Les services de renseignement dans le viseur des Occidentaux
Une étude publiée le 14 juin par la London School of Economics accuse les services de renseignement pakistanais de collusion avec les talibans afghans. Un double jeu que les Occidentaux dénoncent régulièrement et qui, selon eux, est responsable de leur enlisement militaire en Afghanistan.
Les talibans afghans seraient soutenus par les services pakistanais. © D.R.
Publié le 14 juin 2010 Lecture : 2 minutes.
Les services de renseignement pakistanais (ISI) fourniraient des fonds, un entraînement et une protection aux talibans en Afghanistan, selon une étude publiée par la London School of Economics dimanche. Cette étude, fondée sur des entretiens avec neuf commandants talibans réalisés en Afghanistan au début de l’année, indique avoir les éléments les plus probants à ce jour démontrant une étroite collaboration entre l’ISI (Inter-Services Intelligence) et les insurgés.
"Même si (les talibans) bénéficient d’un fort soutien intérieur, selon les commandants talibans, l’ISI orchestre, soutient et influence énormément le mouvement", écrit l’auteur du rapport, Matt Waldman, chercheur de l’Université Harvard. Les responsables talibans "disent que (l’ISI) offre une protection à la fois aux talibans et au réseau Haqqani (aile radicale des talibans afghans) et fournit un important soutien en ce qui concerne l’entraînement, les munitions et l’alimentation et autres besoins", ajoute-t-il. Certains des talibans interviewés ont indiqué que des membres de l’ISI avaient assisté, en tant que participants ou observateurs, à des rencontres avec le conseil suprême des talibans (la Choura de Quetta), selon le rapport.
Accusations de double jeu
Le président pakistanais, Asif Ali Zardari, lui-même, aurait assuré à des responsables talibans emprisonnés qu’ils pouvaient compter sur son soutien, selon ces sources. Il aurait apparemment autorisé la libération de ces responsables, indique l’étude. Cette étude conclut que, sans un changement significatif dans l’approche des autorités pakistanaises, il sera impossible, aussi bien pour le gouvernement afghan que pour les forces de l’Otan, de mettre un terme à l’insurrection en Afghanistan.
"L’engagement apparent du Pakistan dans un double-jeu à cette échelle pourrait avoir des implications géopolitiques majeures et pourrait même provoquer des contre-mesures de la part des Etats-Unis", souligne l’auteur. Cependant, tout progrès contre les insurgés en Afghanistan nécessitant le soutien de l’armée pakistanaise et de l’ISI, "la seule façon de s’assurer d’une telle coopération est de prendre en considération les causes fondamentales de l’insécurité du Pakistan, notamment son conflit latent et persistant avec l’Inde", souligne-t-il.
Relais de la CIA
Cette étude a provoqué un ferme démenti de la part de l’armée pakistanaise. "Cela fait partie d’une campagne malveillante visant l’armée pakistanaise et l’ISI", a indiqué à l’AFP le porte-parole de l’armée Athar Abbas. "Tout cela est sans fondement. Les sacrifices de l’armée pakistanaise et de l’ISI ainsi que les victimes de la guerre contre le terrorisme parlent d’eux-mêmes". "Nous avons plusieurs questions sur la crédibilité du rapport", a-t-il ajouté.
L’ISI est accusée régulièrement de double-jeu par les Occidentaux et de plus en plus critiquée par les groupes fondamentalistes musulmans qu’elle a aidés dans le passé. L’ISI était le relais principal de la CIA dans les années 1980 quand elle distribuait l’argent et les armes des Etats-Unis aux moudjahidine qui combattaient les soviétiques en Afghanistan, et dont les cadres sont devenus ensuite ceux des talibans dans les années 1990.
Le soutien offert par l’ISI au régime des talibans à Kaboul de 1996 à 2001 et à des groupes fondamentalistes musulmans visant l’Inde a incité de nombreux responsables occidentaux à soupçonner des membres de l’organisation de continuer à jouer un double jeu.
