Au Liberia, un tribunal pourrait bientôt juger les crimes de la guerre civile
Les victimes le réclament depuis plus de vingt ans : la Chambre basse du Parlement libérien a adopté mardi 5 mars une motion pour créer un tribunal spécialisé dans les crimes de la guerre civile.
Après des années d’inaction ou presque, la Chambre des représentants a adopté le 5 mars une motion visant à instaurer une cour chargée de juger les auteurs de violations des droits humains et de « crimes économiques » commis lors des deux guerres civiles. Entre 1989 et 2003, celles-ci ont fait environ 250 000 morts et mis le pays à genoux.
Malgré les pressions de la société civile et de la communauté internationale, le Liberia n’a encore tenu aucun procès sur cette période marquée par une litanie d’exactions imputables à toutes les parties : massacres de civils, actes de cannibalisme, tortures, viols, mutilations, enrôlement d’enfants soldats…
Des condamnations ont en revanche été prononcées par des tribunaux étrangers. L’ex-commandant rebelle Kunti Kamara est ainsi jugé en appel depuis mardi à Paris après sa condamnation à la prison à vie fin 2022 pour actes de barbarie et complicité de crimes contre l’humanité pendant la première guerre civile.
Promesse du président Boakai
Plus des deux tiers des députés ont voté en faveur de la motion, qui doit désormais être débattue par le Sénat avant d’être transmise au président Joseph Boakai. « La résolution a été adoptée et la justice est enfin là pour le peuple libérien », a déclaré Jonathan Fonati Koffa, président de la Chambre des représentants après le vote. Des législateurs ont été vus dansant et chantant « Tribunal des crimes de guerre, nous voulons la justice. »
Lors de sa prestation de serment en janvier, le président Boakai avait annoncé la création d’un office chargé « d’explorer la faisabilité » d’un tel tribunal, dont une commission spéciale avait recommandé la création en 2009. Cette préconisation était depuis restée lettre morte.
Certains chefs de guerre et personnalités mis en cause par le rapport, comme le sénateur Prince Johnson, occupent toujours des positions éminentes sur les scènes politiques et économiques. Le vice-président Jeremiah Koung est un allié de Prince Johnson.
« Si vous tripatouillez l’amnistie, vous tripatouillez la paix », a prévenu Prince Johnson mardi matin sur une radio de Monrovia. Ce dernier, qui avait torturé à mort en 1990 le président Samuel Doe, assure aujourd’hui être protégé par une amnistie générale accordée à toutes les parties au conflit dans le cadre d’un accord de paix conclu à la fin de la guerre.
(Avec AFP)
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