70 milliards de dollars de profits : qui sont les gagnants et les perdants parmi les 500 champions africains ?
La flambée de l’or noir a propulsé les bénéfices des pétroliers mais n’a pas empêché la marge nette des 500 de tomber à 11,5% contre 14,9% lors de l’édition précédente.
500 CHAMPIONS AFRICAINS – Si ce classement 2024 des 500 champions africains atteint un record en matière de chiffre d’affaires cumulé, il fait aussi figure de bon cru en matière de profits. Cette année, nous avons pu recueillir les résultats après impôts de 377 entreprises (351 lors de l’édition 2023, qui s’appuyait sur les chiffres de 2021) représentant un chiffre d’affaires de 611,8 milliards de dollars (560 milliards d’euros) pour un cumul de résultats nets de 70,4 milliards de dollars. Sur cette large population d’entreprises, la marge nette moyenne (ratio résultat net sur chiffre d’affaires) ressort à 11,5 % du chiffre d’affaires. Ce ratio s’affiche à un niveau sensiblement inférieur à celui de notre édition précédente, qui avait atteint un record, à 14,9 %.
Un top 10 qui fait la part belle aux mines et au pétrole
Les groupes producteurs de matières premières, dont beaucoup ont connu une année 2022 exceptionnelle du côté des facturations, voient pour la plupart leurs profits s’envoler, avec des effets inévitablement positifs sur leurs bilans. C’est le cas de la Société ivoirienne de raffinage (SIR) qui a quintuplé son résultat net (200 millions de dollars) et, de ce fait, totalement reconstitué ses fonds propres, passés de -5 milliards de F CFA (-7,62 millions d’euros) en 2021 à 120 milliards de F CFA en 2022.
Dans ce domaine, Sonatrach écrase la concurrence, cumulant le titre de poids lourd toute catégorie en matière de chiffre d’affaires et celui en matière de résultat net, avec un bénéfice exprimé en devise américaine deux fois plus important que lors de l’édition précédente, à un peu plus de 11,8 milliards de dollars.
Hormis le géant algérien, au sein du Top 10 des profits consolidés figurent sept autres groupes actifs sur le secteur extractif, dont Nigerian National Petroleum Corporation (NNPC) en troisième place (sur 16 mois), suivi de Anglo American Platinum, OCP, Sonangol et TotalEnergies EP Angola. Kumba Iron Ore et Sibanye-Stillwater ferment la marche, juste derrière MTN.
Fortes dévaluations pour les entreprises nigérianes et égyptiennes
L’opérateur télécom sud-africain a enregistré en 2022 une très belle performance, avec un résultat net exprimé en rand en hausse de plus de 42 %. Mais le groupe dirigé par Ralph Mupita vient d’indiquer aux marchés financiers que ses bénéfices plongeront de l’ordre de 80 % en 2023, essentiellement sous l’effet de la dévaluation du naira et de ses conséquences sur MTN Nigeria. « Dans les pays comme l’Égypte ou le Nigeria, la structure de coût et la rentabilité des entreprises a été fortement affectés par les dévaluations et l’accès restreint aux devises », rappelle Acha Leke, président de la pratique Afrique du cabinet McKinsey.
À noter que la deuxième place en valeur absolue des profits revient à un autre sud-africain, Naspers. Depuis plusieurs années, le premier groupe africain de médias tire parti de ses participations financières et plus-values de cession, liées notamment à sa détention d’une part de Tencent, le géant chinois notamment du jeu vidéo, pour dégager des profits record. C’est encore le cas cette année avec un résultat net de 9,95 milliards de dollars, une nouvelle fois supérieur à son chiffre d’affaires.
À ce titre, dans un tout autre registre, deux autres groupes sud-africains, les promoteurs immobiliers Redefine Properties (289e) et Fortress Reit (463e) affichent, eux aussi, des profits supérieurs à leur chiffre d’affaires du fait de reprises de provisions. C’est le cas également de Namibia Breweries (310e), en raison d’un profit exceptionnel lié à l’intégration de Distell Namibia.
Eskom en tête des perdants
Sur les 377 entreprises pour lesquelles nous disposons de données de rentabilité, 53 enregistrent des pertes. Un chiffre supérieur à celui de l’an dernier (42), mais bien inférieur à celui d’il y a deux ans (97), au plus fort de la crise sanitaire. Ces 53 groupes cumulent 8,4 milliards de dollars de pertes, contre 4,7 milliards de dollars pour les 42 groupes en déficit l’an dernier, un creusement précurseur sans doute des temps plus difficiles qui attendaient nos champions en 2023.
Dans le palmarès des cinq plus grosses pertes, trois groupes sud-africains se distinguent : Eskom, Steinhoff et Telkom. L’électricien Eskom ayant le triste privilège de figurer en tête de cette liste noire. Rongé par son inefficacité, le groupe, qui a vu défiler une quinzaine de PDG différents depuis 2007, a connu en 2022 une perte de 1,4 milliard de dollars, avec un quasi doublement de ses pertes en rand sur un an.
Quant au groupe d’ameublement Steinhoff, il en est encore à solder les conséquences du scandale financier découvert à la fin de 2017 et qui a entraîné son démembrement progressif : sa perte dépasse les 800 millions de dollars. Le groupe Telkom pour sa part affiche un lourd déficit de 585 millions de dollars en raison de dépréciations d’actifs supérieures à 750 millions de dollars, portant notamment sur ses filiales OpenServe, Telkom Consumer, Gyro, et BCX, pour certaines en voie de cession.
La Gécamines et Harmony Gold repassent au vert
Le top 5 des pertes comprend également et de façon plus surprenante deux opérateurs miniers : la Société des mines de Loulo – Gounkoto (912 millions de dollars), une filiale de Barrick Gold qui opère au Mali, et Kamoto Copper Company (582 millions de dollars) en RDC (dont Glencore est actionnaire à 75 % et la Gécamines à 25 %). Dans les deux cas, ces déficits sont liés à des redevances et à des coûts de restructuration exceptionnels.
Enfin, quelques groupes notables repassent dans le vert cette année, dont la Gécamines. Le holding minier public de RDC bascule d’une perte de 158 millions de dollars à un profit net de 251 millions de dollars, essentiellement en raison d’une hausse des redevances.
Le minier sud-africain Harmony Gold oublie lui aussi ses pertes du précédent exercice (63 millions de dollars) et affiche un bénéfice net de 286 millions de dollars du fait de meilleures conditions d’exploitation. Entreprise tunisienne d’activités pétrolières (Etap), sur fonds de hausse des prix de l’or noir, ou encore le groupe sucrier Omnicane en raison du retour à des conditions d’exploitation normales à Maurice, font également partie des de ceux qui retrouvent des couleurs.
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