À la Fédération algérienne de football, les caisses sonnent creux

La Fédération algérienne de football (FAF) n’est pas seulement à la recherche du successeur de Djamel Belmadi, elle doit aussi faire face à une situation financière compliquée, qui va obliger l’État à (re)mettre la main à la poche.

Walid Sadi, le jour de son élection à la tête de la FAF, au Centre technique national de Sidi Moussa, à Alger, le 21 septembre 2023. © APP / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Walid Sadi, le jour de son élection à la tête de la FAF, au Centre technique national de Sidi Moussa, à Alger, le 21 septembre 2023. © APP / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Alexis Billebault

Publié le 21 février 2024 Lecture : 4 minutes.

Walid Sadi, le président de la Fédération algérienne de football (FAF), élu le 21 septembre dernier, travaille dans l’urgence. Le dirigeant est pressé de boucler le dossier sensible du nouveau sélectionneur national, alors que l’Algérie affrontera à Alger la Bolivie et l’Afrique du Sud, les 22 et 26 mars, dans le cadre d’un tournoi international. Le nom du successeur de Djamel Belmadi, limogé juste après l’élimination des Fennecs au premier tour de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) en Côte d’Ivoire devrait être connu très rapidement.

Selon la presse algérienne, le choix du dirigeant se portera sur le Suisse d’origine bosnienne et Croate Vladimir Petkovic (60 ans), ancien sélectionneur des Suisses et qui fait figure de favori, ou sur le Portugais José Peseiro (63 ans), en fin de contrat avec le Nigeria – le 28 février – et dont la prolongation se fait attendre.

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Une enquête sur la période 2017-2023

Mais depuis son arrivée à la tête de la fédération, qui change plus souvent de président que de sélectionneur, faisant d’elle la plus instable du monde – il est le quatrième président depuis 2017, après Kheireddine Zetchi, Charaf-Eddine Amara et Djahid Zefizef –, Walid Sadi doit également affronter une situation financière précaire, qu’il avait évoquée quelques semaines après son entrée en fonction. « À la fin du mandat de l’ancien président Mohamed Raouraoua, les caisses de la fédération étaient bien remplies, mais il y a eu beaucoup d’argent dépensé depuis, et ce n’est désormais plus vraiment le cas », explique un proche de l’instance sous couvert d’anonymat.

L’État algérien a diligenté une enquête menée conjointement par l’inspection générale du ministère des Finances et par l’inspection de la présidence de la République sur la période 2017-2023. Et il semblerait que les recherches aient été plutôt fructueuses. « On parle de sommes importantes, dépensées par la fédération qui menait alors grand train. Il n’y a pas de chiffres précis, mais en Algérie, on évoque plusieurs millions d’euros », explique Yazid Ouahib, chef du service des sports du quotidien El Watan.  Les enquêteurs ont notamment été intrigués par certaines dépenses effectuées sur le territoire national, mais également à l’étranger. « Le train de vie de la fédération était trop élevé, même si elle était l’une des plus riches d’Afrique sous Raouraoua », poursuit Ouahib.

Selon plusieurs sources contactées par Jeune Afrique, les salaires des différents employés de la fédération, aussi bien aux postes techniques qu’administratifs, ont parfois flambé, et de nombreux salariés ont été recrutés. La FAF aurait également du mal à payer dans les temps certains salaires. Pendant des années, et surtout depuis le titre de champion d’Afrique obtenu au Caire en 2019, rien n’était trop beau pour la sélection nationale. Djamel Belmadi, le sélectionneur, était le mieux payé d’Afrique avec un salaire de 208 000 euros, assorti de primes conséquentes et de différents avantages. Son licenciement pourrait coûter 7 280 000 euros à la FAF, puisque le technicien était sous contrat jusqu’au 31 décembre 2026.

Les joueurs ont également profité des largesses de l’instance, en touchant des primes particulièrement généreuses. Ainsi, ils auraient perçu plusieurs dizaines de milliers d’euros – le chiffre de 50 000 euros par joueur est avancé par plusieurs sources – pour s’être qualifiés pour la phase finale de la CAN en Côte d’Ivoire, dans un groupe qui n’était pourtant pas composé de terreurs du continent (Ouganda, Niger et Tanzanie).

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L’État et les sponsors à la rescousse

La FAF doit également de l’argent à certains prestataires. Au mois de décembre dernier, le site footafrique avait révélé que l’agence française Evol Sport, spécialisée dans l’événementiel, notamment dans l’organisation de stages et de matchs amicaux pour les sélections nationales, et partenaire de la FAF depuis 2018, attend toujours d’être payée.

Les enquêtes pourraient aboutir sur des actions en justice à l’encontre des dirigeants portant une responsabilité avérée dans la situation financière de la FAF. La fédération, qui a décidé de réduire la voilure, notamment en ce qui concerne le salaire du futur sélectionneur, va cependant pouvoir compter sur l’aide financière de l’État pour renflouer ses caisses, et sur certains de ses sponsors. Ce sera le cas, notamment, de la Sonatrach, qui avait signé en mars 2023 un contrat de partenariat avec la FAF pour une durée de trois ans.

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La compagnie pétrolière nationale devait verser 1 850 000 euros par an à l’instance, mais devrait revoir cette somme à la hausse. Cela pourrait également être le cas de la compagnie de téléphonie Mobilis, partenaire de la fédération depuis le mois de septembre 2014 et une des filiales de Groupe Telecom Algérie, l’entreprise publique de télécommunications. Peu après son élection, Walid Sadi avait annoncé vouloir « développer ce partenariat », lors d’une rencontre avec Chaouki Boukhazani, le PDG de Mobilis. Cela pourrait se traduire là aussi par un coup de pouce financier. Et dans les deux cas, sur une probable recommandation de l’État. 

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