Libye : nouveau recul des insurgés, la diplomatie s’active
Les forces fidèles au dirigeant Mouammar Kadhafi ont repoussé samedi à l’artillerie les rebelles vers Ajdabiya (est), malgré de nouvelles frappes de l’Otan et à la veille d’une nouvelle mobilisation diplomatique pour tenter d’obtenir un cessez-le-feu.
Dans la nuit de samedi à dimanche, le comité de médiateurs de l’Union africaine (UA) pour la Libye, réuni à Nouakchott, a réitéré son appel à "la cessation immédiate de toutes les hostilités" et évoqué une "période transitoire" pour l’adoption de réformes dans ce pays, en prélude à une visite dimanche à Tripoli.
L’Otan a annoncé pour sa part samedi soir qu’elle avait continué à frapper au cours des dernières 24 heures des dépôts de munitions et des armes lourdes des forces loyalistes, utilisés pour se réapprovisionner et bombarder Misrata (210 km à l’est de Tripoli), assiégée depuis un mois et demi. Dans un communiqué, le général Charles Bouchard, chef de ces opérations, a ajouté que l’Otan a aussi "détruit un nombre important" de chars dont certains participaient "au bombardement indiscriminé de Misrata".
Boucliers humains
"Nous avons observé des exemples horribles où les forces du régime ont délibérément placé leurs systèmes d’armement près des civils, dans leurs maisons et même dans des lieux de culte", a-t-il affirmé. "Des troupes ont été observées alors qu’elles se cachaient derrière des femmes et des enfants. Ce genre de comportement viole les principes de la loi internationale et ne sera pas toléré", a déclaré le général Bouchard.
Samedi, un navire affrété par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a accosté dans cette ville, la troisième du pays, avec à son bord des fournitures médicales pour soigner 300 blessés. L’UE se prépare à lancer une mission militaro-humanitaire pour aider la population assiégée de Misrata.
Sur le terrain, alors que les insurgés s’étaient rapprochés dans la matinée à quelques dizaines de kilomètres de Brega (80 km à l’ouest d’Ajabiya), ils ont essuyé des tirs d’obus et de roquettes qui les ont obligés à battre en retraite vers l’est. Au moins 10 fortes explosions ont été entendues dans les environs d’Ajdabiya, tandis que les forces loyalistes bombardaient les insurgés dans leur retraite, selon un journaliste de l’AFP.
Violations de la zone d’exclusion aérienne
En milieu de journée, des dizaines de voitures ont fui la ville vers l’est et le nord, direction Benghazi, le fief rebelle à 160 km plus au nord. En chemin, des journalistes de l’AFP ont vu un hélicoptère militaire, arborant les couleurs des rebelles, volant à très basse altitude dans la direction du front, donc en violation de la zone d’exclusion aérienne en vigueur depuis le 19 mars. L’Otan a dit enquêter sur cet hélicoptère.
En soirée, le vice-ministre libyen des Affaires étrangères, Khaled Kaaim, a affirmé à Tripoli que deux hélicoptères ayant violé la zone d’exclusion aérienne ont été abattus par l’armée dans la région de Brega (est). Des avions de l’Otan ont par ailleurs intercepté un chasseur MiG-23 piloté par un rebelle, qui violait la zone d’exclusion, et l’ont contraint à atterrir, a déclaré à l’AFP un responsable de l’Otan.
En fin de journée, les insurgés contrôlaient toujours l’est d’Ajdabiya mais, selon des habitants, des affrontements isolés avaient cependant lieu dans différentes parties de la ville. Dimanche, un groupe de dirigeants africains –le président sud-africain Jacob Zuma et ses homologues du Congo, du Mali, de Mauritanie et d’Ouganda– est attendu en Libye. Ces médiateurs de l’UA veulent rencontrer Mouammar Kadhafi puis des responsables de l’insurrection à Benghazi pour tenter d’obtenir un cessez-le-feu. Ils comptent également proposer une "période transitoire" pour l’adoption de réformes politiques censées éliminer les "causes de la crise actuelle", selon leur communiqué de Nouakchott.
"Pas de solution militaire"
Comme en écho, le chef du Congrès général du peuple (Parlement), Mohamed Zwei, a annoncé samedi soir à Tripoli qu’un projet de constitution, en préparation depuis 2007, serait soumis à l’approbation des Libyens dès la fin de la crise. La rébellion a par avance rejeté toute idée d’un cessez-le-feu impliquant le maintien au pouvoir de Mouammar Kadhafi ou de ses fils.
Le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen, a estimé de son côté qu’il n’y avait "pas de solution militaire" au conflit et qu’il fallait une solution politique, dans une interview au magazine Der Spiegel. Une réunion du Groupe de contact sur la Libye est prévue mercredi prochain à Doha (Qatar). La Ligue arabe accueillera le lendemain jeudi au Caire une conférence en présence notamment du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon et de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton.
Mardi, les ministres européens des Affaires étrangères ont prévu de rencontrer un représentant du CNT. Dans ce contexte, l’écrivain français Bernard-Henri Lévy est attendu à Benghazi, point de départ d’une visite "indépendante" d’une semaine dans le pays. L’intellectuel s’était déjà rendu début mars à Benghazi, où il avait rencontré des membres du Conseil national de transition (CNT) avant d’organiser leur rencontre à Paris avec le président français Nicolas Sarkozy et de plaider pour une intervention militaire.
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