Des Sénégalaises pleines d’énergie (solaire) dans un documentaire
Diffusé en Afrique grâce au réseau Canal Olympia, « La Lumière des femmes » montre comment de simples villageoises, formées à Dakar, deviennent le moteur du changement, et comment le progrès passe par l’électricité.
Apporter de l’électricité dans des endroits isolés, telle est l’une des missions de l’ONG indienne Barefoot College. Fondée en 1972 par Bunker Roy, son but était, à l’origine, de faciliter l’accès à l’eau potable en Inde. Aujourd’hui, elle déploie son action dans 93 pays, et, depuis 2003, celle-ci s’est élargie à l’énergie solaire. Plutôt que de fournir les panneaux clés en mains, Barefoot College forme les villageois à installer, à entretenir et à réparer le matériel. Ou plutôt les villageoises, car l’ONG a constaté que les hommes avaient tendance à quitter leur village alors que femmes y revenaient. Ces « mamans solaires », parfois analphabètes, vont devenir ingénieures.
Eau potable et électricité au Sénégal
Le documentaire La Lumière des femmes, d’Élise Darblay et d’Antoine Depeyre, commence avec l’arrivée d’une équipe de l’ONG, qui sillonne des villages peuls du nord du Sénégal pour proposer aux habitantes d’être formées à Dakar. « Il se trouve qu’une nouvelle sélection se faisait au Sénégal, mais ça aurait pu être n’importe où dans le monde », nous explique Antoine Depeyre. Un heureux hasard, qui permet de découvrir des femmes admirables.
Elles n’ont ni le même âge ni le même parcours, et pourtant Hawa, Aïssata et Néné incarnent chacune à sa manière le thème du documentaire. « Ce qui nous passionnait, explique Élise Darblay, c’était de savoir comment naît le libre-arbitre chez ces femmes. On savait qu’un élément disruptif allait se produire avec l’arrivée de l’ONG et on a voulu filmer le changement qu’il allait provoquer. Nous n’étions pas venus pour étudier les Peuls. »
Des femmes puissantes
Si Hawa et Aïssata sont désignées par leur village, Néné choisit d’elle-même de partir, contre l’avis de son mari, qui menace même de la répudier. Une liberté qui intrigue : « On se demande comment une femme en vient à se rebeller à ce point, contre sa vie, contre sa condition. Pourquoi celle-ci plus qu’une autre, alors qu’elles vivent dans des villages identiques ? C’est une question qu’on avait envie de creuser parce que ce phénomène est incroyable. »
La lumière qui donne son titre au film ne fait pas seulement référence à l’énergie solaire, mais évoque le bouleversement des modes de vie et des rapports hommes-femmes. « Ce n’est pas la technologie qui a changé la société, c’est le fait que ces femmes se déplacent. Elles se retrouvent pendant plusieurs mois séparées de leur famille et de leur belle-famille. On ne pourra jamais imaginer ce que c’est de vivre tout le temps au même endroit sans avoir connaissance d’un ailleurs. Tout à coup, elle se retrouvent dans une ville inconnue, avec des inconnus. Elles changent complètement de cadre, et elles qui avaient l’habitude de travailler toute la journée ont désormais du temps. Elles peuvent mettre des mots sur leur ressenti. »
Un changement indélébile
De retour dans leur village, chacune de ces femmes emporte avec elle son nouveau regard sur le monde. « Elles ont changé, de l’intérieur. Il faut que chacun prenne la mesure de cette transformation et l’accepte. Ce changement est indélébile. Ce qui s’est ouvert en elles lors de ce voyage ne se refermera plus. À leur retour, elles ont parfois constaté avec difficulté que le changement ne pouvait passer que par elles. Ce sont elles qui ont un nouveau rapport au monde. Les hommes ne sont pas sortis de leur routine depuis des générations. »
Le film voyage en Afrique, où il est visible dans 19 salles réparties dans 12 pays grâce au réseau Canal Olympia. Hawa, Aïssata et Néné l’ont vu en avant-première : « On croisait les doigts pour qu’elles s’y retrouvent, et c’est ce qui est arrivé. Elles ne se rendaient pas compte à quel point leurs mots pouvaient porter et elles étaient fières que La Lumière des femmes soit montré dans les villages. » Chronique d’un changement en marche et portrait sensible de femmes qui en sont le moteur, ce documentaire lumineux est une leçon de vie.
La Lumière des femmes, d’Élise Darblay et Antoine Depeyre, film documentaire (deux versions : 1h20 et 52 mn), prochainement sur Arte, Canal+ International et Public Sénat.
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