L’Afrique de l’Ouest toujours plus accro au tramadol
Les dernières statistiques sanitaires montrent que la substance opioïde continue d’être excessivement consommée dans la sous-région. Une addiction portée par un vaste réseau de trafiquants.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 23 mars 2024 Lecture : 2 minutes.
En 2017, l’humoriste Moussa Petit Sergent adaptait la chanson Formidable, de Stromae, pour attirer l’attention de l’opinion sur l’usage dangereux du tramadol. Dans son clip Tramazole – nom répandu de l’opioïde au Faso –, le Burkinabè apparaissait aussi drogué que le Belge semblait ivre dans sa vidéo. En Afrique de l’Ouest, l’antidouleur pose des problèmes de santé publique, notamment dans les grands centres urbains.
Cela fait une vingtaine d’années que le tramadol a commencé à se répandre sur le continent, à la faveur de la multiplication des lieux de distribution des produits pharmaceutiques. Substance légale dont la prescription est justifiée lorsque elle est suivie et que sa posologie respectée, ce médicament proche de la morphine permet d’atténuer des douleurs extrêmes. Mais il aide également nombre d’Ouest-Africains à résister à la fatigue due à une surcharge de travail.
D’un coût relativement abordable, ce produit concerne des milieux sociaux variés. Parmi les consommateurs, on trouve tout à la fois des personnes qui exercent des métiers pénibles, en bas de l’échelle sociale, et des junkies des classes moyennes ambitieuses. Le « médicament des pauvres » est aussi le « carburant des émergents. Cerise sur le gâteau toxique : des vertus sexuelles sont également prêtées au tramadol…
Étourdissements, anxiété et hallucinations
Le problème est que la substance provoque des effets secondaires tels que des étourdissements, de l’anxiété, une sensation d’euphorie, voire des hallucinations. Sa consommation régulière et importante est surtout addictive. Elle génère ainsi un marché de dépendance qui intéresse les vendeurs de rue et les réseaux internationaux de trafic de stupéfiants.
L’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) affirme que la consommation de l’opioïde en Afrique de l’Ouest est supérieure à la moyenne mondiale. Et ce sont 97 % des saisies mondiales de cette substance qui auraient été effectuées dans la région, entre 2017 et 2021, notamment le long du golfe de Guinée. Le Nigeria, le Bénin et la Côte d’Ivoire seraient spécifiquement ciblés par les enquêteurs. Mais les lieux de distribution s’étendent largement à l’intérieur des terres sahéliennes. Et la tendance ne semble pas faiblir.
À titre d’exemple, 43 tonnes de tramadol ont été saisies au Nigeria, en 2022, et 12 tonnes au Bénin. Comme c’est le cas pour bon nombre de produits pharmaceutiques légaux ou illégaux, l’opioïde problématique est fréquemment importé d’Inde ou de Chine. Les enquêteurs traquent également des centres de production africains, notamment au Nigeria.
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