En RDC, face à Tshisekedi, l’Église catholique va-t-elle incarner l’opposition ?

Lors de la cérémonie d’hommage au député Chérubin Okende, le cardinal Ambongo n’a pas hésité à pourfendre le régime en place et son numéro un fraîchement réélu, Félix Tshisekedi. L’Église pourrait de nouveau assumer une forme de leadership dans l’opposition.

 © Damien Glez

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Publié le 25 mars 2024 Lecture : 2 minutes.

Une porte compte souvent deux gonds et il aura fallu deux événements pour que l’Église de RD Congo (RDC) sorte à nouveau des siens. La goutte d’eau qui semble avoir fait déborder le vase d’un silence épiscopal plutôt rare est l’issue du feuilleton qui a suivi la mort brutale du député Chérubin Okende.

Lors d’un hommage rendu, mercredi 20 mars, à la cathédrale de Kinshasa, l’archevêque local a évoqué « la conclusion incompréhensible à laquelle est parvenue l’enquête »… C’est le 13 juillet 2023 que le porte-parole du parti Ensemble pour la République de Moïse Katumbi avait été retrouvé mort dans son véhicule sur l’avenue des Poids-lourds, à Kinshasa.

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Des images avaient circulé, montrant son corps criblé de balles sur le siège conducteur. Spontanément, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, avait qualifié le décès d’« assassinat ». Mais, en février, le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, privilégiera la thèse du suicide, après les « recours aux experts en balistique, en télécommunications », après l’« autopsie » et les « analyses toxicologiques » et après la découverte annoncée d’un carnet dans lequel le défunt aurait déclaré être « au bout du rouleau ».

Fridolin Ambongo qualifie d’« incompréhensibles » les conclusions

Le 20 mars, en plein office, le cardinal Fridolin Ambongo ne s’est pas contenté de qualifier les conclusions de l’enquête d’incompréhensibles. Il y voit « la preuve suprême, s’il y en avait encore besoin, que la justice […] est vraiment malade ». Or le premier événement qui a fait sortir l’Église de ses gonds est la levée récente du moratoire sur la peine de mort en RDC. Pour le cardinal, ce levier pourrait permettre au « malade déclaré » – entendre « la justice congolaise » – d’« instaurer la terreur ».

Et la Conférence épiscopale du Congo (Cenco) d’enfoncer un clou plus liturgique en publiant un communiqué intitulé « Tu ne tueras pas ». Dans ce texte, les évêques catholiques considèrent que « la volonté de “débarrasser l’armée de notre pays des traîtres […]” ne peut en aucun cas justifier le recours à la peine capitale ».

Ils précisent que ce « retour en arrière en matière de défense de la vie » renforce la « banalisation de la vie humaine » par une justice congolaise « gangrenée par la corruption, le trafic d’influence, les erreurs judiciaires et les règlements de compte ».

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L’Église, fer de lance de la contestation

À la cathédrale, c’est sous des applaudissements nourris que Fridolin Ambongo a déployé une question rhétorique : « Comment comprendre que Chérubin, un père aussi attentionné […] se soit suicidé en tirant des balles sur lui-même et sur sa voiture après une longue balade en ville. »

Si l’Église semblait tétanisée après la réélection de Félix Tshisekedi à la présidence de la RDC, avec 73,34 % des voix en décembre dernier, le cardinal n’a pas l’habitude de garder sa langue dans sa poche sur les sujets politiques. Il avait d’ailleurs qualifiées les dernières élections de « gigantesque désordre ».

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