Un journaliste français emprisonné en Éthiopie
Chef de la rubrique Afrique de l’Est d’Africa Intelligence, Antoine Galindo a été arrêté alors qu’il avait rendez-vous avec un responsable du Front de libération oromo (OLF), parti politique d’opposition légalement enregistré.
Un journaliste français, Antoine Galindo, est incarcéré en Éthiopie depuis son arrestation le 22 février, les autorités l’accusant de « conspirer en vue de créer le chaos » dans le pays, a annoncé son employeur, la publication spécialisée Africa Intelligence. Le 24 février, Antoine Galindo a été déféré devant un juge qui a prolongé sa détention jusqu’au 1er mars, selon Africa Intelligence. La publication dénonce des « accusations fallacieuses » qui « ne se basent sur aucun élément tangible » et appelle à la « libération immédiate » de son journaliste.
Antoine Galindo, 36 ans, chef de la rubrique Afrique de l’Est, était arrivé en Éthiopie le 13 février pour couvrir notamment le Sommet de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba, siège de l’organisation panafricaine. « Antoine Galindo, journaliste connu de l’Ethiopian Media Authority (EMA) », l’organe de supervision des médias en Éthiopie, « disposait d’un visa l’autorisant à exercer son activité de journaliste », souligne Africa Intelligence qui fustige une « arrestation injustifiée » constituant « une grave atteinte à la liberté de la presse ».
Antoine Galindo a résidé en Ethiopie entre 2013 et 2017, quatre années durant lesquelles il était le correspondant de plusieurs médias internationaux. Le Comité de Protection des journalistes (CPJ) a dénoncé « une arrestation injuste » qui « éclaire le contexte épouvantable pour la presse en général en Éthiopie », que l’ONG décrit comme le « deuxième pire geôlier de journalistes en Afrique subsaharienne ».
En compagnie d’un responsable de l’OLF, parti politique d’opposition
Après s’être largement améliorée à l’arrivée au pouvoir de l’actuel Premier ministre Abiy Ahmed en 2018, la situation des libertés d’expression et de la presse en Éthiopie s’est à nouveau profondément dégradée depuis 2020 et le début de deux ans de guerre contre les autorités dissidentes de l’État régional du Tigré. Plusieurs journalistes éthiopiens ont été incarcérés et des reporters étrangers ont été expulsés depuis 2020, mais l’emprisonnement d’un de ces derniers est une première depuis plus de trois ans. Mi-2020, un journaliste kényan, Yassin Juma, avait été détenu plus d’un mois, malgré le fait que la justice éthiopienne avait ordonné sa libération.
Selon une source proche du dossier ayant requis l’anonymat, Antoine Galindo a été arrêté le 22 février dans la capitale éthiopienne en compagnie d’un responsable du Front de libération oromo (OLF), parti politique d’opposition légalement enregistré, avec qui il avait rendez-vous. Un porte-parole de l’OLF a confirmé qu’un responsable du parti avait été arrêté le 22 février à la même heure à Addis Abeba, sans pouvoir confirmer qu’il était en compagnie du journaliste. Ce responsable est toujours lui aussi détenu.
En Oromia, peuplée de 40 millions d’habitants, essentiellement oromo, les forces fédérales affrontent depuis 2018 l’Armée de libération oromo (OLA), classée « organisation terroriste » en Éthiopie. L’OLA a fait scission de l’OLF quand celui-ci a renoncé à la lutte armée et a été légalisé.
130e rang mondial en matière de liberté de la presse
Vu à son arrivée au pouvoir comme un réformateur capable de moderniser l’Éthiopie après des décennies de régimes autoritaires, Ahmed Abiy a déçu les espoirs placés en lui. Un an après s’être vu décerner le prix Nobel de la Paix en 2019 pour son rapprochement avec l’Érythrée voisine, il a envoyé l’armée fédérale au Tigré, où le conflit, émaillé de terribles exactions, a été l’un des plus meurtriers du XXIe siècle.
En 2023, selon Reporters sans frontières (RSF), l’Éthiopie pointait au 130e rang mondial en matière de liberté de la presse, en chute de 16 places par rapport à 2022. Selon l’ONG, au 1er janvier 2024, 15 journalistes étaient en prison. « La recrudescence des exactions commises contre les journalistes, observée depuis le début de la guerre au Tigré, fin 2020, se poursuit », dénonçait RSF avant l’arrestation d’Antoine Galindo. « Plusieurs journalistes ont été tués dans des circonstances troubles », selon l’ONG qui pointait également « l’hostilité envers les médias étrangers ».
(Avec AFP)
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