employés sont plus inquiets que d’autres », confie à l’AFP un chef d’entreprise installé à Dakar et préférant rester anonyme. Il n’y a « pas eu de demande de départs » de collaborateurs expatriés mais « le climat risque d’être très difficile » dans les prochains jours.

Les acteurs des deux projets emblématiques du virage sénégalais vers les hydrocarbures, secteur censé soutenir de plus en plus la croissance restent peu diserts. Pour le champ gazier offshore Grand Tortue, la major pétrolière britannique BP, qui porte le projet, n’a pas voulu faire de commentaires. De son côté, l’opérateur australien Woodside assure que le chantier du champ gazier et pétrolier Sangomar, « reste dans les délais », et que les premières extractions de pétrole auront lieu « mi-2024 ».

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Ni DP World, groupe de Dubaï qui construit un port en eau profonde à Ndayane, près de la capitale, ni le turc Aksa, qui fabrique une centrale électrique au gaz au nord du pays, n’ont souhaité répondre.

Au-delà des investissements déjà engagés, les futurs projets pourraient être victimes des troubles : « Quand une entreprise décide d’un investissement, elle aura peut-être envie de le reporter quand elle lit ce qu’elle lit », s’inquiète Étienne Giros, président du Conseil français des investisseurs en Afrique, une nationalité très représentée dans la communauté des affaires du pays.

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L’aide internationale en question

Les bailleurs internationaux peuvent-ils couper les vivres au Sénégal si le conflit s’aggrave ? Trop tôt pour le dire, répondent plusieurs experts. Mais la question se pose sur un continent ayant connu huit coups d’État depuis 2020 et le tarissement des aides internationales pour certains pays, à l’instar du Niger et du Burkina Faso.

Avec 1,8 milliard de dollars versés en 2022 selon l’OCDE, le Sénégal figure parmi les pays du continent qui reçoivent le plus de soutiens financiers. Le Fonds monétaire international (FMI) a validé en mai un nouveau programme d’aide de 1,8 milliard de dollars en échange de réformes, étalé sur trois ans. Interrogé, le FMI dit qu’il « surveille activement la situation » mais n’a pas fait de commentaire sur les versements futurs à la lumière des derniers événements.

Des sanctions représenteraient néanmoins une surprise dans ce pays souvent montré en exemple, qui est « un des chouchous des organismes financiers multilatéraux et de développement, un pays solide institutionnellement avec des perspectives économiques favorables », souligne Dominique Fruchter. La croissance attendue par le FMI pour 2024 est de 8,8 %, plus du double de celle estimée pour 2023.

(Avec AFP)

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