Flèches contre kalachnikov : l’inégal combat entre les villageois et la LRA

Pour se protéger contre l’Armée de résistance du Seigneur, des villageois du Sud-Soudan forment des milices d’autodéfense. Une riposte courageuse mais futile.

Des réfugiés sud-soudanais, le 18 août 2010 à Nzara. © AFP

Des réfugiés sud-soudanais, le 18 août 2010 à Nzara. © AFP

Publié le 23 août 2010 Lecture : 3 minutes.

Lorsque l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) a surgi de la jungle en pleine nuit, armée de kalachnikovs, pour attaquer une bourgade reculée du Sud-Soudan, les villageois ont sorti arcs et flèches, leur seul moyen de défense face à cette guérilla, connue pour sa brutalité.

Mais cette riposte courageuse fut bien futile. Les rebelles ougandais de la LRA ont tué des villageois et en ont embrigadés d’autres de force.

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« Deux d’entre nous sont morts et trois autres ont été blessés », se souvient Vanetta Tamenda, qui a fui le village de Basukangbi, dans l’extrémité sud du Sud-Soudan, près de la frontière avec la République démocratique du Congo (RDC), au moment où la LRA commençait à mettre le feu aux cases.

"Ils sont trop forts"

La milice d’autodéfense du village, baptisée « les garçons des flèches », a été dépassée par la force des assaillants. « Ils sont trop forts. Nous avons besoin de fusils pour nous défendre », assure Vanetta, qui retire son tee-shirt pour laisser voir la blessure par balle qui balafre son dos.

Des dizaines de milliers de personnes ont été tuées par la LRA depuis qu’elle a commencé ses activités dans le nord de l’Ouganda en 1988.

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Ces rebelles ont étendu leurs opérations dans l’extrême nord-est de la RDC depuis une dizaine d’années, puis en 2008 en Centrafrique. Ils sévissent aussi depuis des années au Sud-Soudan.

Dirigée par Joseph Kony, recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, la LRA est considérée comme l’une des guérillas les plus brutales au monde.

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Attaques en hausse

« Cette année, les attaques de la LRA semblent être en hausse », remarque Sapana Abuyi, vice-gouverneur de l’État d’Équateur-Occidental, région la plus touchée du Sud-Soudan par les attaques de la LRA. « Pas une semaine ne passe sans que nous parviennent des informations d’un village attaqué par la LRA », ajoute-t-il.

Des centaines de personnes ayant fui les attaques récentes de la LRA –aussi appelée « tong-tong » ou « chop-chop » du nom des machettes utilisées pour achever un adversaire– se sont réfugiées dans le village de Nzara.

« Les gens sont partis rapidement et n’ont presque rien pris avec eux (. . . ) Nous vivons tous de l’aide alimentaire », souligne Daniel James Banjen, chef du secteur Sangwa, attaqué au début du mois d’août par les hommes de la LRA.

Plusieurs rescapés de ces violences expliquent ces attaques par le début de la moisson. « Ils nous laissent tranquille lorsque nous cultivons. Mais lorsque la récolte est prête, ils nous chassent et prennent notre nourriture », constate Terezina Mathew, une jeune femme avec un bambin agrippé à sa jupe.

L’ONU et plusieurs organisations humanitaires offrent une aide alimentaire, des soins médicaux et des tentes, aux déplacés, mais les responsables locaux craignent que la situation se pérennise parce que personne n’entrevoit de fin dans les attaques des rebelles ougandais.

Les soldats du Sud-Soudan et de l’armée ougandaise patrouillent cette région, mais les troupes sont limitées et la zone immense. Les hommes de la LRA, eux, effectuent des raids éclair dans des villages, puis retournent dans la jungle, leur refuge.

Le président américain Barack Obama a signé fin mai la promulgation d’une loi demandant à son administration de mettre au point une stratégie pour aider les États de la région à désarmer la LRA et à protéger les civils affectés par cette guérilla.

« Les États-Unis disposent de la force et de la technologie, ils peuvent s’en servir pour capturer Kony », espère Anton Juma, aussi membre d’une milice locale d’autodéfense. « Car nos flèches ne servent à rien contre leurs fusils. »

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