La crise politique ébranle le fragile équilibre économique

Pendant que Laurent Gbagbo dispute le pouvoir à Alassane Dramane Ouattara, la situation économique empire dans le pays. L’activité est inerte, le couvre-feu ralentit le rythme de travail, les prix flambent. Sans compter les menaces de sanctions internationales qui planent sur la Côte d’Ivoire.

Des sacs remplis de fèves de cacao dans le port d’Abidjan, le 9 décembre 2010. © AFP

Des sacs remplis de fèves de cacao dans le port d’Abidjan, le 9 décembre 2010. © AFP

Publié le 11 décembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Le blocage politique qui perdure en Côte d’Ivoire pèse sur les ménages comme sur les entreprises et ébranle la cruciale filière cacao du pays qui en est le premier producteur mondial.

Les grands hôtels aux couloirs quasi-déserts donnent une image du marasme actuel. "Ca fait deux-trois semaines qu’on est privé d’activité, ça commence à être lourd", dit à l’AFP le directeur d’un établissement renommé.

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"Est-ce qu’on va s’en sortir?", soupire un grossiste d’Abidjan.

La filière cacao (40% des recettes d’exportations avec le café) est durement frappée. A San Pedro (sud-ouest), premier port d’exportation de cacao au monde, par où transite plus de 500. 000 tonnes de fèves chaque année, le rythme a fortement baissé, en pleine traite cacaoyère. Seules "10.000 tonnes de fèves" ont été exportées au cours du mois écoulé, "contre 25. 000 l’an dernier sur la même période", estime Samir Lakiss, important exportateur ivoiro-libanais.

Des bateaux se détournent de la Côte d’Ivoire pour rejoindre Lomé ou Accra, et si la crise dure plus d’un mois, "la situation risque d’être dramatique en raison des avaries sur la production", insiste-t-il.

Le couvre-feu, une contrainte de plus

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Cette semaine, le patron des patrons Jean Kacou Diagou a tiré la sonnette d’alarme. Alors que le pays est en suspens depuis la présidentielle du 28 novembre, "la situation économique et financière pour de nombreuses entreprises commence à être difficile", et "risque de s’aggraver" faute d’issue dans les prochains jours, a averti le président de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (Cgeci).

Dans un message aux deux rivaux, le sortant Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara, reconnu chef de l’Etat légitime par la communauté internationale, Jean Kacou Diagou a souligné que des sociétés ne pourront bientôt plus honorer leurs engagements fiscaux.

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Installé dans le pays depuis deux ans, un jeune entrepreneur français craint de devoir mettre la clé sous la porte. Ce sont alors ses 19 salariés ivoiriens et leurs familles, soit "une centaine de personnes qui souffriront".

En déclin depuis 20 ans et éprouvée par une décennie de crises politico-militaires, l’économie ivoirienne qui avait amorcé sa reprise avec une croissance à la hausse (passée de 2,3 à 3,6% entre 2008 et 2009), espérait pourtant connaître un vrai rebond après l’élection.

Le couvre-feu nocturne décrété il y a deux semaines par Laurent Gbagbo est une contrainte de plus pour nombre d’entreprises, qui ferment en milieu d’après-midi pour permettre à leurs employés de rentrer chez eux sans encombre.

Hausse des prix

Les perspectives à plus long terme s’assombrissent aussi. Les programmes d’allègement de la dette extérieure, que le pays pouvait espérer décrocher en 2011, sont pour l’heure gelés.

Dans l’immédiat, les ménages sont les premiers à pâtir de l’impasse politique, alors que près de la moitié des quelque 20 millions d’habitants vit dans la pauvreté.

Sur les marchés, chacun se plaint de la hausse des prix. Deux ou trois bananes, qui s’achetaient 200 francs CFA (0,3 euro) peuvent atteindre 1. 000 FCFA (1,5 euro). La bouteille de gaz butane, à 3. 500 FCFA (plus de 5 euros) auparavant, coûte à présent le double.

"C’est exorbitant", se lamente Marina Amoussou en faisant ses courses samedi matin dans le quartier populaire d’Adjamé. Pour cette employée de banque, les autorités devraient "aller faire un tour sur les marchés".

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