À Gaza, Israël reconnaît une « grave erreur » après la mort d’humanitaires dans une frappe

L’armée israélienne a reconnu le 3 avril une « grave erreur » après la frappe qui a tué sept collaborateurs de l’ONG humanitaire World Central Kitchen dans la bande de Gaza, un drame qui suscite la consternation internationale.

Des membres des Nations unies se tiennent à côté la voiture des humanitaires du World Central Kitchen qui a été touchée par une frappe israélienne la veille à Gaza, le 2 avril 2024. © AFP

Des membres des Nations unies se tiennent à côté la voiture des humanitaires du World Central Kitchen qui a été touchée par une frappe israélienne la veille à Gaza, le 2 avril 2024. © AFP

Publié le 3 avril 2024 Lecture : 4 minutes.

C’est « une grave erreur » qui « n’aurait pas dû se produire », a déclaré le chef de l’état-major israélien Herzi Halevi dans un message vidéo, évoquant « une mauvaise identification » dans des « conditions très complexes ». Le 3 avril, le président d’Israël Isaac Herzog avait présenté ses « excuses sincères » et fait part de sa « profonde tristesse » pour cette frappe – survenue le 1er avril et qui a tué sept collaborateurs de l’ONG humanitaire World Central Kitchen –, que le Premier ministre Benjamin Netanyahu a qualifiée de « non intentionnelle » et de « tragique ».

Basée aux États-Unis, l’ONG World Central Kitchen (WCK), l’une des rares qui opérait encore dans le territoire palestinien dévasté par près de six mois de guerre entre Israël et le Hamas palestinien, a annoncé « suspendre ses opérations dans la région » après la frappe survenue le 2 avril à Deir al-Balah (centre). Plusieurs pays et organisations, dont l’ONU qui a dénoncé un « mépris du droit humanitaire international », ont condamné cette frappe, la plus mortelle à avoir touché du personnel humanitaire international depuis le début de la guerre.

la suite après cette publicité

Le président américain Joe Biden s’est dit « indigné » et « le coeur brisé », estimant qu’Israël ne protège « pas assez » les volontaires venant en aide à la population palestinienne « affamée ». « C’est inadmissible. Mais c’est le résultat inévitable de la façon dont la guerre est menée », a relevé le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, répétant son appel à un cessez-le-feu immédiat, à la libération des otages et à l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza.

La mort des sept membres de World Central Kitchen porte le nombre total des travailleurs humanitaires tués lors de ce conflit à 196, « dont plus de 175 de l’ONU », a-t-il rappelé.

Les États-Unis réclame une enquête « rapide et impartiale »

WCK s’est dit « dévastée » par la mort des membres de son équipe, des « héros » dont elle a publié dans la nuit sur X les noms, les photos et les nationalités : Saifeddine Issam Ayad Aboutaha, 25 ans, palestinien ; Lalzawmi (Zomi) Frankcom, 43 ans, australienne ; Damian Soból, 35 ans, polonais ; Jacob Flickinger, 33 ans, americano-canadien, ainsi que John Chapman, 57 ans, James (Jim) Henderson, 33 ans et James Kirby, 47 ans, britanniques.

« J’ai le coeur brisé et je suis consternée que nous, World Central Kitchen et le monde, ayons perdu de belles vies aujourd’hui à cause d’une attaque ciblée des forces israéliennes », a déclaré la présidente de WCK, Erin Gore. Depuis le début de la guerre, WCK a participé aux opérations humanitaires en fournissant des repas dans le territoire palestinien, où la majorité des quelque 2,4 millions d’habitants sont menacés de famine selon l’ONU. Elle a aidé à l’envoi d’un premier bateau d’aide depuis Chypre via un couloir maritime vers Gaza mi-mars.

la suite après cette publicité

Alliés historiques d’Israël, les États-Unis ont réclamé une enquête « rapide et impartiale ». Le Royaume-Uni a convoqué le 2 avril l’ambassadeur d’Israël pour exprimer sa « condamnation sans équivoque ». Le Premier ministre australien Anthony Albanese a, lui, indiqué le 3 avril avoir fait part à Benyamin Netanyahou de la « colère » du peuple australien « face à cette tragédie ».

Le 1er avril, un correspondant a vu cinq corps et trois passeports étrangers près des dépouilles des victimes. Celles des six Occidentaux doivent être amenées le 3 avril au poste-frontière de Rafah en vue de leur rapatriement, a indiqué Marwan al Hams, directeur de l’hôpital Abu Najar de cette ville jouxtant l’Égypte.

la suite après cette publicité

Benjamin Netanyahu, « un traître à votre peuple »

Depuis le début de la guerre, plusieurs ONG présentes à Gaza ont affirmé que leurs employés ou sites avaient été touchés par des frappes israéliennes. En raison de la difficulté de faire entrer de l’aide humanitaire par voie terrestre dans le territoire sous blocus israélien, un premier bateau d’aide humanitaire a rallié Gaza depuis Chypre mi-mars. Mais un second bateau, le Jennifer, qui était proche des côtes gazaouies, a fait demi-tour et est retourné à son point départ avec près de 240 tonnes de nourriture non livrée, après la frappe qui a conduit à la suspension des activités de WCK.

Lundi 1er avril, après dix-huit jours d’opérations, les troupes israéliennes se sont retirées du complexe hospitalier al-Chifa à Gaza laissant derrière elles d’immenses destructions et des cadavres. L’armée a indiqué y avoir « tué plus de 200 terroristes et arrêté plus de 900 personnes et a accusé le Hamas, considéré comme un groupe terroriste par les États-Unis et l’Union européenne, d’avoir utilisé l’hôpital comme un « centre de commandement ». La Défense civile de Gaza, dirigée par le Hamas, a fait état de 300 morts à l’intérieur et autour de l’hôpital dans les opérations israéliennes.

« La condamnation et la dénonciation ne suffisent pas face aux crimes qui se poursuivent dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem », a déclaré le 2 avril le nouveau Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammed Mustafa. Le ministère de la Santé du Hamas a indiqué tôt le 3 avril que 60 personnes avaient été tuées dans la bande de Gaza durant les dernières vingt-quatre heures.

À Jérusalem, pour le quatrième soir consécutif, des familles d’otages retenus à Gaza et des opposants au gouvernement de Benyamin Netanyahou se sont rassemblés le 2 avril devant le Parlement pour crier leur colère envers la politique du Premier ministre. « Vous menez une campagne contre moi, contre les familles d’otages, vous vous êtes retournés contre nous. Vous nous appelez “traîtres” alors que vous êtes le traître, un traître à votre peuple, à vos électeurs, à l’État d’Israël », a crié au micro Einav Zangauker, dont le fils est retenu en otage à Gaza.

Le 3 avril, quatre policiers israéliens ont été blessés dans une attaque à la voiture bélier à un point de contrôle à Kochav Yaïr, dans le centre d’Israël, a rapporté la police, qui a précisé que l’assaillant était mort.

(Avec AFP)

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Contenus partenaires