Aux Pays-Bas, perpétuité pour le chef de la « Mocro Maffia »
Sur les 17 personnes jugées dans le cadre du procès « Marengo », trois ont été condamnées à la perpétuité, dont Ridouan Taghi, patron présumé du cartel de drogue surnommé « Mocro Maffia » en raison des origines marocaines de plusieurs de ses membres.
Le baron de la drogue le plus redouté des Pays-Bas a été condamné le 27 février à la prison à perpétuité pour une série de meurtres commis entre 2015 et 2017, à l’issue d’un procès de grande ampleur. Ridouan Taghi, 46 ans, né au Maroc et ayant grandi aux Pays-Bas, est considéré comme le cerveau du cartel de drogue surnommé la « Mocro Maffia », une organisation qualifiée par l’accusation de « machine à tuer bien huilée ».
Le verdict a été rendu presque six ans après le début de ce procès, qui s’est déroulé sous haute sécurité. L’armée a été mobilisée pour sécuriser les abords du tribunal et les procureurs et juges, non identifiés, s’y rendaient en voiture blindée. Des forces de l’ordre lourdement armées patrouillaient mardi 27 février devant le tribunal, communément appelé « Le Bunker », aux abords d’Amsterdam.
De par son ampleur, le procès « Marengo » est sans précédent aux Pays-Bas. Une plateforme de streaming néerlandaise a même réalisé une série appelée « Mocro Maffia ». « Nous condamnons tous les suspects. Ridouan Taghi obtient la prison à vie », a déclaré le juge.
Les dix-sept hommes étaient jugés pour six meurtres et quatre tentatives de meurtre ainsi que pour avoir planifié d’autres exécutions. Tous ont écopé d’une peine de prison, dont sera déduit le temps passé en détention provisoire. Outre Ridouan Taghi, deux autres accusés ont également été condamnés à la prison à perpétuité, Mario R. et Saïd R. Ce dernier a déjà indiqué, via son avocat, faire appel. Plusieurs suspects étaient dans la salle d’audience pour entendre le verdict, mais pas Ridouan Taghi.
Le frère, l’avocat et le confident de Nabil B. assassinés
« Vous avez dû attendre longtemps avant d’avoir le verdict, mais cela est également vrai pour les proches des victimes », a affirmé le juge en s’adressant aux accusés. Trois personnes liées au témoin à charge Nabil B., ancien membre du gang, ont été assassinées au cours du procès : son frère en 2018, son avocat Derk Wiersum en 2019 et un journaliste réputé, Peter R. de Vries, considéré comme son confident, en 2021. « Tout cela a largement endeuillé ce procès », a déclaré le juge.
Mais ces meurtres font l’objet d’une procédure judiciaire distincte. Le verdict du 27 février concernait des crimes commis entre 2015 et 2017, visant principalement des individus soupçonnés par le gang d’être devenus des informateurs de la police. Le meurtre, en 2017 à Utrecht (Centre), d’un homme appelé Hakim Changachi est considéré par l’accusation comme une erreur. Peu de temps après, Nabil B. s’était rendu à la police et avait accepté de devenir témoin à charge. Il a écopé de dix ans de prison.
Ridouan Taghi a été arrêté à Dubaï en 2019 et incarcéré dans une prison néerlandaise ultrasécurisée. Malgré cela, il a continué à diriger son gang en transmettant des messages à ses complices à l’extérieur, selon le parquet. Ridouan Taghi est considéré comme le cerveau d’une organisation du grand banditisme international, dont les racines se trouvent en partie au Benelux, et communément appelée « Mocro Maffia » en raison des origines marocaines de plusieurs de ses membres. Le terme désigne en réalité un ensemble de groupes criminels considéré comme l’un des plus grands distributeurs de cocaïne des Pays-Bas.
Selon le tribunal, Ridouan Taghi, qui a toujours nié les accusations, était le « chef incontesté » de l’organisation criminelle et a eu recours à « une violence extrême pour effrayer les gens ». Aucun des suspects n’a fait de déclaration au cours du procès, ralenti par plusieurs rebondissements.
« La vie humaine n’a aucune valeur »
Alors avocate de Ridouan Taghi, Inez Weski a été arrêtée en avril 2023, soupçonnée d’avoir aidé son client à communiquer avec le monde extérieur. De nouveaux avocats ont démissionné, affirmant ne pas avoir eu assez de temps pour se préparer. Ridouan Taghi a alors décidé d’assurer sa propre défense.
Le dossier de l’accusation comptait plus de 800 pages, avec notamment des éléments à charge portés par Nabil B. et des conversations provenant de téléphones cryptés. « Quand on lit les messages dans le dossier, on se retrouve dans un monde où la vie humaine n’a aucune valeur », a déclaré le juge. Le tribunal a par ailleurs constaté qu’aucun proche de victime n’a osé témoigner des souffrances infligées.
(Avec AFP)
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus
- Maroc-Algérie : que contiennent les archives sur la frontière promises par Macron ?
- Maroc, Kenya, Tanzanie… Le géant indien Adani a-t-il vraiment une stratégie africa...
- Au Niger, des membres d’un groupe rebelle pro-Bazoum ont rendu les armes
- Inauguration du nouvel aéroport de Luanda : après 20 ans, enfin l’envol
- La justice sénégalaise fait reporter l’inhumation de Mamadou Moustapha Ba, évoquan...