« Nous sommes devant le jugement de l’histoire »

Les bureaux de vote ont ouvert pour la première élection libre de l’histoire de la Guinée. La veille, en conclusion de la campagne présidentielle, le général Sékouba Konaté a appelé tous les candidats à n’abstenir de tout « acte » ou « propos qui allongerait la liste déjà longue de nos martyrs ».

Sékouba Konaté et Jean-Marie Doré, le 26 juin 2010, pour la clôture de la campagne électorale. © AFP

Sékouba Konaté et Jean-Marie Doré, le 26 juin 2010, pour la clôture de la campagne électorale. © AFP

Publié le 27 juin 2010 Lecture : 2 minutes.

"Tous, nous sommes devant le jugement de l’histoire", a lancé l’officier qui s’exprimait solennellement devant les 24 candidats – tous civils – réunis au palais Sekoutoureya, à Conakry, à la veille du premier tour du scrutin.

"Aucun de nous ne devrait poser un acte ou prononcer un propos qui allongerait la liste déjà longue de nos martyrs. C’est demain que la Guinée avancera pour toujours ou reculera", a déclaré l’officier, plusieurs fois applaudi par l’assistance.

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Il s’exprimait neuf mois après le massacre d’au moins 156 opposants par l’armée, dans un stade de Conakry.

Où vous allez nous mener

Sekouba Konaté avait été le principal artisan du putsch de décembre 2008 après la mort du général-président Lansana Conté, et était devenu le numéro 3 de la junte au pouvoir. Il s’est retrouvé président "par intérim", fin 2009, quand le chef de la junte, Moussa Dadis Camara, a été victime d’une tentative d’assassinat.

Sekouba Konaté avait promis qu’aucun militaire ni dirigeant de la transition ne serait candidat à la présidentielle et il a tenu parole. Il doit à présent tenir son engagement de remettre le pouvoir aux civils à l’issue du scrutin.

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"Le 15 janvier, à Ouagadougou, il m’a été confié une mission soutenue par la communauté internationale. (…) Vous avez tous attendu de moi que je respecte ma parole. C’est à mon tour de vous regarder, pour voir là où vous allez nous mener", a-t-il dit à l’ensemble des candidats, en présence des autorités de transition et de représentants des institutions internationales.

La crainte des affrontements

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L’officier a mis les candidats en garde contre le risque de violences politiques, trois jours après des affrontements entre militants à Coyah (50 km à l’est de Conakry): "Plus le fossé sera grand entre vous, plus il y aura de risques d’affrontements entre vos partisans".

Appelant les électeurs au calme et à la retenue, l’officier a déclaré: "Je n’accepterai pas qu’on assiste à une guerre fratricide à cause de calculs ou d’ambitions personnelles (…) On ne peut plus continuer à vivre comme dans une jungle ou dans un État sans âme".

Dans un pays ayant souffert de 51 ans de dictatures, civile puis militaires, l’ex-ministre de la Défense de la junte a affirmé que l’armée était à présent "acquise à la démocratie".

"Évitons que cette armée qui a montré son adhésion totale à la transition et qui est acquise à la démocratie ne dise à son tour que les hommes politiques n’ont pas pu saisir l’offre de démocratie qu’elle a faite", a-t-il lancé aux candidats.

En réponse, un opposant à tous les régimes depuis l’indépendance, Alpha Condé, 73 ans, a pris la parole au nom de tous les candidats : "Nous devons remercier ceux qui ont permis à la Guinée de voir que le changement a commencé", a-t-il dit. M. Condé a adressé ses remerciements au général Konaté ainsi qu’à la communauté internationale.

De son côté, la présidente du conseil national de la transition (organe consultatif composé de 159 membres), la syndicaliste Rabiatou Serah Diallo, a mis en garde contre l’ethnocentrisme, en faisant valoir qu’"une seule ethnie ne peut diriger la Guinée sans les autres".

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