Le nouvel ambassadeur de France à Tunis contraint de présenter ses « excuses »
Le nouvel ambassadeur de France à Tunis, Boris Boillon, a présenté samedi ses « excuses » aux Tunisiens à la télévision nationale après avoir répondu à la presse d’une manière jugée « agressive » par des Tunisiens dont plusieurs centaines ont manifesté pour réclamer son départ.
"Je m’excuse auprès des journalistes et de tous les Tunisiens", a déclaré en arabe le nouvel ambassadeur, qui avait présenté mercredi ses lettres de créance.
"S’ils ont pris mes réponses comme une manière de répondre de façon hautaine, je le regrette et je suis vraiment désolé et je présente toutes mes excuses à tout le peuple tunisien", a-t-il ajouté.
Les journalistes tunisiens ont été choqués par une première rencontre à Tunis du diplomate français avec la presse qu’il avait invitée jeudi à déjeuner.
Elle avait commencé de manière chaleureuse, M. Boillon disant en arabe qu’il était là "pour un nouveau départ, un nouvel avenir". Puis il avait refusé de répondre à des questions de certains journalistes ou les avait qualifiées de "débiles" ou de "n’importe quoi".
Une journaliste a demandé de préciser ses propos à l’ambassadeur qui venait de déclarer que selon lui "la France est mal placée pour donner des leçons dans le domaine de l’état de droit et dans le domaine de la démocratie".
"Non, je ne peux pas expliciter, je dis ce que j’ai à dire et n’essayez pas de me coincer avec des trucs à la con. Voilà, la France n’a pas de leçons à donner, il y a un peuple tunisien qui a montré de manière exceptionnelle, de manière pionnière au 21e siècle ce que c’est que la e-révolution", a-t-il répondu.
"Moi, je ne suis pas là pour faire de la polémique, je ne suis pas là pour créer des problèmes, je suis là, mais pour créer des solutions, donc n’essayez pas de me faire tomber sur des trucs débiles. Franchement, vous croyez que j’ai ce niveau-là, vous croyez que je suis dans la petite phrase débile ?", a-t-il ajouté.
Des extraits de cette rencontre ont été diffusés à la télévision tunisienne ainsi que sur Facebook, qui a joué un rôle moteur dans la révolution.
Manifestation devant l’ambassade de France
Une page Facebook a été ouverte sous le titre: "Boris Boillon, dégage!".
Et samedi, environ 500 Tunisiens ont manifesté devant l’ambassade de France pour réclamer son départ, dénonçant "son manque de diplomatie" et "son agressivité" lors de cette rencontre avec la presse, a constaté une journaliste de l’AFP.
Manifestation à Tunis réclamant le départ de l’ambassadeur de France, M. Boris Boillon, le 19 février 2010.
©AFP
"M. Boillon, vous occupez un poste diplomatique et vous n’avez rien d’un diplomate", "Dégagez, petit Sarko!", "Boris dégage!" pouvait-on lire sur des banderoles.
"Je suis très choquée, c’est la première apparition de l’ambassadeur, il a paru très agressif pour un diplomate. C’est dommage, on espérait une nouvelle coopération sur des nouvelles bases mais cette personne a créé une tension avec la presse", a déclaré une manifestante Houria, 50 ans.
Dans la soirée, Boris Boillon apparaissait à la télévision pour s’excuser. "J’ai une énergie et une volonté bien déterminée de promouvoir des relations bilatérales. J’ai été spontané plus que je n’aurais dû l’être. Dorénavant, je dois parler de manière plus polie", a-t-il dit.
"Le dynamisme de M. Boillon est un gage de résultat dans cette période cruciale où nos relations sont en train d’aborder une nouvelle étape, de prendre un nouvel élan, en s’appuyant sur une nouvelle ambition partagée", avait déclaré auparavant à Paris le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero, en réponse à une question de l’AFP.
La France a été très critiquée pour son incapacité à anticiper le changement, avoir tardé à soutenir la révolution, sur les liens entre des politiques français avec les dirigeants tunisiens et sur des vacances controversées de la chef de la diplomatie Michèle Alliot-Marie fin décembre, en pleine révolution.
M. Boillon, 41 ans, qui occupait précédemment le poste très sensible de Bagdad, remplace Pierre Ménat, 60 ans, qui a fait les frais des erreurs d’appréciation de la diplomatie française lors de la révolution tunisienne.
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