Le journaliste français détenu en Éthiopie a été libéré
Antoine Galindo avait été arrêté en marge du sommet de l’Union africaine. Il était soupçonné d’entretenir des liens avec des groupes séparatistes classés terroristes par Addis-Abeba.
Le journaliste français Antoine Galindo, incarcéré depuis une semaine en Éthiopie, a été libéré et est en route pour la France, a annoncé son employeur, la publication spécialisée Africa Intelligence. « Antoine Galindo a été libéré le 29 février après une semaine d’incarcération et a pu quitter Addis-Abeba pour regagner Paris », a indiqué à l’AFP Paul Deutschmann, rédacteur en chef à Africa Intelligence.
Sa libération « est un vrai soulagement pour toute la rédaction d’Africa Intelligence qui a hâte de retrouver Antoine », a-t-il ajouté. Le journaliste avait été arrêté le 22 février dans un hôtel du centre d’Addis-Abeba, en compagnie d’un responsable du Front de libération oromo (OLF), parti d’opposition légalement enregistré, avec qui il avait rendez-vous. Ce dernier est toujours incarcéré.
Lien avec l’Armée de libération oromo
À l’audience, la police a indiqué soupçonner le journaliste de « conspirer pour créer le chaos » en Éthiopie. Selon une source proche du dossier, elle l’a accusé d’être en lien à la fois avec l’Armée de libération oromo (OLA), groupe armé actif dans l’État régional de l’Oromia et classé « terroriste » en Éthiopie, et avec les milices populaires amhara « Fano », qui affrontent les forces fédérales dans l’État régional de l’Amhara.
En Oromia, qui compte quelque 40 millions d’habitants essentiellement oromo, les forces fédérales affrontent depuis 2018 l’OLA, née d’une scission de l’OLF quand celui-ci a renoncé à la lutte armée et a été légalisé cette année-là. En Amhara, région d’environ 23 millions d’habitants, essentiellement peuplée d’Amhara, l’état d’urgence est en vigueur depuis août pour tenter – jusqu’ici sans succès – de mater l’insurrection des Fano.
Africa Intelligence a dénoncé des « accusations fallacieuses » qui « ne se basent sur aucun élément tangible » et une « arrestation injustifiée ». Antoine Galindo, 36 ans, chef de la rubrique Afrique de l’Est, était arrivé en Éthiopie le 13 février pour couvrir notamment le Sommet de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba, siège de l’organisation panafricaine qui lui avait délivré une accréditation.
Arrêté pour avoir outrepassé son accréditation
Le 28 février, Selamawit Kassa, secrétaire d’État éthiopienne à la Communication avait indiqué que le journaliste français avait été arrêté pour avoir outrepassé son accréditation, laquelle l’autorisait, selon elle, uniquement à couvrir le Sommet de l’UA, et pour avoir collecté illégalement « des informations sur des questions politiques internes » à l’Éthiopie.
Le journaliste a été, entre 2013 et 2017, correspondant en Éthiopie pour plusieurs médias internationaux. Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) avait dénoncé « une arrestation injuste » qui « éclaire le contexte épouvantable pour la presse en général en Éthiopie […] deuxième pire geôlier de journalistes en Afrique subsaharienne ». Reporters sans frontières (RSF) avait fustigé une « détention arbitraire », y voyant « la terrible illustration » de « l’hostilité envers le journalisme indépendant » de la part des autorités éthiopiennes qui « cherchent à contrôler le narratif des récentes tensions sociopolitiques ».
Après des décennies de répression, la liberté de la presse avait fait des progrès spectaculaires à l’arrivée au pouvoir en 2018 de l’actuel Premier ministre Abiy Ahmed qui avait fait libérer plusieurs journalistes et opposants. Mais la situation s’est à nouveau dégradée depuis 2020 et le début de deux ans de guerre contre les autorités dissidentes de l’État régional du Tigré. En 2023, selon Reporters sans frontières (RSF), l’Éthiopie pointait au 130e rang mondial en matière de liberté de la presse, en chute de 16 places par rapport à 2022. Selon l’ONG, au 1er janvier 2024, quinze journalistes étaient en prison.
(Avec AFP)
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