Les Guinéens attendent les résultats de l’élection présidentielle
Une semaine après la tenue du second tour de l’élection présidentielle guinéenne, les résultats ne sont toujours pas connus. Ils devraient être communiqués dans la soirée de dimanche ou lundi.
La Commission électorale de Guinée doit annoncer avant lundi 15 novembre les résultats de la première présidentielle libre du pays, que le candidat Alpha Condé est pressé de voir publiés tandis que son rival Cellou Dalein Diallo demande l’élimination préalable de "fraudes".
La Ceni n’a fait jusqu’à présent que délivrer, soir après soir, des résultats partiels, laissant les électeurs des deux camps faire leurs comptes. Une façon de faire patienter le pays, après une campagne marquée par quelques heurts politico-ethniques, alors que les scores promettent d’être serrés.
Le général malien Siaka Sangaré, à la tête de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), a assuré qu’il annoncerait les résultats complets dans les soirées de "samedi ou dimanche". La Ceni examine actuellement "une trentaine" de réclamations mais renverra à la Cour suprême "celles qui dépassent ses compétences", a-t-il souligné.
"Les Peuls ont empoisonné l’eau"
Les demandes du candidat Cellou Dalein Diallo sont au coeur du débat. L’ancien Premier ministre (2004-2006) a souhaité que "toutes les fraudes soient éliminées avant la proclamation des résultats" et réclamé "l’annulation pure et simple des votes des circonscriptions de Siguiri et Kouroussa" (Haute-Guinée), deux fiefs de son adversaire.
Il accuse le parti d’Alpha Condé d’avoir mené une campagne "basée sur l’incitation à la haine ethnique", ayant conduit à des violences contre les Peuls en Haute-Guinée (Est) en octobre. "Mes adversaires ont dit ‘tout sauf un Peul’ " et répandu "la rumeur ‘les Peuls ont empoisonné l’eau’ ", a dit M. Diallo, lui-même peul tandis que M. Condé est malinké. "La campagne d’intimidation était si forte qu’on n’a pas trouvé de gens pour nous représenter" dans les circonscriptions de Siguiri et Kouroussa, a-t-il dit. En octobre, des partisans d’Alpha Condé avaient été hospitalisés après avoir consommé des boissons au cours d’un meeting. La rumeur s’était répandue: "les Peuls ont empoisonné l’eau".
Situation tendue
"Les Peuls veulent se faire ‘victimiser’, c’est tout", a réagi le porte-parole d’Alpha Condé, l’ancien Premier ministre François Lonsény Fall, jugeant que tous les propos relatifs à l’ethnie étaient "de nature à enflammer la situation".
"L’acharnement du camp Cellou Dalein Diallo à vouloir faire annuler coûte que coûte le scrutin dans ces circonscriptions" ne constitue que "le signe évident d’un émoi" face à "l’avancée du camp d’Alpha Condé", a dit M. Fall. Il a plutôt demandé à la Ceni de "proclamer, enfin, les résultats".
Opposant à tous les régimes, Alpha Condé, 72 ans, se présentait comme le candidat du changement radical. Condamné à mort sous le régime d’Ahmed Sékou Touré (1958-1984), il avait été emprisonné deux ans sous le régime de Conté (1984-2008).
Cellou Dalein Diallo, 58 ans, s’affichait comme "le président qui rassure", en valorisant une expérience gouvernementale de 11 ans, comme ministre puis Premier ministre sous le régime militaire du défunt général Lansana Conté.
Jeu d’alliances
M. Diallo avait recueilli 43% des voix au premier tour le 27 juin et M. Condé 18%. Cette large avance de M. Diallo n’était pourtant pas réellement significative, la Cour suprême ayant alors annulé un tiers des votes. M. Condé a pu renforcer sa position par un jeu d’alliances, pendant les quatre mois d’attente du second tour. Et M. Diallo n’a pas bénéficié d’un bon report des voix accordées au premier tour à son allié Sidya Touré.
La Guinée "achève une période de transition cruciale pour son avenir mais qui (…) pourrait générer de la violence", a déclaré vendredi à Conakry la procureure adjointe de la Cour pénale internationale (CPI), Fatou Bensouda.
En Guinée, où les ethnies cohabitent habituellement harmonieusement, elle est allée jusqu’à mettre en garde contre un scénario de violences pareil à celui de 2007-2008 au Kenya, qui avait fait 1 500 morts.
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