Burkina Faso : les armes se sont tues mais Compaoré reste en position délicate

Les armes se sont tues au Burkina Faso après des mutineries en série dans les casernes, mais le régime du président Blaise Compaoré, en place depuis 1987, reste dans une situation délicate, entre tensions sociales et projets politiques contestés.

Les troubles ont prouvé à Blaise Compaoré que la crise perdurait dans l’armée. © DR

Les troubles ont prouvé à Blaise Compaoré que la crise perdurait dans l’armée. © DR

Publié le 18 juin 2011 Lecture : 2 minutes.

Le 3 juin, pour la première fois depuis le début en mars des protestations de militaires qui avaient gagné toutes les garnisons, M. Compaoré recourait à la manière forte et envoyait l’armée dans la capitale économique Bobo Dioulasso (sud-ouest).

En quelques heures, les mutins, qui avaient commis pillages massifs et violences, y étaient matés. Symbole de la reprise en main: la garde présidentielle, qui mi-avril s’était elle-même mutinée, contraignant le chef de l’Etat à quitter brièvement son palais, a conduit l’opération.

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Depuis lors, silence dans les rangs. Dans la hiérarchie on espère que l’orage est passé. "Nous pensons que tout le monde a bien compris, le message a été reçu", déclare à l’AFP un responsable militaire.

"Il fallait vraiment que l’Etat montre qu’il existe", approuve Evariste Faustin Konseibo, dirigeant d’un centre de réflexion sur la démocratie et la bonne gouvernance.
Mais les troubles ont prouvé au militaire Blaise Compaoré, chef des armées mais aussi ministre de la Défense dans le nouveau gouvernement, que la crise perdurait dans l’armée.

Manifestations des paysans

Elle "doit être réformée" en matière de gouvernance et de recrutement, souligne le responsable militaire. Le manque d’harmonie au sein du commandement comme la mauvaise sélection et le trop grand nombre de nouvelles recrues ont été soulignés.

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Si le climat s’est pour le moment apaisé dans les casernes, le pouvoir n’en a pas fini avec un front social et politique surchauffé, après la mobilisation des jeunes, des commerçants ou encore des magistrats depuis février.

Les manifestations fleurissent à travers le pays: pour réclamer une meilleure distribution des terres, des revalorisations salariales, etc.

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Cette semaine, les agents du ministère des Finances ont entamé un sit-in "illimité" pour réclamer notamment une indemnité logement, s’affrontant à la police. Le gouvernement a assuré que le mouvement n’empêcherait pas le versement des salaires des fonctionnaires.

Chose rare, le malaise s’est étendu aux paysans, cultivateurs de coton en tête, et aux ruraux en général, avec des manifestations pour réclamer le bitumage de routes.
Le gouvernement assure avoir pris la mesure de ces frustrations: le Premier ministre Luc Adolphe Tiao a admis cette semaine que les failles du "système de gouvernance politique et économique" ont été mises cruellement en lumière, et que la population connaît d’abord pauvreté et vie chère.

Un "vrai chef"

Partis politiques et société civile pointent surtout "l’usure du pouvoir". Et y voient une raison de plus de combattre le projet du parti majoritaire de réviser la Constitution, pour permettre à M. Compaoré de briguer sa réélection en 2015 après son deuxième mandat.

Le Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP), en cours de formation, qui doit notamment plancher sur cette révision, cristallise les tensions, opposants et société civile contestant largement son mode de fonctionnement prévu.

"Le président Compaoré joue gros sur cette question des réformes", souligne le sociologue Fernand Sanou.

"S’il suit l’opinion qui veut qu’il se retire après 2015, je pense que les Burkinabè le reconnaîtront éternellement comme un vrai chef, dit-il. S’il écoute les siens, personne ne sait comment il va finir".

 

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