Élection présidentielle : des « pièces » pour oublier la crise ivoirienne

Dès les premiers jours de l’opération de distribution des cartes d’identité et d’électeur, organisée dans la perspective de l’élection présidentielle le 31 octobre, des centaines d’Ivoiriens se sont rués vers les sites de délivrance, où régnait un certain désordre, entre carences d’organisation et impatience des requérants.

Des personnes attendent de pouvoir obtenir leurs cartes d’identité et d’électeurs, le 9 octobr © AFP

Des personnes attendent de pouvoir obtenir leurs cartes d’identité et d’électeurs, le 9 octobr © AFP

Publié le 10 octobre 2010 Lecture : 2 minutes.

« Vraiment, je suis heureux d’avoir mes papiers », confie Vadama Sanogo, jeune Ivoirien d’Abidjan qui brandit avec émotion ses cartes d’identité et d’électeur, dont la distribution a commencé cette semaine après des années d’attente et de déchirements.

L’enjeu est de taille : depuis le coup d’État de 1999, les « pièces » ont cessé d’être délivrées dans ce pays de forte immigration déchiré depuis plus longtemps encore, au moins une quinzaine d’années, par la question identitaire et le débat sur l’« ivoirité ».

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L’ex-rébellion des Forces nouvelles (FN), qui tient le Nord depuis son putsch manqué de 2002, réclamait la remise de cartes notamment aux habitants de cette région qui s’estimaient ostracisés car soupçonnés d’être étrangers.

Constamment repoussé depuis 2005, le scrutin présidentiel, prévu à la fin du mois, est censé tourner cette page douloureuse.

Fin des désagréments et humiliations

« On n’a pas de pièces, on souffre », dit à l’AFP Mathilde Koffi, une ménagère d’une cinquantaine d’années, qui depuis des heures attend son tour dans le quartier populaire de Treichville.

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« Tous les six mois, se plaint-elle, il faut payer 2 000 francs CFA (3 euros) pour avoir l’attestation » qui tient lieu de papier d’identité et permet d’accomplir les tâches administratives.

Pour Vadama, la satisfaction d’avoir des papiers est encore plus grande.

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Ce « dioula » (originaire du nord du pays) en T-shirt et jeans délavés raconte que, faute de papiers, les forces de l’ordre le « prenaient dans la journée, la nuit ».

« J’étais obligé même de me cacher souvent » pour échapper aux contrôles, dit ce tenancier d’un kiosque à café, âgé d’une vingtaine d’années.

Dans le quartier du Plateau, dédié à l’administration et aux affaires, Cheik Hamed Kader Diaby confie sa « joie ».

Nervosité

La distribution des papiers « prouve que le pays va petit à petit vers la paix définitive », s’enthousiasme le jeune homme. « Puisque cette histoire de pièces d’identité était le facteur-clé de la crise ivoirienne, je me dis qu’avec ça, nous allons tout droit vers la sortie de crise. »

Sur les sites où sont remis les précieux sésames – carte d’électeur en papier, pièce d’identité en plastique orange au format d’une carte de crédit -, l’attente souvent longue attise cependant la nervosité de la foule, où certains n’hésitent pas à donner de la voix.

« Tout est mélangé (en désordre, NDLR) ici. Quand les agents (électoraux) sont arrivés, on a dit que les pièces n’étaient pas encore là. Maintenant que c’est arrivé, on nous demande de faire deux fois la queue pour récupérer la carte d’électeur puis la carte d’identité », s’indigne Aïcha Diaby, une vendeuse de 42 ans, dans le quartier d’Adjamé.

À quelques rues de là, Abdoulaye Tangara, un jeune vendeur de pièces détachées pour voitures, voit dans ces difficultés un mauvais présage pour le crucial rendez-vous du 31 octobre.

« Avec un tel désordre, ce n’est pas un bon signe pour les élections, redoute-t-il. Si pour venir retirer les pièces c’est comme ça, et pour les élections ? Ce sera le chaos. »

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